Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, aborder le dossier des concessions autoroutières revient à aborder les dossiers du financement des infrastructures et de l’aménagement du territoire, mais également ceux du report modal et de l’environnement.
Nos réflexions ne peuvent pas aboutir à la remise en cause du système des concessions, lequel a été inventé dans notre pays, car il s’agit d’un atout pour les entreprises françaises à l’étranger. Or nous devons toujours être attentifs à l’écho de nos débats nationaux au-delà de nos frontières.
En préambule, je ferai quelques rappels, car, à mon sens, ce débat doit nous inciter à beaucoup d’humilité au regard des épisodes passés.
J’évoquais au début de mon intervention le financement des infrastructures. Alors que ce dernier a longtemps été assuré par une fraction de la TIPP, la taxe intérieure sur les produits pétroliers, nous avons connu par la suite des systèmes plus élaborés, avec notamment, en 1993, le plan autoroutier Balladur, puis, en 1995, la mise en place du Fonds d’investissement des transports terrestres et des voies navigables, le FITTVN, dans le cadre de la loi d’aménagement du territoire de Charles Pasqua. Ce dernier texte instituait d’ailleurs une taxe d’aménagement sur les sociétés autoroutières, en même temps qu’il affectait au FITTVN le produit de la redevance domaniale.
Ce fonds a fonctionné pendant quelques années, jusqu’à sa suppression par le gouvernement de Lionel Jospin, lequel organisait au même moment la première privatisation d’une société autoroutière, à savoir ASF-Escota, dans le cadre de loi de finances pour 2002. Je rappelle que cette société était à l’époque le premier concessionnaire en France, le deuxième en Europe et le troisième dans le monde. Les recettes devaient être affectées aux infrastructures, mais, en fait, elles ont été réparties ailleurs.
Cet exemple n’ayant pas suffi, quelques années plus tard, après que l’AFITF eut été créée et que Gilles de Robien eut envisagé d’affecter les dividendes des SEMCA à un financement durable des infrastructures, nous avons connu, en 2005, l’épisode, dont il a été abondamment question aujourd'hui, de la privatisation des sociétés autoroutières par le gouvernement de Dominique de Villepin. Celle-ci a eu lieu non pas dans des conditions confidentielles, comme je l’ai entendu dire tout à l’heure par Jean-Yves Roux, mais, au contraire, à l'occasion d’un débat très vif.
Je me souviens notamment, comme sans doute Marie-Hélène des Esgaulx, que la commission des finances de l’Assemblée nationale, sur l’initiative de Gilles Carrez, avait demandé de nombreuses expertises, ce qui avait d’ailleurs permis de relever le prix de 10, 5 milliards d’euros à 14, 8 milliards d’euros, évitant ainsi des conséquences encore plus lourdes que celles que nous constatons aujourd’hui.
Si je formule ce rappel, c’est non pas pour donner raison à ceux qui prétendent que la même politique aurait été menée par des majorités différentes, mais pour nous inciter à essayer de trouver des solutions stables pour le financement des infrastructures, et cela dans une plus grande transparence du système des concessions, singulièrement autoroutières.
Je ne reviens pas sur le rapport de la Cour des comptes de juillet 2013, sinon pour en citer trois extraits : « Le ministre chargé des transports ne négocie pas avec les sociétés concessionnaires d’autoroutes dans un cadre lui permettant de disposer d’un rapport de forces favorable » ; « les contrats de plan signés pour cinq ans, qui permettent aux entreprises autoroutières de réaliser des investissements compensés par des hausses de péage ne sont pas publics et sont conclus dans des conditions peu transparentes » ; « le système des contrats de plan permet aux concessionnaires de compenser les investissements qu’ils réalisent par des augmentations de tarifs des péages routiers. Ce système, qui devait être l’exception est devenue la règle, …