Pourquoi n'avons-nous pas abordé la question de l'égalité entre les sexes ? Nous l'avons fait en partie : lorsque nous demandons une protection sociale pour les sportifs, nous pensons par exemple à la maternité des sportives. Cependant, je vous concède que nous n'avons pas abordé frontalement ce sujet très important de l'égalité entre les sexes : il ne figurait pas dans la lettre de mission, pas plus que d'autres sujets sur lesquels j'ai été interpelé, à l'instar des arbitres. Dans le délai de cinq mois qui nous a été imparti, nous ne nous sommes pas dérobés au programme déjà très chargé qui était le nôtre, en témoignent les quelque 191 auditions que nous avons effectuées.
Faut-il responsabiliser davantage les clubs et les fédérations ? Certainement, c'est dans ce sens qu'il faut aller. L'instruction civique et citoyenne est également un point très important : les fédérations sont déjà responsabilisées, nous avons constaté combien les directeurs techniques nationaux étaient mobilisés, reste à s'assurer que les engagements sont effectivement tenus. Un mécanisme de sanction serait intéressant, pour retirer l'agrément aux clubs qui ne mettent pas en place les formations à la citoyenneté : vous avez votre rôle à jouer pour y parvenir.
Le football serait-il le seul sport touché par des comportements malveillants ou asociaux ? Je ne le crois pas et j'ai beaucoup appris à ce sujet au cours de ce travail. Je viens d'un quartier populaire, ayant grandi jusqu'à ma majorité dans le plus grand quartier d'habitations à loyer modéré (HLM) de Limoges : je peux témoigner que l'éducation citoyenne « de la rue » qui prévalait dans ces quartiers a complètement disparu. Et ce que nous constatons, c'est qu'au-delà du football, les mauvais comportements touchent le rugby, le basket, l'athlétisme, le handball et n'épargnent pas non plus bien des sports individuels.
On ne peut rien bâtir si ces fondamentaux citoyens, éthiques, ne sont pas acquis par les jeunes. D'autant que la plupart d'entre eux, après avoir rêvé de millions, joueront pour peu ou pas grand-chose au cours de leur carrière, avec le traumatisme et l'aigreur de n'avoir pas évolué en Pro.
Nos propositions sont-elles toutes d'ordre législatif, et quelle serait la meilleure solution pour l'assurance sociale des sportifs ? Je ne suis pas un spécialiste de la sécurité sociale, mais j'ai consulté l'un des meilleurs experts en la matière et nous avons cherché ensemble ce qui pourrait convenir le mieux aux sportifs. Le système d'assurance volontaire ne convient pas aux sportifs - les plus nombreux - qui ne retirent du sport qu'un revenu très faible. Faut-il chercher du côté des fédérations ? Ne perdons pas de vue leur propre situation financière, ni le fait que la plupart d'entre elles vivent encore de l'aide de l'État. La solution est-elle, dès lors, dans la solidarité intersectorielle ? C'est le principe même de la taxe « Buffet » : j'en suis un fervent partisan, mais il faut bien voir l'hostilité qu'un tel dispositif provoque, et l'opposition virulente du puissant lobby du football.
On voudrait se raccrocher au système d'assurance dérogatoire au droit commun. Il faudrait une incitation pour que ce système soit mis en place.
L'un de vous a fait un parallèle avec les intermittents de spectacle, mais je vous rappelle qu'à la différence des sportifs de haut niveau, les artistes bénéficient d'une présomption de salariat.
Pourquoi essayer de modifier le code du travail ? Les partenaires sociaux s'y opposeraient. De plus, cela serait très complexe. Par contre, nous nous sommes penchés sur des pistes fournies par le code du travail en matière de contrats à durée déterminée spécifiques, de mission ou à objet défini...
Cette idée n'a pas été retenue car il s'agit d'un contrat hybride qui peut être rompu pour un motif réel et sérieux. Or, dans le domaine du sport, cette option n'est pas viable.
Ceux qui gagnent beaucoup d'argent ne nous intéressent pas. Ceux-là n'ont même pas besoin de statut. Ce sont les autres qu'il faut protéger.
Vous avez estimé que c'est aux fédérations et aux ligues professionnelles de trouver des solutions. Malheureusement, elles n'en ont pas les moyens.
Dans aucun pays d'Europe, il n'existe de contrats à durée indéterminée en matière de sport de haut niveau. Les fédérations internationales ne proposent également que des contrats à durée déterminée.
Le sport vit dans un environnement mondialisé. Quel que soit le sport, les résultats ne sont jamais linéaires. Si on est en CDI, en cas de mauvais résultats, on pourra être licencié pour insuffisance professionnelle ; une insuffisance de résultats étant considérée par la jurisprudence de la Cour de cassation comme une insuffisance professionnelle. C'est la même chose pour les entraîneurs. Le CDI n'est pas possible dans le domaine du sport, le sport doit être considéré comme spécifique dans son organisation comme dans sa pratique.
J'espère pouvoir compter sur votre appui.