Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la loi « de départementalisation » du 3 mai 1996 relative aux services d’incendie et de secours a permis de transférer aux services départementaux d’incendie et de secours la compétence en matière d’incendie, qui était jusqu’alors exercée par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale.
Ce transfert, effectif depuis le 1er janvier 2000, a eu pour effet de rendre obligatoire la création d’un établissement public administratif départemental : le service départemental d’incendie et de secours, ou SDIS.
La loi précitée avait en outre prévu le transfert à ces SDIS des biens affectés au fonctionnement des services d’incendie et de secours. Aujourd’hui, la majorité de ces opérations de transfert ne sont d'ailleurs toujours pas achevées.
Parmi les biens concernés figurent notamment les casernes. Si la rénovation de ces dernières ne soulève aucune difficulté, il n’en va pas de même pour la construction de casernes neuves. Bien souvent, les maires, encore très attachés à la présence d’une caserne sur le territoire de leur commune, ont souhaité participer, à titre volontaire, au financement des casernes neuves devant être construites sur leur territoire.
Les communes peuvent-elles participer au financement de la construction d’une nouvelle caserne, dès lors que leur compétence en matière d’incendie a été transférée aux SDIS ? La question s’est rapidement posée. En effet, l’article L. 1424-12 du code général des collectivités territoriales dispose que « le service départemental d’incendie et de secours construit, acquiert ou loue les biens nécessaires à son fonctionnement », ce qui semble exclure l’intervention de toute autre collectivité.
Interrogé par les parlementaires sur la lecture qu’il convenait de faire de cet article, le ministère de l’intérieur a répondu, à de nombreuses reprises, en énonçant une double règle : si le SDIS ne peut obliger une commune à financer une caserne neuve, une commune peut contribuer volontairement au financement d’une telle construction, sous la forme notamment d’un fonds de concours. Une telle solution est logique et il convient de saluer cette interprétation des textes, laquelle donne notamment tout son sens au principe de libre administration des collectivités territoriales.
Pourtant, ces réponses n’ont pas réglé l’ensemble des difficultés existantes.
Les établissements publics de coopération intercommunale avaient reçu la faculté de se voir dotés, en lieu et place des communes les composant, de la compétence en matière d’incendie. En vertu du parallélisme des formes, ces EPCI auraient donc dû pouvoir participer, dans les mêmes conditions que les communes, aux constructions nouvelles postérieures à la création des SDIS. Le principe de spécialité de ces EPCI n’aurait pas été remis en cause, puisque ceux-ci disposaient de la compétence en matière d’incendie avant que cette dernière ne soit transférée aux SDIS. À l’instar des communes, les EPCI avaient donc, antérieurement à la loi de départementalisation, la compétence nécessaire pour construire des casernes.
Il semble par conséquent logique de considérer que les EPCI à fiscalité propre ont exactement les mêmes droits que les communes. Pourtant, aucune position claire et tranchée n’a été prise sur ce point.
De récents contrôles exercés par les chambres régionales des comptes, à l’instar de celui mené par la CRC de Bretagne sur le SDIS des Côtes-d’Armor, remettent ainsi en cause cette possibilité. Les chambres, se référant à « l’esprit de la loi du 3 mai 1996 », estiment notamment que les EPCI à fiscalité propre ne peuvent financer volontairement de nouvelles casernes sous forme de fonds de concours.
De telles décisions, qui semblent pourtant contraires au principe de libre administration des collectivités territoriales, font naître un doute sur la légalité de ces financements.
C'est la raison pour laquelle je me permets de vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur la possibilité pour les EPCI à fiscalité propre, dotés de la compétence en matière d’incendie antérieurement à la loi du 3 mai 1996, de contribuer, à titre bien entendu volontaire, au financement de la construction de casernes neuves sur leur territoire. Quelle est votre analyse sur ce sujet ?