Intervention de Bruno Bézard

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 11 mars 2015 : 3ème réunion
Audition de M. Bruno Bézard directeur général du trésor

Bruno Bézard, directeur général du Trésor :

Le comité de pilotage du fonds définira, comme tout comité de fonds d'investissement professionnel, les thèmes prioritaires.

J'en viens à l'adoption par le Conseil Ecofin de la recommandation de la Commission européenne - qui ne fait en effet qu'une proposition aux ministres de l'économie des États membres - relative à notre retour sous la barre des 3 % de déficit public. Les deux instances ont estimé que les conditions fixées par le traité étaient réunies. Nous avons prouvé que, même si nous n'avions pas respecté l'objectif de déficit nominal, en raison notamment de la faiblesse de la croissance et de l'inflation, notre politique budgétaire respectait les critères de sérieux qui rendent possible l'application des clauses de flexibilité du traité. En cas de choc économique imprévu ou de circonstances défavorables, le traité autorise en effet la Commission à proposer une nouvelle trajectoire de retour sous les 3 %, sous réserve toujours que l'État concerné ait pris des mesures effectives pour réduire ce déficit. La Commission et le Conseil ont également tenu compte des réformes structurelles entreprises ou annoncées, qu'ils ont jugées suffisamment ambitieuses : allégements de charges pour les entreprises, projet de loi Macron, programme national de réforme. La France n'a donc pas obtenu de dérogation, ni bénéficié d'une lecture favorable ou d'une interprétation complaisante du traité : le pacte de stabilité a été appliqué à la lettre !

La recommandation de la Commission européenne a été adoptée hier à l'unanimité du Conseil ECOFIN. Nous avons donc deux ans pour repasser sous les 3 % de déficit public. Des rendez-vous sont prévus en avril et en mai-juin pour détailler les réformes qui permettront d'y parvenir, et un quantum d'économies structurelles devra être respecté annuellement. Toutes ces mesures de sérieux ont convaincu nos partenaires.

J'en viens au cas de la Grèce, qui occupe beaucoup l'Eurogroupe, car il y a urgence : les banques grecques, qui ont été recapitalisées, subissent en revanche une fuite de liquidités, les épargnants retirant leurs dépôts ; l'État grec, de son côté, peine à se financer, car les banques du pays n'achètent plus d'obligations souveraines... Or le nouveau gouvernement a été élu sur la promesse de s'opposer à la discipline européenne, à la troïka et aux mesures d'assainissement qu'elle propose. Un accord était-il possible pour prolonger le programme d'assistance tout en lui apportant des assouplissements, afin de donner satisfaction à Athènes ?

Je suis convaincu qu'une convergence est possible : par exemple si le gouvernement grec s'engage à lutter contre la fraude fiscale, qui s'apparente parfois à une exemption fiscale généralisée, ce que l'Europe réclame depuis longtemps, et s'il s'attaque à la corruption et aux rentes générées par un marché des biens et services très protégé. De même, si le gouvernement Tsipras adopte une doctrine souple au sujet des privatisations, en n'acceptant de céder des actifs publics qu'à leur juste prix et sous réserve qu'ils ne présentent pas un intérêt stratégique pour le pays, cela me choquerait d'autant moins que c'est la position constante de la France... Pour l'heure, l'Eurogroupe et le gouvernement grec se jaugent mutuellement. Ce dernier a commis quelques maladresses de communication, en disant ne pas vouloir rembourser certains de ses créanciers...

Dans ce débat, la France constitue un trait d'union. Michel Sapin a incité ses collègues de l'Eurogroupe à trouver un accord qui garantisse le respect par la Grèce de ses engagements, tout en apportant plus de flexibilité au programme d'assistance, afin de ne pas donner le sentiment de faire fi du résultat des élections. Les membres de l'Eurogroupe se sont finalement entendus le 20 février sur une déclaration, dont les termes devront être respectés. À présent, il convient que des négociations s'ouvrent rapidement entre la Grèce et les « institutions » - terme préféré à celui de « troïka » - c'est-à-dire avec la Banque centrale européenne (BCE), la Commission européenne et le Fonds monétaire international (FMI), en vue de trouver un accord. Car, pendant ce temps, les banques grecques se vident de leur substance et l'État grec a de plus en plus de mal à lever ses emprunts...

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