La proposition de loi déposée par M. Michel Françaix nous offre en effet l'occasion de confirmer notre profond attachement à l'existence d'une presse forte et indépendante. Sur les trois grands thèmes qu'elle aborde, deux me paraissent pouvoir faire l'objet d'un rapide consensus entre les deux chambres.
S'agissant, en premier lieu, des dispositions relatives à la distribution de la presse écrite rassemblées dans le titre Ier, je pense que notre proposition de confier l'homologation des barèmes à l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP), après avis du président du Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP), ne soulève pas de difficulté particulière. Je relève d'ailleurs qu'elle a recueilli l'assentiment de tous les acteurs concernés.
Il me semble que nous pourrons tout aussi rapidement nous entendre sur les innovations introduites dans le titre III relatif au soutien à la presse. À côté du statut d'entreprise solidaire de presse, créé par l'Assemblée, c'est en effet à l'unanimité que le Sénat a adopté trois nouvelles mesures :
- la première introduit, à l'initiative du sénateur David Assouline sous-amendée par le Gouvernement, une réduction d'impôt pour la souscription au capital d'une entreprise de presse ;
- la deuxième conforte le dispositif d'aide à la presse existant en élargissant, sur proposition de notre commission de la Culture, le champ d'action des fonds de dotation au soutien à la modernisation de la presse ;
- la troisième - dite « amendement Charb » - transcrit dans la loi, comme le demandaient notamment les groupes Communiste, Républicain et Citoyen (CRC) et Union pour un mouvement populaire (UMP) du Sénat, la défiscalisation des dons émanant de particuliers effectués au bénéfice d'associations ou de fonds de dotation exerçant des actions concrètes pour le pluralisme de la presse d'information politique et générale, dont la pratique repose aujourd'hui sur un rescrit fiscal.
En revanche, je devine que quelques discussions seront nécessaires avant que nous nous accordions sur les dispositions que le Sénat a insérées dans le titre II, consacré à l'Agence France-Presse (AFP).
Je rappelle que si la Haute assemblée a souscrit à certains apports de l'Assemblée nationale - l'application de la parité, le renforcement de la représentation du personnel et l'introduction de personnalités qualifiées dans le conseil d'administration de l'Agence -, elle a toutefois souhaité préciser que, pour refléter la vocation internationale de ses missions, au moins trois de ces personnalités qualifiées puissent justifier d'une expérience significative au niveau européen et international.
De manière plus décisive, nous avons voulu renforcer la gouvernance de l'AFP, dont le fonctionnement du conseil d'administration nous est apparu très perfectible. À cette fin, nous avons proposé d'instituer une nouvelle instance de contrôle, dénommée « commission de surveillance », regroupant les actuels conseil supérieur et commission financière, renommés respectivement « comité de déontologie » et « comité financier ». Nous avons en effet estimé que l'AFP ne dispose pas d'une gouvernance à la hauteur des défis, concurrentiels et financiers, auxquels elle est confrontée. L'Agence n'a pas d'« actionnaire » au sens strict, puisqu'elle ne possède pas de capital et que l'État ne peut jouer ce rôle, ne siégeant pas au conseil d'administration pour d'évidentes raisons de crédibilité internationale des activités de l'Agence et ne pouvant plus lui apporter des aides financières proscrites par le droit européen.
Or, dans le même temps, l'AFP s'engage sur un important programme financier, via la filiale de moyens récemment créée qui pourra emprunter jusqu'à 26 millions d'euros et ce malgré des résultats financiers qui demeurent dégradés. Nous avons donc estimé urgent de créer un lieu où la stratégie de l'entreprise serait exposée, examinée et contrôlée, en nous inspirant du modèle appliqué avec efficacité depuis près de deux siècles par la Caisse des dépôts et consignations.