Intervention de François Goulard

Réunion du 26 octobre 2004 à 16h00
Aménagement protection et mise en valeur du littoral — Suite d'un débat sur l'application d'une loi

François Goulard, secrétaire d'Etat :

Quant aux espaces proches du rivage, j'insiste sur l'arrêt du Conseil d'Etat du 3 mai 2004 concernant la commune de Guérande. Il apporte en effet une modification fondamentale à la jurisprudence relative à la définition des espaces proches du rivage, grâce à une règle qui combine trois critères. Cette règle est beaucoup plus adaptée que celle de la simple distance qui prévalait jusqu'à présent.

Certains intervenants ont critiqué la jurisprudence. Il arrive, mesdames, messieurs les sénateurs, qu'elle soit aussi extrêmement positive, ce qui est le cas ici puisqu'un progrès a manifestement été réalisé.

Il a également été dit, mesdames, messieurs les sénateurs, que les textes d'application de la loi du 3 janvier 1986 n'avait pas été publiés en temps et en heure. Sans doute ont-ils, pour certains d'entre eux, tardé. Mais force est de constater, madame Voynet, que le décret sur les estuaires, qui était important puisqu'il conditionnait l'application du texte à certaines communes, n'a pas été publié alors que vous étiez au gouvernement. C'est le gouvernement d'après 2002 qui l'a fait paraître !

Quoi qu'il en soit, il reste aujourd'hui fort peu de décrets d'application à paraître sur cette loi.

L'un d'entre eux, qui ne paraîtra sans doute jamais, permet d'étendre le champ d'application de la loi littoral à des communes rétrolittorales ou des communes d'estuaire en amont de la limite de salure des eaux : en l'absence de demande, ce décret n'a pas lieu d'être.

Quant au décret d'application de l'amendement Gaillard, il sera transmis prochainement au Conseil d'Etat, de même que le décret d'application du texte relatif aux concessions de plage.

En tout état de cause, au vu des difficultés rencontrées par les élus sur leur littoral, il était nécessaire que l'on essaie de préciser, en concertation avec eux, la rédaction des textes, ce qui est extraordinairement délicat tant il est vrai que cette rédaction doit couvrir des situations très diverses et généralement complexes.

Je retiens en tout cas, monsieur le rapporteur, cette notion centrale de gestion intégrée du littoral et d'association des collectivités territoriales, ainsi que l'outil majeur que peut constituer le schéma de mise en valeur de la mer, réformé comme vous l'avez proposé.

A cet égard, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale s'inspire très directement de vos propositions, même s'il n'est pas exactement conforme à ce que vous souhaitiez, monsieur le rapporteur. Néanmoins, la commission mixte paritaire nous offrira peut-être l'occasion d'aboutir à un texte parfait sur ce point.

Le schéma de cohérence territoriale, le SCOT, qui couvre normalement un territoire assez large, permettra certainement de mieux concilier protection, développement et aménagement. A mon sens, le juge administratif, qui est animé par le souci de protéger le littoral, sera à même d'accepter la planification territoriale envisagée par les élus s'il constate la cohérence de l'approche d'ensemble d'un groupe de collectivités.

Je précise que l'avis conforme du préfet en la matière n'est exigible que sur la partie qui relève exclusivement de l'Etat, à savoir le domaine public maritime.

Je précise également que, au terme de ces travaux de planification urbaine, des hameaux peuvent être créés sur des espaces proches du rivage. Ce n'est pas interdit par la loi, mais simplement soumis à des considérations d'ensemble que le juge appréciera.

Monsieur Natali, s'agissant de la Corse, l'une des caractéristiques de la loi du 3 janvier 1986 est de permettre l'accroissement de l'urbanisation dans les zones déjà construites alors que cette possibilité est extrêmement restreinte pour les zones vierges. Le législateur a en effet eu une véritable volonté de protection des espaces naturels.

Il me semble que les propositions qui ont été faites dans le rapport du groupe de travail en matière de gestion intégrée ouvrent un certain nombre de perspectives qu'il faut étudier. Par ailleurs, je partage totalement votre analyse sur les possibilités qu'offre le tourisme pour le développement économique de l'île.

M. Joseph Kerguéris connaît à merveille, comme ses collègues, les questions relatives au littoral.

J'ai annoncé la publication prochaine du décret d'application de l'amendement relatif à la reconstruction de bâtiments édifiés avant 1986 dans la bande des cent mètres située le long du littoral. Je connais également les difficultés de la commune de Sainte-Hélène, sur la Ria d'Etel.

Les avis qu'émettent les services de l'Etat sont parfaitement légitimes, mais il faut toujours considérer que ce sont les collectivités territoriales qui arrêtent leurs décisions en matière de documents d'urbanisme. En effet, les services de l'Etat ne rendent qu'un avis aux collectivités territoriales en ce qui concerne la définition des espaces proches du rivage et des espaces remarquables et ce n'est qu'ensuite, au titre du contrôle de légalité, que le représentant de l'Etat a la possibilité de constater s'il y a une illégalité au regard de la loi, et que le juge tranche le cas échéant.

J'insiste sur ce point : l'avis des services de l'Etat, pour légitime qu'il soit, n'est qu'un avis émis au moment de l'élaboration des documents d'urbanisme par les collectivités territoriales. Les élus ne doivent pas à être timides ! On peut naturellement comprendre leurs réticences au regard des risques d'annulation contentieuse, mais il faut aussi quelquefois savoir faire prévaloir son point de vue. Les services de l'Etat - comme personne, d'ailleurs - ne sont pas infaillibles.

Je voudrais dire à Gérard Le Cam qu'il n'est aujourd'hui dans les intentions de personne, en tout cas d'aucun élu, de permettre le bétonnage des côtes. Cette époque est révolue. Oui, certaines de nos côtes ont été bétonnées. Au demeurant, je ne sais s'il m'appartient de le faire, mais je tiens à dire que ce bétonnage remonte surtout à une époque où les permis de construire étaient délivrés par l'Etat et non par les élus locaux.

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