Je vous remercie de m'avoir invitée sur un sujet qui m'a interpellée, car nous n'avions jamais abordé la question du cancer sous un angle genré. En termes d'épidémiologie, les hommes ont une incidence de cancer supérieure à celle des femmes, et la mortalité masculine est plus importante. Si, depuis trente ans, le nombre de cancers a doublé dans la population française, notamment à cause de son vieillissement, à partir de 2005, on constate que le taux d'incidence a diminué chez les hommes et qu'il s'est stabilisé chez les femmes. Ces tendances s'expliquent par le fait que les hommes ont réduit leur consommation de tabac et d'alcool, ce qui n'est pas le cas des femmes. Néanmoins, le taux de cancers du sein commence à baisser, grâce à la moindre utilisation du traitement hormonal substitutif de la ménopause.
Si l'on fait abstraction du tabagisme, les femmes sont plus sensibles aux messages de prévention et d'éducation à la santé. Elles sont plus soucieuses d'alimentation et de vie saines. Le taux de prévalence du tabagisme reste néanmoins très élevé, soit 33 % chez les femmes de 25 à 45 ans, notre pays se situant parmi les mauvais élèves dans ce domaine. Conséquence directe de ce phénomène, le nombre de cancers du poumon a augmenté de manière considérable chez les femmes : il a quadruplé en dix ans et devrait être l'an prochain plus mortel que le cancer du sein.
Concernant le dépistage, on constate que les femmes sont souvent plus raisonnables que les hommes. Il existe deux dépistages organisés dans la population, celui du cancer du sein et celui du cancer colorectal. Le taux de participation au dépistage du cancer du sein est de 52 % ; 62 % si l'on prend en compte les femmes qui se font dépister en marge du programme, à titre individuel. C'est un bon chiffre, par rapport à l'objectif de 75 % fixé par l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Le dépistage du cancer colorectal est recommandé tous les deux ans entre 50 et 74 ans. Il s'agit du troisième cancer chez les hommes, du deuxième chez les femmes. Le taux de participation au dépistage reste faible (32 %), alors que 18 000 personnes meurent chaque année d'un cancer colorectal. Les femmes se montrent toutefois plus raisonnables que les hommes, un écart de dix points séparant les deux courbes.
Nous avons prévu de mettre en place un troisième dépistage organisé, celui du cancer du col de l'utérus. Actuellement, 40 % des femmes se font dépister régulièrement, par un frottis effectué tous les trois ans, entre 25 et 70 ans. Cela reste insuffisant, d'autant que l'on doit prendre en compte des aspects socio-économiques, les franges les plus pauvres de la population n'ayant guère accès au dépistage. En revanche, le dépistage du cancer de la prostate ne relève pas de la même priorité : 50 % des cancers diagnostiqués le sont à tort, donnant lieu à des traitements inutiles avec des séquelles importantes en termes de qualité de vie. Autrement dit, sur le cancer, notre inquiétude concerne plus les hommes que les femmes.
Des études ont montré que les femmes allaient plus facilement chez le médecin. Il reste à étudier les stades de diagnostic pour voir s'ils sont plus précoces chez les femmes que chez les hommes. Cela permettrait de sensibiliser la population à la nécessité de consulter régulièrement un médecin, car un diagnostic précoce favorise les chances de survie. Enfin, le registre des essais cliniques montre que 10 % des patients y participent, sans différenciation de genre pour les recrutements des personnes qui y participent.