Cette difficulté est soulignée depuis très longtemps et, apparemment, rien ne permet aujourd'hui de penser qu'elle pourrait être facilement surmontée.
Cela tient tout simplement au fait qu'un maître d'apprentissage n'aura pas recours à un jeune apprenti s'il n'en ressent pas le besoin, s'il ne se sent pas capable d'encadrer ce jeune ou si, pour des raisons avouables ou moins avouables, il ne se sent pas à l'aise avec le profil du jeune qui lui est présenté, à cause du quartier d'origine, de la couleur de peau ou de la sonorité du patronyme de ce dernier. Il est souvent difficile de mettre en évidence ce qui relève véritablement d'une discrimination à caractère racial ou ethnique, mais il y a un climat général qui rend les choses bien plus difficiles pour un certain nombre de jeunes. Tout le monde le sait !
Alors, ces problèmes rencontrés par les jeunes de seize ans, dont beaucoup doivent renoncer à débuter leur apprentissage faute d'entreprise pour les accueillir, comment pourrions-nous espérer les résoudre pour des jeunes de quatorze ans posant des difficultés d'encadrement bien plus importantes, ainsi que des problèmes de maturité intellectuelle, physique et affective plus sérieux encore ?
Les jeunes qui pourraient être tentés, dès l'âge de quatorze ans ou avant même d'avoir quatorze ans révolus, de s'inscrire dans la démarche que vous leur proposez pourraient le faire pour deux types de raisons.
Tout d'abord, pour des raisons économiques, ils pourraient souhaiter acquérir le plus rapidement possible les rudiments et les bases d'un métier. Je connais la réalité des quartiers et les pressions qui peuvent s'exercer pour que chacun prenne sa part du fardeau des familles.
Ensuite, il pourrait s'agir de raison d'échec scolaire. Il est vrai que nombre de jeunes s'ennuient, perturbent la classe et ne se sentent pas à l'aise avec le cursus scolaire. Comment peut-on donc espérer qu'avec seulement treize semaines de classe par an l'on puisse à la fois rattraper son retard dans les apprentissages fondamentaux et aller au-delà de ce qui pourrait n'être finalement qu'une attirance pour le caractère concret d'un métier, en acquérant également les bases intellectuelles permettant de l'exercer sérieusement, ainsi que les règles de sécurité ou d'hygiène et un minimum d'éléments juridiques ? Là encore, sur ce point, nous n'avons pas obtenu de réponse.
Et puis, il y a toutes ces petites choses du quotidien dont nous hésitons à parler ici, parce que cela fait parfois sourire. Ce sont pourtant de tels problèmes - le déplacement ou le logement - qui rendent la vie infernale pour les gens modestes. Ils sont extraordinairement difficiles à résoudre à seize ans et insolubles à quatorze ans. C'est encore plus vrai si l'on réside dans un quartier qui n'est pas desservi le soir, ni le week-end, ...