Intervention de Odette Terrade

Réunion du 17 juin 2009 à 14h30
Réforme du crédit à la consommation — Article 19

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Nous en sommes donc parvenus au titre III, dont le rapport avec les matières dont nous avons traité jusqu’ici est assez lointain. Dans les faits, son objet est d’en rajouter dans l’application de l’article 38 de la Constitution !

Depuis 2002, les différents gouvernements qui se sont succédé n’ont eu de cesse de recourir au dispositif de cet article de la Constitution, puisque ce sont chaque année plusieurs dizaines de textes qui sont promulgués par voie d’ordonnances, ordonnances que l’on ratifie, dans la plus grande confusion parfois, dès que l’occasion s’en présente.

Cette intervention vaudra également pour les six amendements que M. Marini présentera tout à l’heure à titre personnel et dont le lien avec le projet de loi s’avère lui aussi ténu. Il ne s’agit plus de cavaliers, mais de toute une cavalerie !

Le titre III, qui vise à procéder à une harmonisation ou à une modification des dispositifs relatifs aux activités financières de manière générale, se limite en fait, pour l’essentiel, à un article d’habilitation tendant à dessaisir le Parlement, une fois encore, du droit de légiférer, ce que nous refusons a priori !

Notons d’ailleurs que la commission spéciale a adopté un amendement visant à ratifier l’ordonnance du 30 janvier 2009 portant sur la commercialisation des produits d’assurance sur la vie et sur des opérations de prévoyance collective et d’assurance et que l’article 19 tend à soumettre à ordonnance de nouvelles matières.

Sur la forme, la promulgation d’une ordonnance prive la représentation nationale, donc les citoyens, d’un débat transparent et public. Tout se dénoue alors dans une concertation plus ou moins réussie entre le Gouvernement et les représentants de la profession concernée.

Au demeurant, à la lecture de l’article 19, on peut s’interroger sur les compétences qui seront exercées demain par les différentes autorités de place en matière d’activités de crédit, d’assurance ou financières et sur l’approche particulière adoptée pour la pénalisation des manquements déontologiques des acteurs.

Certes, l’article 19 ne vise pas à limiter la portée des sanctions qui pourraient être prises à l’encontre des acteurs du secteur financier peu respectueux de la déontologie de la profession. Toujours est-il que cet article d’habilitation fait lui-même suite à une disposition de même nature de la loi de modernisation de l’économie, qui a été suivie de la promulgation de onze ordonnances, pas moins ! Pour un seul article d’habilitation, c’est peut-être un record ! Et ces onze ordonnances se sont pourtant révélées en quelque sorte insuffisantes, puisque le champ couvert par la disposition de la loi précitée n’était pas assez précis.

Comme le souligne le rapport de la commission spéciale, « l’habilitation accordée sur le fondement de l’article 152 de la LME n’avait pas été suffisamment large.

« En effet, le c) du 2° de l’article 152 habilitait le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance des dispositions visant à “ajuster les champs de compétence des autorités et d’autres entités susceptibles d’intervenir dans le contrôle de la commercialisation de produits financiers afin de rendre celui-ci plus homogène”. Or, la référence aux “produits financiers” ne recouvre pas les services bancaires, en particulier les opérations de crédit.

« En outre, le fait “d’ajuster les champs de compétences des autorités” a été interprété de manière restrictive par le Conseil d’État, comme un réaménagement limité des compétences desdites autorités.

« De surcroît, l’habilitation de la LME ne prévoyait pas explicitement la possibilité de renforcer ou de donner des pouvoirs de sanction aux autorités en matière de respect des obligations vis-à-vis de la clientèle. Or, le Conseil d’État a jugé que cette référence devait obligatoirement figurer dans l’habilitation pour que l’ordonnance puisse aborder les pouvoirs de sanction. »

Cela nous ramène à l’article 19 du présent projet de loi et aux amendements de M. Marini. Je le souligne d’emblée, c’est la Commission bancaire qui verra ses pouvoirs accrus dans cette affaire. Comment ne pas regretter, une fois encore, qu’un tel débat n’intervienne qu’en vue de l’adoption d’un simple article d’habilitation ? Nous ne pouvons approuver ni l’article 19 ni les amendements déposés par M. Marini.

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