Intervention de Jean-Pierre Door

Commission mixte paritaire — Réunion du 17 juillet 2014 à 17h00
Commission mixte paritaire sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014

Jean-Pierre Door :

Merci Madame la présidente. Effectivement nous nous trouvons devant un dilemme : c'est encore une fois une CMP qui va échouer. C'est probablement regrettable, néanmoins nous ne pouvons pas faire autrement.

Je souhaiterais revenir sur ce qui s'est passé lors du débat à l'Assemblée nationale il y a quelques jours. Nous avons surtout vu le ministre menacer dès le premier article ; menacer d'abord de mettre tous les votes en réserve pendant de nombreuses minutes, sinon de nombreuses heures, avant d'envisager l'utilisation de l'article 49-3 de la Constitution. Pourquoi ? Pas parce que l'opposition qui est la nôtre s'animait, mais parce que, au sein de la majorité, il y avait une fracture. Cette fracture, qui était liée à ce que l'on a pu appeler les « frondeurs », était assez importante et a inquiété la majorité. Nous sommes donc partis sur un climat difficile, lié aux problèmes de la majorité.

Revenons à la position de l'opposition, à celle de l'UMP en particulier. Concernant les trois premiers articles du projet de loi, qui sont des réductions de charges sociales - patronales et salariales - destinées à alléger le coût du travail, nous pensons que ce sont des mesures qui vont dans le bon sens. Nous ne pouvions que regretter à l'époque que l'on ait balayé d'un revers de main la TVA anti-délocalisation du gouvernement précédent, parce que nous aurions gagné du temps et nous n'aurions pas perdu deux ans au moment où le climat économique est difficile, et où les entreprises sont en difficulté. C'est pourquoi nous n'avons pas voté contre les articles 1er, 2 et 3 de ce projet de loi qui permettaient l'allégement des cotisations sociales.

En revanche, nous avons émis des réserves, en particulier sur la question des recettes. Nous jugeons ce projet de loi insincère. Insincère budgétairement puisque 42 milliards d'euros de recettes liés à ces allégements viennent à manquer pour la période de 2015-2017. Or, la loi organique prévoit, exige même, une compensation à l'euro près. Le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. Gérard Bapt, avec l'annexe A et avec un certain tact, a admis que l'on pourrait effectivement compenser à l'euro près rapidement. Le ministre lui-même a renvoyé ce débat à plus tard, lors de l'examen du PLFSS pour 2015, c'est-à-dire en octobre et novembre de cette année. Nous refusons cette posture : lorsque l'on allège les cotisations, lorsque l'on réduit les recettes de la protection sociale, lorsque l'on voit l'échelonnement entre 2015 et 2017 prévu par l'annexe A, il fallait des garanties pour savoir comment nous compenserions. Tout le monde connaît les compensations. Est-ce qu'il fallait augmenter la CSG ? La TVA ? Est-ce que ce sont des cotisations que nous allons augmenter, ou encore des taxes environnementales ? Nous avions indiqué au ministre que nous souhaitions qu'il se réfère aux premières décisions du Haut conseil du financement de la protection sociale, où siègent nos collègues sénateurs également, et qui a déjà fait des avancées sur le futur financement de la protection sociale. Je crois que l'on met la charrue avant les boeufs, et que ce projet de loi est totalement insincère. Nous avons dit qu'il s'agissait, pour les entreprises, d'un chèque en blanc ; que les entreprises ne peuvent pas attendre deux ans.

Le deuxième point de contestation porte sur le gel des petites pensions de retraite à l'article 9 du projet de loi. Au report de la revalorisation des pensions d'avril à octobre, s'ajoute donc désormais un gel de leur montant pendant douze mois : les pensions ne feront donc l'objet d'aucune revalorisation pendant dix-huit mois, au détriment des personnes retraitées. Il fallait absolument compenser cela par autre chose.

Ensuite, le troisième point porte sur la réduction importante des financements du Fonds de modernisation des établissements de santé publics et privés. Depuis une dizaine ou une douzaine d'années, la dotation du Fonds a permis d'améliorer sensiblement les hôpitaux et les établissements privés, dans le domaine de l'informatisation notamment. Or, ce projet réduit considérablement la dotation affectée au fonds en évoquant ses réserves financières ; on nous explique qu'il n'est pas nécessaire de thésauriser ces financements. Je ne partage pas ce point de vue. Je pense que ces fonds sont mal utilisés. Je soutiens l'idée que ce fonds devrait servir aux petites structures hospitalières. Nous n'admettons pas cette diminution de 160 millions d'euros. Enfin, nous regrettons que les dispositions de cette loi, relatives à la première partie, ne s'appliquent pas dès 2014 mais seulement à compter de 2015. C'est également pour cette raison que notre groupe a décidé de voter contre l'ensemble du texte.

Je pense effectivement, comme l'a dit Madame la Présidente, qu'il sera difficile de trouver un modus vivendi dans le cadre de cette commission, dès l'instant où nous avons également nos positions.

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