Intervention de François Goulard

Réunion du 26 octobre 2004 à 16h00
Aménagement protection et mise en valeur du littoral — Suite d'un débat sur l'application d'une loi

François Goulard, secrétaire d'Etat aux transports et à la mer :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je me réjouis, comme l'ont fait un certain nombre d'entre vous, de l'inscription de ce débat à l'ordre du jour réservé de votre assemblée. Il était en effet utile que nous puissions nous exprimer longuement sur la grande loi du 3 janvier 1986 et sur ses conséquences.

Avant de répondre point par point aux différents orateurs, je vous livrerai quelques réflexions d'ordre général.

Tout d'abord, je me sens en harmonie avec celles et ceux - à l'exception, peut-être, de Mme Voynet, mais elle me le pardonnera - qui se sont exprimés à cette tribune. Nous faisons en effet des constats communs puisque nous sommes, pour beaucoup d'entre nous, des élus du littoral. Nous savons donc quelles sont les difficultés réelles, ce qui nous permet de porter des appréciations assez voisines qui vont au-delà des clivages politiques.

Ensuite, je me sens également en harmonie, monsieur le président, monsieur le rapporteur, avec l'esprit de votre rapport. Votre travail, d'une très grande qualité, pousse loin l'analyse et contient des propositions audacieuses.

Les Français ont parfois, malheureusement, une connaissance assez superficielle, voire touristique, du littoral. Beaucoup de nos compatriotes ne savent pas à quel point, au-delà de sa nécessaire protection, le littoral constitue un enjeu en termes de développement : un nombre important de personnes y vivent, elles ont besoin d'y trouver des emplois et des conditions d'existence favorables.

C'est une réalité que les élus du littoral ne peuvent ignorer, M. le sénateur des Côtes-d'Armor l'a dit, mais on n'en a pas assez conscience sur l'ensemble du territoire national.

En conséquence, la loi du 3 janvier 1986 revêt un caractère symbolique et toute idée d'y porter atteinte entraîne immédiatement une levée de boucliers, qui peut se comprendre eu égard à l'esprit de la loi mais qui se comprend moins bien au vu des inconvénients, que vous avez tour à tour évoqués, mesdames, messieurs les sénateurs, auxquels sont confrontés les élus.

Il n'empêche que - ce fait politique ne peut être négligé - les Françaises et les Français, dans leur ensemble, sont extraordinairement attachés à la loi du 3 janvier 1986. Il faut donc faire preuve d'une prudence extrême à son endroit, car elle constitue un symbole fort.

C'est un texte fondateur, puisqu'il a inauguré une nouvelle perception des questions qui se posent sur notre littoral.

Ce point devait être d'emblée souligné pour répondre à ceux d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, qui ont appelé de leurs voeux des modifications parfois sensibles de cette loi.

Par ailleurs, je veux également insister sur la diversité du littoral français, qui pose une véritable difficulté au législateur que vous êtes.

En effet, la rédaction d'un texte de portée générale s'avère assez malaisée à mettre en oeuvre puisqu'elle doit s'appliquer à des situations très contrastées : mers subissant ou non les marées, côtes rectilignes sablonneuses, côtes très découpées - comme celles de la Bretagne -, hauteur extrêmement variable des falaises.

De plus, l'occupation du littoral est très variée et le degré d'urbanisation très inégal. On a cité le cas de la Corse, et j'y reviendrai, mais il ne faut pas confondre le littoral français avec quelques zones limitées où les plus grands excès ont été commis.

Quoi qu'il en soit, le législateur rencontre une véritable difficulté lorsqu'il s'agit de définir des règles d'application adaptées à l'ensemble du littoral français.

Par ailleurs, les élus locaux chargés de la gestion des collectivités territoriales du littoral rencontrent eux aussi des difficultés : fluctuations saisonnières de la population dues à la fréquentation touristique, gestion de l'attractivité du littoral, qui est une chance pour toutes les régions concernées mais qui constitue également un défi, prix du foncier qui gêne, par exemple, la construction des logements sociaux, et textes législatifs qui sont, à l'instar de celui qui fait l'objet de notre débat aujourd'hui, plus contraignants qu'ailleurs.

Monsieur le président du groupe de travail, vous avez axé votre propos sur le Conservatoire de l'espace littoral, qui fait naturellement l'objet d'une attention particulière de la part du Gouvernement.

Contrairement à ce que certains ont pu dire dans le cours de leurs interventions, il n'est évidemment pas question de mettre en cause, de quelque façon que ce soit, le Conservatoire, son rôle et ses missions.

Plusieurs d'entre vous, mesdames, messieurs les sénateurs, ont rappelé que, lors du CIADT du 14 septembre dernier, une dotation complémentaire de 8 millions d'euros, en autorisations de programme comme en crédits de paiement, a été attribuée au Conservatoire. Ces crédits correspondent à des besoins réels.

J'en profite pour dire immédiatement à Mme Voynet qu'il ne sert de rien de surdoter budgétairement un établissement public si les consommations ne suivent pas : cela s'appelle de l'affichage ! Et je suis obligé de vous dire, madame la sénatrice, que, à certaines époques, pour des raisons d'affichage politique, des établissements publics, notamment à vocation environnementale, ont été surdotés - je fais allusion, pour être plus précis, à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, l'ADEME -, alors que la consommation des crédits ne suivait pas. Je ne crois pas qu'il s'agisse là d'une bonne politique.

Il faut que le Conservatoire de l'espace littoral ait les crédits dont il a besoin pour remplir son rôle ; il les aura l'année prochaine, grâce à cette dotation complémentaire ; il les aura également au fil du temps.

Par ailleurs, la création d'une imposition particulière sur les équipements portuaires a été proposée pour constituer une ressource affectée du Conservatoire.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion