Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, grâce à la mobilisation du Gouvernement, des parlementaires et des élus locaux, les collectivités territoriales disposent depuis le début de l’année 2015 d’un instrument de financement solidaire de leurs investissements : l’Agence France locale.
La gestation de cette agence a été très longue. Il nous a fallu franchir de nombreuses étapes : l’adoption de la loi de séparation et de régulation des activités bancaires, l’adoption de l’acte constitutif de l’Agence et de son pacte d’actionnaires, l’installation dans les locaux lyonnais, que j’ai eu l’honneur de visiter, l’avis de la Commission européenne relatif à la conformité du dispositif par rapport au droit des aides d’État et l’autorisation de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution.
Aujourd’hui, cette agence est pleinement opérationnelle. Elle procédera d’ailleurs dans les tout prochains jours à sa première émission groupée.
Cette nouvelle structure, il nous faut en mesurer la portée. Car, dans un modèle comme le nôtre, au sein duquel les finances publiques restent largement centralisées, la création d’une telle agence de financement constitue un approfondissement important pour le mouvement de décentralisation. Elle témoigne de la confiance qu’a le Gouvernement dans les collectivités locales. Elle témoigne également de la capacité d’initiative du monde local, de son aptitude à construire de manière coordonnée des projets innovants, professionnels et solidaires au service de l’action publique.
Cette agence, créée et pilotée par les collectivités, leur permet, quelle que soit leur taille, d’accéder de manière simple et mutualisée au marché obligataire. Ainsi, les collectivités bénéficient à la fois de taux attractifs et de bonnes garanties de sécurité, ce qui est de nature à favoriser l’investissement public local dans des projets utiles à l’ensemble de nos concitoyens.
L’Agence apporte par ailleurs une réponse adaptée aux défaillances du marché du financement des collectivités territoriales. La crise du crédit intervenue en 2012 ne nous a que trop montré les effets engendrés par de telles défaillances. L’Agence France locale apportera une garantie structurelle aux collectivités territoriales qui choisiront d’en être membres. N’oublions pas que la situation des taux d’intérêt et de la disponibilité du crédit que nous connaissons aujourd’hui est conjoncturelle !
Par la proposition de loi dont nous allons débattre cet après-midi, vous souhaitez sécuriser les conditions de participation des élus représentant leur collectivité territoriale dans les instances dirigeantes de l’Agence France locale. C’est un objectif auquel le Gouvernement souscrit également. En effet, il semble évident que l’une des conditions de réussite de la nouvelle Agence France locale réside dans une participation effective des élus locaux au sein de ses instances dirigeantes, que ce soit le conseil d’administration de la société territoriale ou le conseil de surveillance de la société financière. La création du statut protecteur particulier que vous proposez semble ainsi à même de garantir l’exercice efficace par les élus locaux de leur mandat social, au nom de la collectivité territoriale ou du groupement qu’ils représentent.
Le Gouvernement ne voit pas de raison de s’opposer aux dispositions dérogatoires introduites par cette proposition de loi, qui s’inspirent de celles aujourd’hui applicables aux élus mandataires siégeant au sein d’une société publique locale. Il a donc décidé de vous soutenir.
Par ces dispositions, les élus siégeant au sein d’une instance de l’Agence ne peuvent être considérés comme intéressés à l’affaire lors de l’adoption, par leur collectivité, d’une délibération portant sur les relations de cette même collectivité avec l’une des deux instances dirigeantes. Cela signifie également qu’ils sont protégés du risque de se voir qualifiés d’« entrepreneur de service local », sujet qui nous avait intéressés au plus haut point lors du premier débat organisé par l’Association des maires de France sur l’Agence.
Le Gouvernement est également satisfait de la suppression de l’alinéa 4 par votre commission des lois : cette disposition sur l’exonération des élus locaux de leur responsabilité civile au titre de leur fonction était effectivement contraire à une disposition de la directive européenne Résolution, dont la transposition devrait intervenir très prochainement.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous le voyez, le Gouvernement souscrit aux objectifs qui sont les vôtres. Avec l’Agence France locale, nous allons garantir un accès stable, durable et important à des financements de qualité pour l’ensemble de nos collectivités. Nous allons faciliter l’investissement local et le développement de services publics pour nos concitoyens. Je me réjouis donc de voir que les élus nationaux et locaux sont fortement mobilisés et impliqués dans ce dossier.
Je me permets d’ajouter un mot sur un sujet ne figurant pas à l’ordre du jour de cette discussion, mais sur lequel un certain nombre de sénateurs – sans parler des élus locaux – nous ont déjà interrogés. Si je souhaite en parler à la tribune, c’est que nous allons prochainement avoir l’occasion d’y réfléchir collectivement. Il s’agit des incompatibilités entre mandat exécutif et présidence d’une organisation locale, notamment lorsque l’élu est président de droit. C’est dans ce cas que des problèmes existent. Il nous faut regarder précisément quelles conséquences cette situation entraîne.
Peut-être pourrions-nous profiter de la commission mixte paritaire relative à la proposition de loi Sueur-Gourault pour réfléchir aux conditions d’exercice du mandat local. Il me semble que ce sujet pourrait être réglé facilement, ce qui éviterait bien des inquiétudes à nos élus locaux.
Quoi qu’il en soit, je tiens à vous remercier de cette proposition de loi, à même d’aplanir les dernières difficultés et de permettre à l’Agence de travailler sereinement.