Monsieur le Président, Mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui le projet de loi n° 328 (2014-2015) autorisant la ratification de la Convention postale universelle et le projet de loi n° 327 (2014-2015) autorisant l'approbation de l'arrangement concernant les services postaux de paiement.
La Convention postale universelle tout comme l'arrangement concernant les services postaux de paiement comptent parmi les actes qui régissent les obligations découlant de l'Union postale universelle (UPU). Ceux-ci font l'objet d'une révision, tous les quatre ans, par les plénipotentiaires de tous les pays membres de l'UPU réunis en Congrès, en vue de garantir le bon fonctionnement du service postal international et de prendre en compte les évolutions du secteur. Le Congrès postal représente en effet l'autorité suprême de l'Union postale universelle. Le dernier Congrès réuni à Doha en 2012 a donc procédé à cette révision et a fixé la date d'entrée en vigueur de ces actes au 1er janvier 2014. Ils ont un caractère essentiellement technique.
A titre liminaire, je vous rappelle que l'Union postale universelle est une organisation intergouvernementale créée sous le nom d'« Union générale des Postes » par le traité de Berne en 1874. Composée à l'origine de 22 membres, elle en compte 192 aujourd'hui. Depuis 1948, l'UPU est une institution spécialisée des Nations unies, dont la langue officielle est le français et qui a pour objectif de « stimuler le développement durable de services postaux universels de qualité, efficaces et accessibles, pour faciliter la communication entre les habitants de la planète en garantissant la libre circulation des envois postaux sur un territoire postal unique composé de réseaux interconnectés ; en encourageant l'adoption de normes communes équitables et l'utilisation de la technologie ; en assurant la coopération et l'interaction entre les parties intéressées ; en favorisant une coopération technique efficace et en veillant à la satisfaction des besoins évolutifs de la clientèle. »
Son financement est toutefois indépendant de l'Organisation des Nations unies. Les dépenses budgétaires sont financées par les Etats membres selon un système de classe de contribution. Depuis 1992, l'UPU a adopté une politique de croissance zéro. Son budget annuel est d'environ 37 millions de francs suisses, soit environ 37 millions d'euros. La France fait partie des quatre plus gros contributeurs et a versé, au titre de 2014, 1,9 million d'euros, pour la dotation de fonctionnement et les frais de traduction.
Depuis le Congrès de Vienne de 1964, les modalités d'acheminement et de distribution des envois postaux internationaux ainsi que les rapports entre les Etats et entre les opérateurs désignés pour assurer les obligations découlant du traité de Berne sont régis par les actes de l'Union Postale Universelle que sont la Constitution, le Règlement général et, ce qui nous occupe aujourd'hui, la Convention postale universelle et l'Arrangement.
La Constitution de l'Union postale universelle avec ses protocoles additionnels est l'Acte fondamental de l'Union qui contient les règles organiques de l'Union et ne peut être modifiée que lors d'un Congrès, par l'adoption d'un protocole additionnel soumis à ratification.
Le Règlement général précise l'application de la Constitution et le fonctionnement de l'Union. Il est modifié dans les mêmes conditions que la Constitution.
La Convention postale universelle comprend les règles communes applicables au service postal international, les dispositions concernant les services de la poste aux lettres et des colis postaux, ainsi que celles relatives aux rémunérations que les opérateurs postaux se versent pour compenser les coûts de traitement et de distribution des envois internationaux. Elle est complétée, depuis 1999, par deux règlements d'exécution, l'un relatif à la poste aux lettres et l'autre aux colis postaux.
L'Arrangement concernant les services postaux de paiement régit, depuis 1999, l'ensemble des prestations postales visant à transférer des fonds. Il n'est obligatoire que pour les pays membres, parties à l'arrangement.
La pratique veut qu'après chaque Congrès postal, l'ensemble des textes soit renouvelé.
Comme les précédentes, la Convention postale universelle issue du Congrès de Doha de 2012, et qui fait l'objet du premier projet de loi que la commission examine aujourd'hui, est composée de quatre parties. La première fixe les règles communes applicables au service postal international (articles 1er à 12) ; la deuxième précise les règles applicables à la poste aux lettres et aux colis postaux (articles 13 à 28) ; la troisième traite des modalités relatives à la rémunération que les opérateurs désignés se versent entre eux pour compenser les coûts de traitement et de distribution des envois internationaux (articles 29 à 37) et la quatrième et dernière partie contient classiquement les dispositions finales (articles 38 à 40).
La Poste est l'opérateur désigné pour appliquer les règles relatives au service postal international, fixées par la Convention postale universelle.
Les modifications apportées par ce Congrès sont de nature technique et n'appellent pas de commentaires particuliers. Je vais donc vous faire part des plus importantes.
Des règles relatives aux données personnelles des usagers postaux ont été ajoutées en vue d'assurer leur confidentialité et leur sécurité selon la législation du pays membre. Une définition des données personnelles présentées comme « des informations nécessaires pour identifier un usager du service postal » figure désormais à l'article 1er. Selon les principes posés à l'article 12, ces données ne peuvent être utilisées qu'aux fins pour lesquelles elles ont été recueillies conformément à la législation nationale applicable et ne sont divulguées qu'aux tiers autorisés par cette même législation. Les usagers doivent être informés de la finalité de la collecte de leurs données personnelles et de l'utilisation qui est faite de celles-ci.
En France, ces dispositions seront appliquées à la lumière de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés et de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public.
Le champ d'exonération des taxes postales a été étendu en faveur des prisonniers de guerre et internés civils ainsi que des envois pour les aveugles.
La France a émis une réserve sur ces dispositions prévues à l'article 7 afin d'appliquer une réglementation plus favorable qu'elle avait élaborée en concertation avec les associations représentant les personnes malvoyantes en 2009.
Tous les timbres-poste, notamment ceux utilisant de nouvelles technologies, devront être compatibles avec les machines destinées au traitement du courrier (article 8). Ce point ne soulève pas de difficulté en France puisque la Poste a le monopole d'émission des timbres-poste portant la mention France.
Suivant une proposition de 20 Etats membres dont la France, les pays membres et les opérateurs de l'UPU devront se conformer aux normes de sûreté de l'Union postale, en particulier aux exigences relatives à la fourniture de données électroniques préalables pour les envois postaux internationaux identifiés pour des raisons à la fois douanières et de sûreté et de sécurité de l'aviation. La sûreté aérienne est un secteur très sensible actuellement dont la règlementation est en plein essor (article 9).
Les envois postaux (lettres, cartes postales, imprimés, journaux) seront classés selon trois formats, petit, moyen et grand (article 14).
La convention prévoit un service supplémentaire très attendu par les acteurs du « e-commerce », celui du retour de marchandises par le destinataire à l'expéditeur d'origine sur autorisation de ce dernier (article 15).
Elle donne aussi la possibilité aux pays membres ou aux opérateurs désignés de convenir entre eux de participer à des services électroniques postaux limitativement énumérés et définis : le courrier électronique postal recommandé ou non, le cachet postal de certification électronique ainsi que la boîte aux lettres électronique postale (article 17).
La Convention détaille les envois non admis et les interdictions, dont on retiendra notamment celle relative aux objets de contrefaçon. Elle prend également en compte les dispositions du code des douanes communautaires concernant le droit de représentation lors du traitement avec les autorités douanières. (articles 16, 18 et 20)
Le régime de responsabilité des opérateurs et de l'indemnisation est modifié. Il est ainsi précisé que les dommages indirects ou les préjudices moraux ne sont pas pris en compte dans le montant de l'indemnité à verser et que le destinataire a droit à une indemnité pour un envoi spolié, avarié ou perdu si l'expéditeur se désiste de ses droits par écrit en sa faveur (articles 23, 24 et 26).
Venons-en maintenant à l'arrangement concernant les services postaux de paiement qui fait l'objet du second projet de loi examiné aujourd'hui. L'arrangement adopté à Doha en 2012 se substitue à celui de 2008, mais n'est pas très différent sur le fond. Comme le précédent, il se divise en trois parties. La première porte sur les principes communs applicables aux services postaux de paiement, la deuxième aux règles applicables aux services postaux de paiement, la troisième aux dispositions transitoires et finales, notamment aux réserves.
Le nouvel arrangement apporte les quelques modifications suivantes.
L'article 1 élargit le nombre de produits concernés aux mandats contre remboursement qui visent le paiement effectué par le destinataire de l'envoi et aux mandats urgents qui visent la transmission d'un ordre postal de paiement dans un délai ne dépassant pas trente minutes.
La Poste est l'opérateur désigné pour offrir les trois services postaux de paiement que sont le mandat en espèces, le mandat de paiement et le mandat de versement, à l'exclusion donc des virements postaux, des mandats contre remboursement et des mandats urgents. L'article 1er, je vous le rappelle, exige seulement la mise en oeuvre d'au moins un des services postaux de paiement qu'il prévoit. L'offre de mandats internationaux s'effectuera par l'intermédiaire de La Banque postale, filiale de La Poste, qui fixera librement les tarifs en fonction des montants transférés et selon le mode de transfert utilisé, papier ou électronique. Les modalités électroniques seront favorisées pour des raisons de coût.
L'arrangement renforce aussi la confidentialité et la sécurité des données personnelles et prévoit l'obligation pour les opérateurs désignés d'appliquer un nombre minimal d'éléments et de normes de qualité de service pour les ordres de paiement postaux transmis par voie électronique.
Il comporte en outre des obligations relatives à la mise en oeuvre des moyens nécessaires pour lutter contre le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme, la criminalité financière et le signalement des transactions suspectes. Enfin, il précise que la responsabilité des opérateurs cesse dès que les sommes ont été payées, créditées ou remboursées.
Sous le bénéfice de ces observations, je recommande l'adoption de ces deux projets de loi qui sont à la fois conformes à notre droit interne et à celui de l'Union européenne et qui faciliteront l'adaptation des services postaux internationaux aux développements technologiques, à la demande des clients et à la concurrence s'agissant des services financiers transfrontaliers. Le service postal international en sera sans conteste amélioré.
L'examen en séance publique est fixé au jeudi 7 mai 2015 à 9h30. La Conférence des Présidents a proposé son examen en procédure simplifiée.