En ce qui concerne la possibilité d'accès direct des collectivités territoriales, je confirme qu'il n'y aura pas de médiation par les États pour la présentation de projets : tout promoteur peut soumettre son projet à la BEI, qui l'étudiera et, le cas échéant, le soumettra au comité d'experts responsable du choix final.
L'indépendance des experts est une question importante. Il est envisagé à l'heure actuelle - mais tout ceci est encore fluctuant - que le comité d'investissement comporte huit personnes, dont l'indépendance sera assurée par une procédure de sélection ouverte, à travers un appel à candidatures. La sélection sera faite vraisemblablement par la Commission européenne, et les conditions de leur nomination viseront à leur donner des garanties statutaires de complète indépendance. Ces experts ne pourront en aucun cas prendre d'instruction auprès d'acteurs publics ou privés, sous peine de leur renvoi.
Un point très important, pour tous les acteurs du « plan Juncker », est de s'assurer que ces huit personnes réunissent bien l'expertise nécessaire, c'est-à-dire une connaissance suffisante des différents secteurs, mais aussi des différents marchés géographiques : on n'investit pas en Estonie comme on investit à Chypre.
Le montant minimum du ticket est un des points en discussion par le co-législateur. Le Conseil n'a pas introduit d'éléments particuliers à ce sujet. Le projet de rapport issu du Parlement européen fait référence de façon très claire à la micro finance. Plusieurs éléments convergents laissent à penser que le Parlement européen ne souhaite pas instaurer un engagement financier minimum permettant l'accès à la BEI. Celle-ci a mené quelques expériences en matière de micro finance - pas beaucoup. En général, les tout petits projets sont plutôt traités par le fonds européen d'investissement, dont les activités sont intermédiées : ce sont les banques publiques qui distribuent les fonds mis à disposition. Pour le volet infrastructure et innovation, on ne souhaite pas, pour le moment, avoir de trop petits projets, car ils induiraient pour le comité d'investissement - qui devra les analyser - une charge de travail disproportionnée par rapport aux enjeux financiers. Il s'agira donc d'agréger ces projets de faible ampleur sur une plate-forme d'investissement, qui puisse être examinée en une seule fois.
Vous avez indiqué que la BEI finance déjà des projets économiquement intéressants. Cependant, le « plan Juncker » vise à assurer l'additionnalité des fonds levés : en d'autres termes, il s'agit de ne financer par ce biais que des projets qui ne pourraient l'être dans les conditions normales de fonctionnement de la BEI. On veut permettre, par la garantie européenne, que des projets soient menés qui n'auraient pas pu voir le jour sans elle. Cela suppose un examen projet par projet. Ce sera le rôle du comité d'investissement de s'assurer que ce critère est bien rempli - dans le cas contraire, il n'aurait été question que de transférer l'activité de la BEI vers des fonds sous garantie publique, ce qui présente, du point de vue du contribuable européen, un intérêt limité.
Concernant la répartition géographique des investissements, les États ont accepté qu'il n'y en ait aucune. Seul demeure un principe de bon sens, visant à éviter qu'un seul secteur ou qu'une seule zone géographique ne concentre une proportion excessive d'investissements. Pour donner un exemple, volontairement caricatural, il ne satisferait personne que l'Allemagne bénéficie de 90 % du plan...