Intervention de Philippe Dominati

Réunion du 17 juin 2009 à 14h30
Réforme du crédit à la consommation — Article 27 bis

Photo de Philippe DominatiPhilippe Dominati, rapporteur :

Je ne vais pas rouvrir le débat sur la création d’un fichier positif, il nous a déjà occupés à maintes reprises.

Le principe de la création de ce fichier, absent du projet de loi du Gouvernement, figure dans le texte de la commission spéciale, ce qui constitue une avancée majeure.

L’idée n’est cependant pas partagée par une majorité franche de la commission ; elle constitue plutôt une base de discussion.

En fait, il s’agit d’inverser le mode de fonctionnement du FICP.

Deux options s’offrent à nous.

Première option, nous tentons d’enrichir le FICP. Cela exige que nous nous donnions du temps afin de procéder à une véritable évaluation technique. C’est nécessaire si nous voulons aboutir.

Seconde option, nous présentons la centrale comme un outil censé résoudre très rapidement les problèmes de solvabilité. C’est alors la créditer de bien trop d’importance. En réalité, cette centrale ne fera que contribuer à la détermination des responsabilités respectives des emprunteurs et des prêteurs. Mais, une fois que l’on saura qui a eu tort, et s’il fallait ou non prêter, on aura sans doute permis la régulation du crédit, mais sans doute pas amélioré l’accès au crédit.

Les débats qui ont eu lieu au cours des quatre derniers mois dans cette enceinte, en mettant en évidence les aspects positifs du dispositif et ceux qui l’étaient moins, ont montré combien il avait été utile de persévérer dans cette voie.

D’un point de vue technique, le délai de trois ans est raisonnable. Il faut compter un an avant que le FICP n’atteigne le niveau de compétitivité et de réactivité escompté. Les nouvelles conditions de fonctionnement du FICP devraient donc pouvoir être mises en œuvre à partir de mai 2011.

En Belgique, il a fallu deux ans pour que la centrale des crédits, qui recense aujourd’hui huit millions de contrats, soit opérationnelle. Votre rapporteur vous propose un an pour tenir compte des nouvelles conditions de fonctionnement du FICP et deux ans pour la création du fichier positif.

Plus le délai est long, plus le travail de mise en cohérence a de chance d’aboutir. À l’inverse, plus le délai est court, moins les parties prenantes ont de chance de se comprendre – elles sont aujourd’hui sur des positions très tranchées, qu’il s’agisse des professionnels ou des politiques, mais aussi des associations, très divisées sur le sujet -, et l’on risque de passer à côté d’un certain nombre de questions.

En tout état de cause, il n’est pas sérieux de vouloir traiter d’un tel sujet au détour d’un simple amendement dans un projet de loi portant réforme du crédit à la consommation.

Le projet instituant le fichier positif belge – vous le savez bien, madame Bricq, monsieur Biwer – comprenait 34 articles, des pages de documentation, et a fait l’objet de longs débats. En Belgique, la carte d’identité est obligatoire et porte un numéro de référence. Nous n’avons jamais voulu instaurer de telles obligations, car nous refusons que le citoyen français ait un numéro de référence pour ses rapports avec les administrations.

Comme vous pouvez le constater, les problèmes sont multiples. Prétendre y remédier en un an ou en deux ans n’est pas sérieux. Une telle rapidité est la promesse d’un débat qui va s’envenimer, les uns et les autres étant front contre front. Certains ne manqueront pas d’invoquer le respect des libertés individuelles ; d’autres y trouveront l’occasion de demander l’extension de la centrale des crédits aux bailleurs de fonds, voire aux fournisseurs d’énergie, d’électricité par exemple, dépassant ainsi le champ initialement limité aux particuliers et à la notion de crédit.

En ce qui concerne les statistiques, l’exemple est trop court. On a pris le modèle belge, mais il en existe beaucoup d’autres en Europe. Il faut savoir qu’il existe des fichiers positifs en Allemagne, en Italie, en Espagne et dans la majorité des pays européens.

Nous avons privilégié le modèle belge parce c’est celui qui nous paraissait le plus sûr, celui qui semblait le mieux correspondre à notre volonté de faire en sorte que la puissance publique garde la maîtrise de ce fichier, même si cela présente quelques inconvénients par ailleurs.

Depuis que j’ai été nommé rapporteur, j’ai suivi un cheminement assez long, mais sans pouvoir encore aboutir à une conviction fermement établie.

La commission a souhaité inscrire le principe de la création d’un fichier positif dans la loi : c’est fait. Je suis persuadé que la réduction des délais irait à l’encontre des ambitions de ceux qui sont convaincus de l’utilité de cet outil. N’étant, pour ma part, pas entièrement convaincu, j’ai presque envie de dire « Chiche » ! Mais, franchement, un an, ce n’est pas suffisant, et deux ans, ce n’est pas raisonnable.

N’oublions pas qu’il s’agit de créer une base de données qui concernera au minimum 15 millions de Français, et même jusqu’à 34 millions, si l’on inclut les nouveaux produits financiers tels que les cartes bancaires. C’est une lourde responsabilité, et elle justifie le délai prévu par la commission spéciale.

Au surplus, madame Bricq, monsieur Biwer, aucun des engagements précédemment évoqués n’a eu de traduction législative, alors que le principe de la création d’une centrale des crédits figurera dans la future loi. C’est une avancée importante que je vous demande de reconnaître.

Monsieur Biwer, le délai d’un an n’est vraiment pas raisonnable.

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