Intervention de Joëlle Garriaud-Maylam

Réunion du 25 mars 2015 à 16h15
Débat sur l'influence de la france à l'étranger

Photo de Joëlle Garriaud-MaylamJoëlle Garriaud-Maylam :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, sans autodénigrement ni optimisme béat, comment évaluer l’influence de la France à l’étranger ? Parts de marché, densité du réseau diplomatique, nombre d’expatriés, attractivité de l’enseignement en français... les indicateurs sont multiples, et souvent imprécis.

Une chose est sûre : la diplomatie d’influence nécessite de mobiliser une grande variété d’acteurs économiques, politiques et culturels. Les contraintes budgétaires minent la capacité de la France à fonder son influence sur son seul réseau d’ambassades et de centres culturels.

Ce réseau, historiquement très dense et remarquable, est au régime sec. Il faut donc mieux mobiliser la société civile.

Des dispositifs existent de longue date, tels que le réseau des conseillers du commerce extérieur pour les chefs ou cadres d’entreprise. D’autres se développent, comme le réseau des anciens élèves des lycées français à l’étranger. Surtout, nous devons davantage œuvrer pour que les millions de francophiles et Français établis à l’étranger soient de vrais ambassadeurs de notre pays.

Le temps où la population française à l’étranger était surtout composée de diplomates et d’expatriés envoyés par de grandes entreprises est révolu. De plus en plus de jeunes, d’entrepreneurs, de salariés en contrat local, de binationaux et de seniors gonflent le vivier de notre diaspora. Ingénieurs, architectes, cuisiniers, étudiants, journalistes, chercheurs, artistes, retraités font rayonner la France à l’étranger, mais trop souvent dans un relatif isolement. De nouveaux réseaux sont donc à animer, voire à créer.

Notre diplomatie s’efforce de mieux tirer parti d’internet et des réseaux sociaux. Bravo ! Mais il faudrait aussi mieux s’appuyer sur les élus de terrain que sont les conseillers et délégués consulaires.

Les Français de l’étranger se sentent citoyens du monde, et c’est heureux. Mais il est dans notre intérêt qu’ils conservent un lien fort avec leurs racines nationales. Plusieurs mesures pourraient renforcer leurs liens civiques à notre nation : pour les jeunes, l’organisation systématique de journées « défense et citoyenneté » à l’étranger ; pour les actifs, une réserve citoyenne à l’étranger ; pour les seniors, un système de volontariat international de coopération technique et d’enseignement du français.

La francophonie constitue un autre levier essentiel. Hélas, notre contribution aux instances francophones décline.

La francophonie est pourtant un levier fondamental pour les grands défis transnationaux liés à la mondialisation comme le terrorisme, les épidémies, l’environnement ou le réchauffement climatique.

La francophonie est aussi un atout pour notre diplomatie économique. Le français est la troisième langue des affaires, après l’anglais et le chinois. L’élan peut être encore amplifié par le dynamisme démographique de l’aire francophone, ou s’essouffler, si notre langue cesse d’être vue comme une source d’opportunités et si nous n’aidons pas les pays pauvres à mieux l’enseigner.

Pour finir, je voudrais insister sur ce qui, à mon sens, constitue la clé de voûte de notre influence et de notre crédibilité à l’international : la défense de nos valeurs.

Je suis frappée par le décalage entre notre morosité hexagonale et l’image positive de la France à l’étranger.

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