Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il est en France une maladie singulière, dont les symptômes sont, pour ceux qui en sont atteints, une tendance à regretter notre glorieux passé et à déplorer que la France d’aujourd’hui soit, selon eux, l’ombre de celle d’hier. Pour autant, ils ne contribuent pas à construire l’avenir.
Si les commentaires sont libres, les faits, eux, sont sacrés. Aussi permettez-moi de rappeler quelques chiffres. La France est à ce jour la cinquième puissance mondiale, la sixième puissance militaire, et notre langue est parlée par des millions de personnes. Ainsi, malgré ce qu’en disent les Cassandre, la voix de la France compte toujours, en Europe et dans le monde.
Notre pays a depuis longtemps une vision universelle. Depuis 1789, la patrie des droits de l’homme a toujours prétendu défendre, en tout temps et en tous lieux, les amoureux de la liberté et de l’égalité, mais il est vrai que ce messianisme a pu parfois être confondu avec une forme de prédation économique, ce que l’on ne peut que regretter. Cependant, aujourd’hui encore, si nos amis étrangers nous appellent à l’aide lorsqu’ils sont menacés, s’ils demandent notre assistance et notre expertise, ce n’est pas par hasard.
Si certains en France doutent de notre influence à l’étranger, c’est qu’ils doutent de nous-mêmes et de nos atouts. Or ceux-ci sont incontestables : nous disposons de ressources naturelles, humaines et intellectuelles, ainsi que d’une capacité d’innovation qui ont fait et qui font toujours leurs preuves.
Il ne sert à rien de regarder les deux derniers siècles avec nostalgie. Le rêve d’une gloire passée, d’une France qui se serait perdue et qu’il faudrait retrouver, au mépris de l’évolution du monde et des rapports entre les peuples, est un mirage peut-être séduisant, mais sûrement dangereux, un mirage que certains partis exploitent avec des intentions trop contraires à nos principes républicains pour que nous les laissions faire en toute impunité.
L’histoire de la France n’est pas seulement à célébrer, elle est aussi à faire, elle est à construire au quotidien, car notre pays a bel et bien un rôle essentiel à jouer sur la scène internationale au XXIe siècle. Pour cela, notre action extérieure doit être différente de celle des dix dernières années. Tel est le sens de la politique étrangère menée par le Président de la République, François Hollande, depuis le début de son quinquennat ; tel est le sens de votre action, monsieur le ministre.
Force est de constater qu’il y a du travail à accomplir pour redorer l’image de notre pays à l’étranger, car, et ce n’est pas une critique, la France de la première décennie de ce début de siècle n’a pas été, je le pense, à la hauteur des grands enjeux du moment à l’échelon international.
Faut-il rappeler l’échec de l’Union pour la Méditerranée ? Et que dire de la gestion des crises européennes ? Loin de l’esprit de dialogue et de négociation qui prévaut en matière diplomatique, à-coups et revirements avaient alors provoqué de multiples accrochages avec nos partenaires. Que dire aussi de la gestion des printemps arabes ? Il faut avoir l’honnêteté de reconnaître que si la France n’avait pas proposé une coopération policière au président tunisien, sa diplomatie n’aurait sans doute pas connu les critiques dont elle fut alors l’objet.
Au mois de février 2011, un groupe de diplomates rassemblés sous le pseudonyme « Marly » résumait ainsi les choses dans les colonnes du journal Le Monde : « l’Europe est impuissante, l’Afrique nous échappe, la Méditerranée nous boude, la Chine nous a domptés et Washington nous ignore ! ». Il s’agit là d’une sévère analyse du bilan du quinquennat précédent.