Intervention de François Grosdidier

Commission d'enquête sur la mise en oeuvre de l'écotaxe poids lourds — Réunion du 29 avril 2014 à 17h30
Audition de Mme Ségolène Royal ministre de l'écologie du développement durable et de l'énergie

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier :

Vous parlez de remise à plat, mais n'est-ce pas plutôt une remise en cause ? Pour qu'un dispositif soit remis à plat, encore faut-il qu'il soit entré en vigueur, or ici, il semble qu'il soit plutôt question de l'abandonner.

J'ai noté bien des contradictions dans vos propos. A l'encontre de l'entreprise, vous dénoncez à la fois retards et précipitation. Mais nous avons pu constater ici comment le dossier a été appréhendé : les retards que vous dénoncez ont été négociés entre le partenaire privé et l'Etat. Et quand vous attribuez les émeutes en Bretagne à la précipitation avec laquelle aurait été pris le décret, faut-il vous rappeler que des observateurs très neutres s'accordent plutôt à les imputer à un ras-le-bol fiscal, cette taxe s'ajoutant à beaucoup d'autres, bien plutôt qu'au système d'Écomouv', qui avait été largement négocié, avec la Fédération nationale des transporteurs routiers (FNTR) et les représentants de Bretagne ?

J'aimerais savoir ce qu'est pour vous la différence entre un dispositif incitatif et un dispositif punitif. Dès lors que l'on pose une réglementation assortie de sanctions, on est, en matière d'environnement comme ailleurs, dans le punitif. Or, le principe même de l'écofiscalité, c'est l'incitation. Je comprends donc mal que vous vous offusquiez de la répercussion sur les chargeurs. Le propre de l'écofiscalité, c'est bien d'intégrer les coûts environnementaux dans le prix de revient, donc dans le prix de vente d'un produit. Il s'agit d'éviter que les viandes issues d'animaux élevés en Bretagne, par exemple, n'arrivent dans nos supermarchés, quand elles sont transformées sur place, à un prix supérieur à celles dont la transformation est délocalisée. Les camions qui sillonnent ainsi la France évitent soigneusement la Suisse et l'Allemagne - qui ont choisi de taxer les transports plutôt que le travail - et, passant par l'Alsace et longeant le sillon rhodanien, polluent notre air et détériorent nos routes, sans rien payer.

La suspension du dispositif de l'écotaxe se fait au préjudice de ces régions frontalières, mais aussi de la Bretagne. Il est curieux que la réponse du gouvernement Ayrault à la fermeture de l'abattoir Gad, qui signe la délocalisation de l'aval de la filière agroalimentaire, se solde par l'abandon de l'écotaxe, qui avait précisément vocation à relocaliser les activités... Et si tel est bien votre choix, je crains que ne soient déçus les espoirs que vous fondez sur les conclusions de cette commission d'enquête pour permettre à l'Etat de s'exonérer de sa responsabilité financière à l'égard d'Écomouv' en cas d'abandon du projet sur un motif d'intérêt général, autrement dit une décision politique.

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