Intervention de Philippe Durance

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 10 février 2015 : 1ère réunion
Audition de philippe durance professeur au conservatoire national des arts et métiers cnam titulaire de la chaire de prospective et développement durable président de l'institut des futurs souhaitables

Philippe Durance, titulaire de la chaire de prospective et développement durable, président de l'Institut des futurs souhaitables :

La prospective, telle que je l'ai présentée, est un concept en effet forcément abstrait. Elle prend cependant des formes très concrètes et je prendrai un exemple précis, particulièrement parlant, me semble-t-il, celui d'une région, qui plus est ultrapériphérique, à savoir la Martinique. En 2005, elle s'est saisie, sous l'égide d'Alfred Marie-Jeanne, qui présidait la région à l'époque, de la possibilité d'élaborer un schéma régional de développement économique pour lancer une démarche prospective largement participative, dont nous avons fourni le cadre méthodologique. Elle a mis en place une structure ouverte au plus grand nombre d'acteurs sur l'île, avec un message clair : « Venez, nous avons besoin de vous pour produire un document stratégique. Nous avons la méthode, il nous manque les personnes. » À peu près trois cents personnes ont été ainsi embarquées dans l'aventure, ce qui est énorme à l'échelle d'un tel territoire. Il a fallu, en amont, définir toute une organisation, une ingénierie. Résultat : les Martiniquais ont produit eux-mêmes un document stratégique, voté par le conseil général et le conseil régional réunis en congrès.

Si une telle mobilisation est possible, c'est que la méthode prospective le permet. J'en reviens au graphique que j'évoquais précédemment : pour le coup, la Martinique s'est inscrite dans une véritable conduite du changement, en couplant une visée stratégique forte et une participation très élevée. La prospective est de moins en moins le fait du prince. Telle que la pratiquait Gaston Berger, elle était très élitiste. On était entre soi, entre hauts fonctionnaires, grands chefs d'entreprise et administrateurs, on ne sortait pas de Paris. Outre Gaston Berger, Louis Armand, que j'ai cités, on trouvait le fondateur du CNPF, le directeur de cabinet de Michel Debré. Aujourd'hui, une telle configuration serait inconcevable, la prospective ne se pratique plus du tout comme cela, elle promeut au contraire l'ouverture la plus large.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion