Madame la présidente, madame la ministre, madame la rapporteur, mes chers collègues, la particulière technicité du présent texte ne doit pas masquer son intérêt et ses enjeux. Ce projet de loi a pour objectif de faciliter l’accès à la culture du plus grand nombre. Le groupe UDI-UC ne peut que souscrire à un tel objectif et votera donc ce projet de loi, qui adapte à notre législation des directives européennes dans les domaines de la propriété littéraire et artistique et du patrimoine culturel.
Soulignons par ailleurs que ce texte est examiné dans un cadre particulièrement contraint. Tout d’abord, l’adaptation au droit européen implique une retranscription fidèle et précise de dispositions que le législateur national ne peut pas modifier substantiellement. Ensuite, la procédure d’adaptation de notre droit interne au droit européen impose au législateur national de répondre à des délais précis.
La procédure d’urgence selon laquelle s’est déroulé l’examen de ce texte est motivée par plusieurs retards de transposition : les dates butoirs de deux des trois directives étant dépassées. Ainsi, le délai de transposition de la directive relative à la durée de protection du droit d’auteur s’est éteint au 1er novembre 2013, tandis que celui de la directive relative aux œuvres orphelines expirait le 29 octobre dernier. Nous déplorons les conséquences de ce retard, notamment au regard de la sécurité juridique ; certaines mesures seront rétroactives pour la période courant entre le 1er novembre 2013 et la date de la promulgation de la loi.
Cependant, le consensus qui s’est dégagé en commission paritaire mixte ne laisse guère de doute quant à l’adoption du présent texte. La transposition de ce texte sera donc bientôt effective, et c’est une bonne chose.
Le présent projet de loi vise à transposer trois directives.
La première est la directive du 27 septembre 2011 modifiant la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins. Notre groupe tient à saluer les apports importants de ce projet de loi qui renforce notamment la défense des droits voisins des artistes-interprètes et des producteurs du seul secteur de la musique.
Le principal objet de la directive est de porter de cinquante à soixante-dix ans la durée de protection de certains droits voisins. Il s’agit de ceux des artistes-interprètes et des producteurs du seul secteur de la musique, le but étant de prendre en compte leur plus grande longévité, reflet de l’allongement général de la durée de la vie. Les droits dont ils sont titulaires arrivent à l’échéance de plus en plus souvent de leur vivant. Nous ne pouvons que soutenir la transposition fidèle ici faite de cette directive.
La deuxième la directive est celle du 25 octobre 2012, relative à certaines utilisations autorisées des œuvres orphelines.
Le texte permet à un certain nombre d’organismes, dont les bibliothèques accessibles au public, de numériser et de mettre à la disposition du public des œuvres appartenant à leurs collections et considérées comme orphelines, c’est-à-dire dont les titulaires de droits d’auteur ou de droits voisins n’ont pu, malgré des recherches diligentes, être retrouvés. Cette faculté, qui doit s’exercer dans un cadre non lucratif, est également ouverte aux musées, aux services d’archives, aux institutions dépositaires du patrimoine cinématographique ou sonore, aux établissements d’enseignement et aux organismes publics de radiodiffusion.
Nous nous réjouissons de l’accord trouvé avec l’Assemblée nationale sur l’article 2, relatif aux droits voisins, grâce à l’excellent travail de Mme la rapporteur et de Mme la présidente de la commission de la culture. Le Sénat a en effet, supprimé une mention non conforme à la directive, incluant les recettes issues de la location des œuvres dans l’assiette de la rémunération annuelle supplémentaire des artistes-interprètes et ouvert la possibilité pour les sociétés de perception et de répartition des droits agissant pour le compte des artistes-interprètes de demander au producteur l’état des recettes provenant de l’exploitation du phonogramme, confortant ainsi les droits des artistes-interprètes.
Des discussions tout aussi constructives ont eu lieu sur l’article 4, relatif aux conditions de mise à disposition au public des œuvres orphelines après leur numérisation. Notre assemblée avait supprimé la limitation à cinq ans du droit à des aides pour la numérisation des œuvres orphelines. L’objectif de cette modification était de lisser l’impact de l’amortissement sur une longue période. Nous sommes satisfaits du compromis retenu en commission mixte paritaire, qui fait passer la durée d’amortissement de cinq à sept ans. La rédaction finale est plus fidèle à l’esprit de la directive et nous saluons cette avancée.
Le projet de loi transpose, enfin, la directive du 15 mai 2014 relative à la restitution des biens culturels ayant quitté illicitement le territoire d’un État membre. L’objet de ce texte est de garantir la restitution, au profit d’un autre État membre, de tout bien culturel considéré comme un « trésor national de valeur artistique, historique ou archéologique » ayant quitté illicitement son territoire après le 1er janvier 1993. Cette rédaction apparaît conforme aux objectifs assignés par la directive.
Par ailleurs, nous saluons les efforts entrepris en matière d’intelligibilité et de lisibilité du texte, notamment à travers un travail d’actualisation des différentes terminologies existantes et surtout d’adaptation du vocabulaire issu de la directive aux terminologies de droit interne.
En conclusion, nous ne voyons pas de raison de nous opposer à ce projet de loi, qui reste fidèle aux textes communautaires, tout en regrettant le dépôt tardif de ce projet de loi, retard qui, entre autres conséquences négatives, interdit au Parlement de travailler comme il le devrait.