De plus, pour le présent texte, une telle négligence, outre qu’elle peut à juste titre donner le sentiment aux artistes-interprètes que l’on fait peu de cas de leurs attentes, a eu de véritables conséquences en matière de sécurité juridique puisqu’il a un effet rétroactif pour la période courant entre le 1er novembre 2013 et la date de promulgation de la loi.
Cela étant, les rapporteurs, celui du Sénat comme celui de l’Assemblée nationale, ont travaillé rapidement et ont pu trouver une rédaction commune pour la quasi-totalité du texte. Seuls deux articles ont fait l’objet de divergences et ont provoqué la réunion d’une commission mixte paritaire.
Le premier d’entre eux, l’article 2, concerne la prolongation de la durée des droits voisins des artistes-interprètes et des producteurs du secteur de la musique, dans le cadre d’une directive de 2011, avec une durée de protection qui passe de cinquante à soixante-dix ans. Pour calculer la rémunération annuelle supplémentaire, le texte initial avait inclus dans l’assiette les recettes perçues grâce à la location de phonogrammes. Notre rapporteur, Colette Mélot, s’est inquiétée de la non-conformité de cette mention avec la directive, qui exclut expressément le louage. La commission mixte paritaire a conservé la rédaction du Sénat sur ce point.
A également été maintenue une disposition que nous avions adoptée et aux termes de laquelle les sociétés de perception et de répartition des droits des artistes-interprètes peuvent demander au producteur un état des recettes réalisées grâce à l’exploitation de l’œuvre. Il s’agit d’inscrire dans la loi l’obligation d’information pesant sur les producteurs et de permettre aux artistes interprètes de se reposer sur l’intervention d’une SPRD.
Dans ce domaine aussi, le Sénat a apporté sa valeur ajoutée, au service d’une meilleure protection des artistes-interprètes, dont la situation financière est souvent fragile lorsqu’ils achèvent leur carrière.
La commission mixte paritaire a également examiné la question de l’exploitation des œuvres orphelines par certains organismes ayant une mission d’intérêt public, tels que les bibliothèques, les établissements d’enseignement ou les musées. Le projet de loi doit permettre à ces organismes sans but lucratif de rendre accessibles des textes dont on ne peut retrouver l’auteur ; cet objectif s’inscrit dans le cadre de la stratégie numérique pour l’Europe développée par la Commission européenne.
Le projet de loi instaure, pour la mise à disposition du public de ces œuvres – par un procédé de numérisation, par exemple –, une procédure que l’organisme devra respecter, afin de s’assurer que le titulaire des droits est réellement introuvable. Comme une telle recherche s’avère coûteuse, il a été prévu que les organismes exploitant les œuvres orphelines pourraient répercuter leurs frais sur les utilisateurs, du moins en ce qui concerne les frais de numérisation et de mise à disposition du public.
La question restant à trancher était la durée pendant laquelle cette répercussion des frais pourrait avoir lieu. L’Assemblée nationale l’avait restreinte à cinq ans, mais notre rapporteur avait craint que cette mesure ne fût contre-productive, les bibliothèques étant incitées à répercuter fortement leurs frais sur les premières années de mise à disposition des œuvres.
La commission mixte paritaire est parvenue à une solution de compromis : vu que l’organisme ne peut répercuter éternellement les coûts réalisés, mais que ces coûts peuvent avoir un effet fortement dissuasif en raison de leurs conséquences financières, elle a porté de cinq à sept années leur durée d’amortissement.
En ce qui concerne le dernier volet du projet de loi, la lutte contre le trafic des biens culturels, le texte adopté par l’Assemblée nationale a été entériné sans modification, le Sénat ayant approuvé la dérogation créée en matière de charge de la preuve afin de renforcer le dispositif.
Mes chers collègues, le texte qui ressort de la procédure parlementaire est équilibré, respectueux des objectifs fixés par les directives européennes et porteur d’avancées sur les trois sujets traités. Le groupe UMP le votera bien évidemment.