Intervention de Danielle Michel

Réunion du 5 mars 2015 à 10h30
Débat sur le thème « service civil : volontaire ou obligatoire ? »

Photo de Danielle MichelDanielle Michel :

Après la lutte contre l’illettrisme en 2013, la grande cause nationale de l’année 2014 a été l’engagement associatif, en particulier celui des jeunes. Cet engagement doit se poursuivre et s’amplifier.

Le dispositif du « service civique », créé en 2010, s’inscrit dans ce cadre. Il est aujourd’hui unanimement reconnu comme positif, avec une croissance continue du nombre de jeunes volontaires. Depuis sa création, il a séduit plus de 46 000 personnes.

En ce début d’année, le Président de la République a annoncé une mesure forte : « Tous les volontaires pour le service civique pourront être accueillis à l’horizon 2017 », soit « entre 150 000 et 170 000 » par an.

Face aux défis extraordinaires que nous devons relever, il est effectivement nécessaire de mobiliser des jeunes, des associations et des collectivités locales. Il faut une mobilisation sans précédent pour promouvoir nos valeurs et faire vivre la République partout.

Rappelons-le, l’engagement associatif des jeunes est, comme à l’école, marqué par des inégalités, en partie liées à l’origine sociale. Il est donc impératif que le développement du recrutement au service civique satisfasse à un impératif de mixité sociale.

Alors que le président de la République a ouvert une réflexion nationale sur de nouvelles formes d’engagement citoyen, de nombreuses propositions ont vu le jour.

À titre d’exemple, un groupe de réflexion a récemment proposé la mise en place d’un « été citoyen », qui défend justement l’objectif d’un brassage des publics. Des milliers de jeunes seraient affectés de manière aléatoire au sein des nouvelles régions partageant pendant un mois une mission d’intérêt général : aide à une association de solidarité, participation à des missions de cohésion sociale pour une mairie... Ce serait un temps d’apprentissage de savoirs utiles pour la vie, par exemple la formation aux premiers secours ou la rédaction d’un curriculum vitae, et de savoirs citoyens : fonctionnement d’un système de santé, de retraites ou de services publics ; utilité des impôts…

Le Sénat et l’Assemblée nationale ont lancé une mission de réflexion sur toutes les formes d’engagement et sur le renforcement de l’appartenance républicaine. Le Parlement fera des propositions.

Toutes les politiques publiques doivent fabriquer de l’égalité et de la mixité des populations dans tous les territoires.

Or, depuis des décennies, la France néglige les creusets républicains. L’école connaît quelques ratés : au lieu de combler les inégalités de départ, elle semble les aggraver.

C’est pourquoi la refondation de l’école avait été lancée. La ministre de l’éducation nationale vient de présenter onze mesures sur la laïcité et la transmission des valeurs républicaines à l’école.

Le Gouvernement a souhaité développer le corps de la réserve citoyenne et le nombre de centres de l’Établissement public d’insertion de la défense, l’EPIDE. Saluons son action forte et déterminée à cet égard.

Plus largement, il nous faut multiplier les « lieux communs » où notre jeunesse se découvrirait un destin partagé.

Selon la loi, cette période d’engagement qu’est le service civique doit « renforcer la cohésion nationale et la mixité sociale ». Or il est établi que cet objectif n’est actuellement que « partiellement atteint ». Je reprends les chiffres que mes collègues Éliane Assassi et Jean-Baptiste Lemoyne ont rappelés pour étayer ce constat : moins d’un engagé sur quatre a un niveau inférieur au bac, quand le taux ciblé était d’un sur trois ; alors que l’objectif fixé était de 25 %, la part des volontaires issus des quartiers de la politique de la ville est seulement de 18 % ; les volontaires handicapés ne sont que 0, 4 %, contre les 6 % attendus.

Nous le savons, le statut mobilise majoritairement une population relativement diplômée, alors même qu’il est très positif pour les décrocheurs qui en bénéficient.

Faut-il pour autant le rendre obligatoire ? Comment en faire un instrument efficace au service de la mixité sociale? Voilà qui me semble être la bonne question.

Pour cela, trois défis sont à relever dans l’amplification du dispositif.

Premier défi, il faut préserver la qualité des missions et de l’encadrement des jeunes. Soulignons à cet égard le rôle fondamental du tuteur, acteur privilégié qui peut s’assurer de la qualité et de l’objectif d’intérêt général de la mission de service civique proposée. Soulignons également le rôle important des missions locales pour l’information, l’accompagnement et la médiation quand c’est nécessaire.

Deuxième défi, il importe d’éviter au maximum les substitutions à l’emploi.

Troisième défi, il convient de développer au maximum les politiques incitatives qui permettent de rendre cette mixité effective dans l’accès à ce type de mission.

C’est sur ces points que je souhaite vous interroger, monsieur le ministre. Quelles pistes pourraient être proposées lors du comité interministériel ?

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