Certes, l’absence de données statistiques ne permet pas d’apprécier le caractère durable ou non de cette diminution ni d’affirmer si cette baisse est un mouvement ancien qui se serait accéléré au cours des dernières années.
Malgré ces réserves d’ordre statistique, il apparaît indispensable de renforcer l’attractivité du volontariat au regard de la croissance annuelle des interventions. En effet, depuis 2004, le volume des interventions est chaque année en hausse régulière d’environ 3 % ou 4 %.
Plusieurs facteurs expliqueraient cette crise des vocations : la montée de l’individualisme au regard du primat collectif et la crise des valeurs de dons et de volontariat ; la difficulté de concilier une vie familiale avec les obligations inhérentes à l’engagement ; les réticences des employeurs, tant publics que privés, dans un contexte économique contraint, à accepter l’absence de leurs salariés sapeurs-pompiers volontaires pendant les heures de travail et les difficultés pour assurer les remplacements ; les difficultés de recrutement dans les zones rurales – selon les données de la direction de la sécurité civile, la protection de 93 % des communes de moins de 5 000 habitants repose sur les sapeurs-pompiers volontaires, ces derniers représentant, dans ces territoires, 80 % des effectifs de sapeurs-pompiers globaux ; la départementalisation des services d’incendie et de secours, qui a entraîné la fermeture de nombreux centres de secours de petite taille, lesquels faisaient fonction en quelque sorte de bureaux de recrutement pour les jeunes ; enfin, l’augmentation des poursuites civiles ou pénales à l’encontre des sapeurs-pompiers volontaires et leur condamnation dans le cadre de leurs missions d’assistance.
Face à ces difficultés, la commission « Ambition volontariat » avait conclu à la nécessité d’agir selon trois axes : améliorer le management des sapeurs-pompiers volontaires ; assouplir les modalités de leur formation, actuellement jugée lourde et contraignante ; développer la reconnaissance des sapeurs-pompiers volontaires.
La proposition de loi aujourd’hui soumise à l’examen du Sénat vise à consolider le statut des sapeurs-pompiers volontaires.
Je rappelle que notre collègue Roland Courteau a déposé en mars dernier une proposition de loi visant le même objectif.
Ce texte apporte quelques améliorations majeures. Il prévoit tout d’abord la consécration juridique du volontariat.
Les articles 1er et 3 bis tendent à fixer le cadre juridique de « l’engagement citoyen en qualité de sapeur-pompier volontaire ».
Le premier article définit juridiquement l’activité du sapeur-pompier volontaire par ses deux fondements : le volontariat et le bénévolat. Ce faisant, il entend exclure cette activité de l’application des dispositions régissant l’aménagement du temps de travail.
L’article 1er délimite aussi le périmètre d’intervention des volontaires en reprenant les dispositions analogues de la loi du 3 mai 1996 : la participation aux missions de sécurité civile de toutes natures confiées, sur l’ensemble du territoire, aux services d’incendie et de secours.
L’article 3 bis fixe un ensemble de règles qui découlent de l’engagement citoyen, règles assorties de garanties : un engagement librement décidé ; un champ d’intervention identique à celui des sapeurs-pompiers professionnels, en fonction de la disponibilité des sapeurs-pompiers volontaires ; une reconnaissance de la Nation par l’attribution de récompenses et de distinctions ; des conditions d’accès ; un régime juridique exclusif de l’application du droit du travail et du statut de la fonction publique, sauf pour ce qui est du bénéfice des dispositions protectrices concernant les accidents du travail et les maladies professionnelles, du dispositif de participation des employeurs au financement de la formation professionnelle continue et des organismes y concourant, ainsi que des règles d’hygiène et de sécurité applicables aux sapeurs-pompiers professionnels ; le caractère non lucratif de l’engagement volontaire, celui-ci ouvrant néanmoins droit à certaines contreparties, sous la forme d’indemnités horaires ainsi que de prestations sociales et de fin de service ; enfin, une protection sociale.
L’engagement sera officialisé par la signature, lors du premier engagement, d’une charte nationale du volontariat. C’est une grande première !
La proposition de loi reconnaît ensuite aux sapeurs-pompiers volontaires de nouvelles garanties.
Il s’agit d’abord de garanties pénales contre les poursuites éventuelles pour délit non intentionnel. L’article 4 prend en considération le contexte d’urgence dans lequel les sapeurs-pompiers agissent et accomplissent leurs missions.
Il s’agit ensuite de garanties sociales. L’article 13 ter offre aux SDIS la faculté de revaloriser l’allocation de vétérance des sapeurs-pompiers volontaires ayant définitivement cessé leur activité entre le 1er janvier 1998 et le 31 décembre 2003 pour la porter au niveau de l’allocation de fidélité qui a été mise en place pour ceux qui ont cessé leur activité entre le 1er janvier et le 31 décembre 2004. Cette allocation fut instituée à titre transitoire avant la création de la prestation de fidélisation et de reconnaissance, la PFR.
Je rappelle que celle-ci est gérée par une association nationale à laquelle chaque SDIS est obligatoirement tenu d’adhérer. Cette association a souscrit un contrat collectif d’assurance qui repose sur un règlement de régime précisant les modalités de constitution et de liquidation des droits à pension qui sont constitués dans le cadre de la PFR. L’article 28 donne une base législative au règlement de ce régime.
L’article 13 quater ouvre la possibilité à ceux qui relèvent d’un SDIS d’apporter leur concours aux services de l’État assumant à titre principal des missions de sécurité civile.
Il s’agit en outre de garanties financières. Pour tenir compte des contraintes professionnelles rencontrées par les sapeurs-pompiers volontaire face à leurs employeurs publics, l’article 22 bis prévoit la faculté, pour le conseil d’administration d’un SDIS, de moduler la part contributive des communes ou des EPCI : elle le serait en fonction de la part des sapeurs-pompiers volontaires dans leurs effectifs, la disponibilité qui leur est accordée pendant leur temps de travail et les mesures sociales mises en place en faveur du volontariat. Ce même article prend en compte la situation particulière des communes et des EPCI de moins de 5 000 habitants.
Enfin, au titre des garanties diverses, le statut des conjoints et des enfants des sapeurs-pompiers volontaires est renforcé.
L’article 13 bis étend le bénéfice des droits à une rente de réversion et au capital-décès d’un sapeur-pompier volontaire décédé en service aux partenaires liés par un pacte civil de solidarité et aux concubins dont la situation de concubinage est suffisamment établie antérieurement à l’accident. Ce droit était, auparavant, réservé au seul conjoint uni au sapeur-pompier volontaire par le mariage.
L’article 28 ter prévoit la coordination des diverses dispositions avec le droit particulier applicable à Mayotte.
Par ailleurs, la proposition de loi assouplit et simplifie le régime en vigueur de la formation initiale et continue des sapeurs-pompiers volontaires.
Les articles 5 et 6 tendent à supprimer la durée minimale des actions de formation, qui est aujourd’hui de trente jours répartis sur les trois premières années, et de cinq jours annuels de perfectionnement au-delà. Y est substitué un droit à des actions de formation, à la fois adaptées aux missions confiées aux sapeurs-pompiers volontaires et tenant compte des compétences qu’ils ont déjà acquises.
Ce nouveau régime répond aux critiques fréquemment émises à l’encontre du lourd dispositif en vigueur.
L’article 7 s’inscrit dans le même esprit. Il prévoit la prise en compte des formations suivies dans le cadre de l’engagement volontaire, au titre de la formation professionnelle continue, des obligations de formation des fonctionnaires et des obligations de développement professionnel continu des professionnels de santé.
L’article 9 constitue une autre « compensation » des servitudes du volontariat. Il prévoit en effet un recul de la limite d’âge fixée pour les concours d’accès à la fonction publique, recul dont la durée serait, le cas échéant, égale à celle de leur engagement. Ce dispositif est en fait, depuis l’ordonnance du 2 août 2005, limité aux corps de la catégorie active qui ont maintenu une limite d’âge : sapeurs-pompiers professionnels, gardiens de la paix, surveillants de prison...
L’article 10 vise à compléter le dispositif de validation des acquis de l’expérience, VAE, qui permet aujourd’hui au sapeur-pompier volontaire d’être dispensé de certains examens et de la formation continue ; cet article l’autorise à bénéficier d’équivalences pour se présenter aux concours d’accès à la fonction publique, en complétant opportunément la VAE interne.
L’article 25 a pour objet de créer une commission nationale chargée de la mise en œuvre de la reconnaissance, de la validation et des équivalences de la formation suivie par les sapeurs-pompiers volontaires avec les titres et diplômes du répertoire national des certifications professionnelles.
L’article 22 ter vise à encourager l’engagement des jeunes vers la formation de jeune sapeur-pompier ou de sapeur-pompier volontaire.
Enfin, la proposition de loi tend à améliorer la représentation des sapeurs-pompiers volontaires.
Ainsi, l’article 24 prévoit la présence du président de l’union départementale des sapeurs-pompiers au conseil d’administration du SDIS afin d’assurer une représentation équilibrée des sapeurs-pompiers professionnels et des sapeurs-pompiers volontaires. L’article 28 bis étend cette disposition à Mayotte.
Quant à l’article 25 ter, il vise à créer un Conseil national des sapeurs-pompiers volontaires, qui remplacerait l’Observatoire national du volontariat dans le corps de sapeurs-pompiers, tombé, il faut l’avouer, en désuétude ; il serait chargé d’observer et d’analyser l’évolution de la situation du volontariat et de faire des propositions en conséquence.
À titre personnel, je pense qu’une composition calquée sur celle de la commission « Ambition volontariat » pourrait être le gage, pour ce Conseil national, à la fois d’une prompte mise en ordre de marche et d’une véritable efficacité.
Ce texte, mes chers collègues, est pertinent et cohérent. Il présente des avancées légitimes au regard de la disponibilité dont font preuve les sapeurs-pompiers volontaires au service de la collectivité, et la commission des lois vous demande de l’adopter tel qu’elle l’a approuvé.