Intervention de Victorin Lurel

Commission mixte paritaire — Réunion du 11 mars 2015 à 16h30
Commission mixte paritaire sur le projet de loi portant transformation de l'université des antilles et de la guyane en université des antilles ratifiant diverses ordonnances relatives à l'enseignement supérieur et à la recherche et portant diverses dispositions relatives à l'enseignement supérieur

Victorin Lurel, député :

Nous voulons tous parvenir à un compromis et le texte voté par l'Assemblée nationale est satisfaisant : il reprend presque tous les amendements du Sénat, à la seule exception de la gouvernance de l'université, c'est-à-dire du dispositif du ticket.

La ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, Mme Vallaud-Belkacem, a rappelé qu'à l'origine, la Guadeloupe et la Martinique réclamaient chacune leur propre université. L'autonomie des pôles a été accordée, sans aller jusqu'à l'indépendance. Cet accord politique a été formalisé par l'ordonnance de 2014 mais l'esprit de l'autonomie a été largement entamé par le Sénat. Aujourd'hui même, un préavis de grève sur le campus de la Guadeloupe a été déposé par les étudiants tandis que les enseignants contestent toujours le calcul des surfaces. En tant que président de région, je dois témoigner des imprécisions qui demeurent et du caractère farfelu des chiffres qui circulent.

Quand la région distribue les dotations matérielles aux lycées, elle tient compte du nombre d'élèves, des surfaces et du parc d'équipement. Nous demandions la même chose pour l'université, ce qui n'a jamais été le cas en trente ans. À la demande de l'État, la région de Guadeloupe a construit un site universitaire - 10 000 mètres carrés de bâti - qui lui a coûté 51 millions d'euros. Or si la subvention demandée par l'université pour charge de service public est calculée sur le fondement de 91 000 mètres carrés, comprenant les surfaces de la Martinique et de la Guadeloupe, la répartition des crédits versés par l'État se fait ensuite sur la seule base de 81 000 mètres carrés. Les 10 000 mètres qui ne sont pas pris en compte ont pourtant été construits sur des terrains de l'État, et je relève que le Premier ministre, M. Jean-Marc Ayrault, lors de l'inauguration, s'était même exclamé que c'était le plus beau campus de France. L'instruction comptable M9 du 23 janvier 2006 rappelle que tout bâtiment, quelle qu'en soit l'origine, qu'il appartienne à l'université ou soit mis à sa disposition, doit être inscrit à l'actif du bilan de l'établissement public. Ce qui n'est pas le cas ici.

Toutefois, nous avons fait notre deuil de l'amendement relatif à ces clés de répartition des moyens entre les deux pôles universitaires, rejeté à l'Assemblée nationale. En revanche, un accord politique entre la Martinique et la Guadeloupe a été conclu concernant la gouvernance, sur un fondement que Mme Vallaud-Belkacem a mentionné : nous souhaitons une élection libre dans les pôles, comme cela s'est toujours fait. Ont aussi signé cet accord M. Serge Letchimy, député et président du conseil régional de Martinique, Mme Josette Manin, présidente du conseil général de Martinique, M. Jacques Gillot, sénateur, recueillant l'accord des étudiants, du corps enseignant et des syndicats. Or le texte du Sénat a remis en cause cet équilibre consensuel trouvé dans l'ordonnance.

Est-ce à dire que notre université ne serait pas capable de tenir des élections libres ? Ferions-nous mauvais usage de la liberté ? Cela rappelle de bien mauvais souvenirs... Le départ de la Guyane n'est pas dû à l'élection libre des vice-présidents dans les pôles. Si la Guyane a claqué la porte, c'est qu'elle demandait en vain un budget plus important, sur la base des critères existants - mais jamais appliqués - et que les seuls professeurs du pôle guyanais étaient des professeurs de lycée. Ce n'est nullement le mode d'élection des instances gouvernantes qui posait problème aux Guyanais ! Du reste, aujourd'hui, tout le monde est d'accord avec notre solution, sauf deux ou trois personnes certes très virulentes... Si l'on enferme la désignation dans ce ticket, je crains que la situation ne devienne explosive sur le terrain.

Le Sénat et la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale ont fait un travail de qualité mais ils ignoraient ce qui avait été conclu en amont. Je crois cependant aux vertus de la liberté. Et je rappelle que le président de l'université disposera de l'essentiel des pouvoirs comme dans le droit commun des universités. Les vice-présidents de pôles feront des propositions mais ils ne décideront pas en dernière instance.

J'ai entendu parler d'une nouvelle proposition, pour coopter les vice-présidents sur une liste de trois personnes préalablement établie par les pôles. Ce n'est conforme ni aux accords passés, ni à l'esprit de l'autonomie. En votant le texte de l'Assemblée nationale, nous sortirons par le haut de cette situation et nous pacifierons l'ambiance...

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