Nous nous en réjouissons, et espérons que nous poursuivrons dans cette voie. Nous parvenons, ainsi, à l’établissement d’un équilibre entre ces deux grands pays que sont l’Allemagne et la France.
Autre motif de satisfaction, les banques contribueront au Fonds, en appliquant la méthode de calcul valable pour l’Union bancaire et celle qui est valable pour l’Union européenne, selon le mécanisme en ciseaux déjà évoqué, la partie nationale diminuant progressivement au profit de la partie mutualisée. Ce mécanisme permet d’éviter que, dans certains pays, notamment le nôtre, les secteurs bancaires ne paient des contributions anormalement élevées. C’est donc un processus sage.
Le rapporteur général a parlé du financement intragroupe : il évitera aux banques mutualistes françaises de payer deux fois.
Quant à la comptabilisation des dérivés selon un traitement prudentiel, cette mesure va également dans le bon sens.
Par ailleurs, et cela a été dit à deux reprises, il faut se réjouir que les États membres, en dépit des réticences allemandes, aient accepté l’idée que le Conseil de résolution unique octroie aux banques la possibilité de fournir des engagements de paiement au lieu d’argent frais, ou « cash ».
Si chaque pays peut négocier son propre pourcentage, nous souhaitons vivement que le pourcentage d’engagements hors bilan pour les banques françaises soit le plus proche possible des 30 %. Nous souhaitons que le gouvernement français demande aux autorités communautaires la fixation d’un tel pourcentage. Monsieur le secrétaire d'État, vous nous apporterez certainement des précisions sur ce sujet.
Nous le savons, l’Allemagne a obtenu que les petites banques puissent bénéficier d’un traitement préférentiel pendant la montée en puissance du FRU. Certes, quand il est question de l’Allemagne, la notion de « petites banques » est assez relative ! Certaines Sparkassern réalisent des bilans de plusieurs centaines de milliards d’euros. Concrètement, les établissements dont le total des actifs est inférieur à 3 milliards d’euros s’acquitteront d’une contribution forfaitaire de 50 000 euros pour la première tranche de leur bilan. Il faudra veiller à ce que cette exception n’alimente pas la fragmentation financière au sein de l’Union économique et monétaire.
Hormis ce dernier point, je note que les ajustements qui ont été apportés aux règles de calcul des contributions au FRU satisfont en grande partie les demandes de la France. Ils s’ajoutent aux avancées que le Gouvernement et le Parlement européen avaient obtenues lors de la préparation du règlement créant le MRU ; il s’agit là de la partie institutionnelle, notamment avec la création du Conseil de résolution unique. Je pense en particulier à l’accélération du rythme de mutualisation des compartiments nationaux du FRU.
Pour mémoire, la proposition initiale prévoyait une mutualisation totale à l’issue d’une période de dix ans, l’Allemagne refusant de payer pour les erreurs commises par les banques des autres États membres ; pour elle, le plus tard aurait été le mieux. Le Sénat a proposé de réduire ce délai de moitié, en le ramenant à cinq ans, ce qui revient à accélérer la mise en place du compartiment mutuel. En effet, c’est une démarche plus européenne : l’accord intergouvernemental disparaît lorsque l’ensemble des compartiments sont mutualisés.
À l’issue des négociations, la période de mutualisation a été fixée à huit ans. C’est un bon compromis, qui permet une bonne fédéralisation du MRU.
Je me réjouis que la solution retenue pour le calcul des contributions au FRU permette d’aligner la part des contributions de l’Allemagne et de la France sur leur poids respectif dans les actifs bancaires de la zone euro. Le montant des contributions françaises s’élèvera à 14, 9 milliards d’euros, soit 27 %, contre 15, 2 milliards d’euros pour les contributions allemandes, à savoir 28 %. Je soupçonne d’ailleurs les négociateurs d’être partis du résultat final et d’avoir procédé à rebours pour aboutir à une méthode donnant satisfaction. Après tout, c’est un bon procédé, puisque tout le monde s’y retrouve.
Monsieur le secrétaire d’État, il reste une question non négligeable : comment et selon quels critères les 14, 9 milliards d'euros seront-ils répartis entre les banques françaises, puisqu’il s’agit d’un montant global ?
Toutes les conditions sont donc désormais réunies pour permettre la ratification de l’accord.
Je formulerai néanmoins trois remarques.
Tout d’abord, on peut regretter que certains aspects du FRU aient été fixés en partie dans un cadre intergouvernemental. À l’instar du Parlement européen, je proposerai que le contenu de l’accord soit réintégré dans le droit de l’Union européenne dans les plus brefs délais, c’est-à-dire avant même le délai butoir de dix ans prévu à l’article 16 de l’accord intergouvernemental. Ce serait l’occasion de procéder à une révision globale des traités et d’obtenir l’accord de l’Allemagne qui souhaite une révision des traités, en particulier pour la BCE et pour la création de l’Autorité de surveillance des banques.
Ensuite, chacun sait que le filet de sécurité dont le montant s’élève à 55 milliards d’euros ne suffira pas en cas de crise bancaire. Si la crise est grave, aucun fonds ne permettra d’y faire face et, même si elle est moyenne, il faudra davantage de moyens. C’est un sujet important, car il s’agit de garantir la crédibilité du MRU.
L’article 5 de l’accord intergouvernemental prévoit la possibilité pour le CRU de contracter des emprunts pour le FRU, si le Fonds est insuffisant. Cependant, tout cela est encore assez flou, l’Allemagne étant réticente à s’engager, elle qui pense toujours qu’elle devra payer pour les frasques des pays latins qui, au bord de la Méditerranée, jouent de la mandoline le soir. À mon sens, le Mécanisme européen de stabilité, le MES, devrait pouvoir jouer ce rôle : il a d’ailleurs été créé voilà quelques années pour la gestion des crises financières. Par l’intermédiaire de ce mécanisme, 700 milliards d’euros sont mobilisables, ce qui permet de faire face à une crise. Il faut donc essayer de convaincre l’Allemagne de s’engager dans cette voie. Lorsque le MES a été créé, l’Allemagne, forte des craintes que je viens d’évoquer, avait aussi posé un grand nombre de conditions pour qu’il soit quasiment impossible de l’utiliser.
Enfin, j’en viens à la mise en œuvre de la procédure de renflouement interne prévue par la directive dite « BRR ». Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite appeler votre attention sur le fait que cette procédure, qui n’a pour l’instant pas été mise en œuvre, le sera peut-être à l’occasion d’une crise bancaire qui se déroule en Autriche, dans le Land de Carinthie, dont Jörg Haider a été le responsable et qui touche une banque se trouvant dans une situation assez difficile. J’ai cru comprendre que le gouvernement fédéral autrichien, avec beaucoup de bon sens, avait affirmé ne pas être près de combler le trou, qui est actuellement compris entre 3 milliards d’euros et 6 milliards d’euros. Par conséquent, nous aurons peut-être l’occasion d’assister à un intéressant exercice pratique...
Les résultats des tests bancaires des établissements français nous rassurent, mais la situation peut évoluer. C’est pourquoi je soutiens la demande du rapporteur de faire en sorte que la France bénéficie de la dérogation prévue par la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts permettant de limiter à 0, 5 %, contre 0, 8 %, des dépôts couverts le niveau cible du fonds de garantie des dépôts et de résolution. C’est aussi une demande que les banques ont dû formuler auprès de vous, monsieur le secrétaire d'État.
Chose assez rare pour être soulignée, la commission des finances a introduit dans le projet de loi un article additionnel obligeant le Gouvernement à informer annuellement le Parlement de la mise en œuvre du MRU, du FRU et de la directive relative aux systèmes de garantie des dépôts, ce qui nous permettra de suivre la mise en place, les pourcentages et les sommes versées.
Plus tard, il nous faudra parachever l’Union bancaire. Nous devons finaliser la transposition de la directive BRR. La semaine dernière, la Commission européenne a déploré que seuls quatre États membres – l’Allemagne, l’Autriche, la Slovaquie et le Royaume-Uni – lui aient notifié leurs mesures de transposition de cette directive. La France est donc en retard. Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer l’état d’avancement de l’élaboration des ordonnances relatives à la résolution bancaire ?
Se pose également la question, un peu plus lointaine, du système de garantie des dépôts. Je sais que le Gouvernement soutient cette position, contrairement au gouvernement allemand qui ne veut pas de la création d’un fonds de garantie des dépôts bancaires mutualisés. Toutefois, il faudrait en toute logique achever le système bancaire européen, qui – il faut le dire en cette période où l’Europe sert souvent de drapeau rouge pour l’opinion publique – est une grande conquête pour l’Europe. C’est pourquoi nous devons avancer sur ce point.
Je conclurai en évoquant la question de la fiscalité, même si elle n’a pas de lien direct avec le texte que nous examinons. Voilà quelques mois, trois membres du Conseil d’analyse économique ont publié une note intéressante dans laquelle ils affirment que « l’Union bancaire ne sera pas complète sans une harmonisation des régimes fiscaux des banques ». Je partage totalement ce point de vue. Il faut parvenir à une unification des taxes et contributions spécifiques à l’activité bancaire, hors impôt sur les sociétés ; celles-ci devraient être « fusionnées en une unique taxe sur l’activité financière et transférées au niveau de l’Union bancaire ». Nous aurions là achevé le marché unique et commun bancaire.
Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, telles sont les principales observations que je souhaitais formuler. Vous l’aurez compris, le groupe socialiste soutiendra et votera bien évidemment le projet de loi autorisant la ratification de l’accord intergouvernemental, dans le texte de la commission.