Intervention de Bruno Rousselet

Délégation sénatoriale à l'Outre-mer — Réunion du 12 mars 2015 : 1ère réunion
Gestion du domaine de l'état — Audition de M. Bruno Rousselet chef du service de la gestion fiscale à la direction générale des finances publiques accompagné de M. étienne Lepage chef du bureau du cadastre

Bruno Rousselet, chef du service de la gestion fiscale à la direction générale des finances publiques :

En effet. La situation de la forêt guyanaise du point de vue cadastrale est d'ailleurs très particulière.

J'ai lu le rapport qui indiquait qu'un assujettissement à la taxe foncière de la forêt guyanaise, qui appartient au domaine privé de l'État, serait particulièrement adapté aux réalités de la fiscalité locale. Voici comment nous déclinons cette proposition à droit constant. Supposons que la forêt guyanaise soit cadastrée et qu'elle fasse l'objet d'une évaluation cadastrale. La forêt non exploitée ne produisant aucun revenu, elle bénéficie d'une exonération permanente, dont bénéficient aussi, en vertu du droit commun, toutes les parcelles du même type en France. Dès lors, le produit de l'impôt serait nul. Le travail de titan que demanderaient le cadastrage et l'évaluation cadastrale de la forêt guyanaise aboutirait donc à un résultat nul, ce qui nous fait regarder avec appréhension la perspective de devoir mener à bien cette tâche.

À la lecture du rapport, je me suis interrogé pour savoir s'il existait un authentique particularisme guyanais ou si des situations semblables se retrouvaient en métropole. Certes, grâce à l'impulsion napoléonienne, il n'existe pas de parcelles non cadastrées en France métropolitaine. En revanche, il existe des parcelles laissées à l'état de nature, ne produisant aucun revenu - remises d'ailleurs en gestion à un établissement public - et bénéficiant à ce titre d'une exonération permanente. Il en existe même beaucoup. Par exemple, les landes du Finistère remises en gestion au Conservatoire du littoral bénéficient de la même exonération permanente que la forêt guyanaise.

Notre démarche renverse en quelque sorte la perspective. Nous partons de l'hypothèse, qui n'est pas réalisée aujourd'hui, d'un cadastrage complet de la forêt guyanaise, en laissant de côté les difficultés purement techniques bien réelles qu'il faudrait surmonter pour y parvenir. Nous constatons que l'application de la législation aboutit à un résultat fiscal nul. En conséquence, nous ne considérons pas le cadastrage comme une opération qui devrait mobiliser les ressources déjà tendues de la direction générale des finances publiques. Cet exercice pourrait certes être utile en termes de géodésie du territoire. J'ai eu sur ce point une conversation avec l'Institut géographique national (IGN) pour lequel la forêt guyanaise et les limites du territoire présentent un intérêt très fort.

À droit constant, s'il y a bien un intérêt géodésique, il n'y a strictement aucun intérêt fiscal en la matière. Si l'on se place à droit non constant et si l'on décide que la forêt guyanaise, bien que bénéficiant en principe d'une exonération permanente, est relevée de cette exonération et que, en conséquence, l'État doit payer un impôt foncier, la donne est évidemment rebattue. Cependant, cela poserait des problèmes en France métropolitaine et probablement en Guyane. Quant à l'installation d'un transfert financier de l'État vers les collectivités guyanaises, après avoir décliné à mon tour ma compétence pour apprécier ce point, je ferais simplement remarquer que cela serait nettement plus simple que d'aller cadastrer la forêt.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion