Intervention de Claire Krepper

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 27 mai 2015 à 9h05
Réforme du collège avec les représentants des syndicats d'enseignants — Table ronde

Claire Krepper, secrétaire nationale du Syndicat des enseignants (SE UNSA) :

Malgré l'engagement quotidien des personnels, sur le terrain, le collège n'est ni juste, ni efficace, et c'est une source de souffrance pour les professionnels comme pour les élèves en échec. L'échec scolaire est massif au collège et les écarts se creusent entre les élèves pendant les quatre années du cursus ; les comparaisons internationales montrent même que nos élèves les plus faibles ont de plus mauvais résultats que les élèves les plus faibles des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Nous faisons moins bien, pour ces élèves, qu'un pays comme le Mexique, par exemple. Les études internationales montrent encore que, là où il y a des progrès, c'est d'abord parce que le niveau des élèves les plus faibles a progressé : le progrès des plus faibles est un levier pour tous les élèves. Rien ne sert d'opposer la réussite des plus faibles à celle des meilleurs, ni de parler, comme le font trop souvent les médias, d'un « nivellement par le bas » : la réalité, c'est que mieux les plus faibles réussissent, plus loin vont les meilleurs.

Aujourd'hui, notre système opère une discrimination en faveur des meilleurs élèves. Ce sont eux qui bénéficient du plus grand nombre d'heures de classe et des dispositifs les plus performants pour l'acquisition des compétences ; il faut donc restructurer le collège pour se donner effectivement les moyens de faire réussir tous les élèves.

Le dialogue social a eu lieu, amplement, d'abord dans le cadre de la loi pour la refondation de l'école puis pendant une année entière. Nous avons été réunis quatre ou cinq fois, en particulier pour travailler sur l'évolution du collège, puis nous avons négocié la grille horaire.

Pour l'UNSA, l'une des clés de la lutte contre les discriminations est ce que nous appelons la « marge heure professeur », que cette réforme multiplie par six, ce qui est considérable. Dans un collège « moyen », de seize classes, au lieu de disposer comme aujourd'hui de huit heures, 48 heures seront disponibles pour travailler en effectifs réduits, pour observer et travailler sur les difficultés d'apprentissage avec les élèves, pour faire de la co-animation. Cela, tous les enseignants le demandent. Cette réforme vient directement des expériences réussies sur le terrain, c'est une évolution, pas une révolution ; elle est modeste, parce qu'elle s'ajuste aux possibilités et aux avancées de la réflexion dans les équipes.

On a beaucoup glosé sur les EPI, comme s'ils « volaient » des heures aux disciplines. Mais les EPI ne représentent que six à neuf heures, sur 104 heures de cours, on ne peut ainsi pas parler d'une mise en péril des enseignements disciplinaires. De plus, leur contenu correspondra aux programmes et ils permettront un accompagnement personnalisé, des pédagogies diversifiées, un travail par groupe : autant de manières de travailler qui existent déjà au lycée - et qui ont été instituées par une autre majorité politique que celle d'aujourd'hui. Enfin, les EPI sont en continuité des itinéraires de découverte (IDD)...

Cette réforme est fondée sur l'autonomie, qui n'est pas synonyme de liberté ou de « grand n'importe quoi », mais de responsabilité et de confiance faites aux équipes pour construire localement des réponses aux besoins des élèves, pour redonner du pouvoir d'agir aux enseignants, conforter leur fierté de faire leur métier et leur permettre de « s'éclater » pédagogiquement, au service de la réussite des élèves.

La réussite de la réforme, bien sûr, tiendra à l'accompagnement de sa mise en oeuvre, en particulier par la formation initiale et la formation continue, lesquelles ont été mises à mal par la majorité précédente.

Une autre priorité indispensable, c'est la réussite à l'école primaire.

Notre chance, c'est que cette réforme est systémique, elle concerne également la formation, les programmes, l'évaluation et nous espérons qu'elle portera aussi sur le diplôme national du brevet (DNB).

Il y a urgence pour le collège, pour le système éducatif public. Il est temps de sortir des polémiques sans fondement, pour porter tous ensemble ce nouveau collège !

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