Intervention de Véronique Desbrosses

Commission de la culture, de l'éducation et de la communication — Réunion du 28 mai 2015 à 9h00
La culture face au défi numérique — Table ronde

Véronique Desbrosses, directrice générale du Groupement européen des sociétés d'auteurs et compositeurs (GESAC) :

Merci de votre invitation. Le GESAC représente désormais 34 sociétés d'auteurs, qui rassemblent plus d'un million d'auteurs et d'ayants droit et perçoivent près de cinq milliards d'euros par an, soit 60 % des perceptions dans le monde. En 2013, ce sont 4,3 milliards d'euros qui ont ainsi été répartis entre environ 500 000 auteurs ou ayants droit. L'apport des sociétés d'auteur au financement de projets culturels est considérable : en 2013, elles y ont consacré plus de 207 millions d'euros, soit 3,5 fois plus que l'Union européenne...

C'est dire combien notre modèle de gestion collective du droit d'auteur est vertueux ! Les industries culturelles et créatives représentent 4,2 % du PIB de l'Union européenne et y sont le troisième employeur, derrière le secteur de la construction et celui de la restauration. Employant surtout des jeunes et résistant bien à la crise, elles constituent un atout majeur pour l'Europe. M. Obama a déclaré que l'industrie américaine détenait Internet, l'Asie du Sud-Est est chef de file pour l'électronique grand public... Mais l'Europe est sans doute leader pour les industries culturelles et créatives.

Or ces industries culturelles et créatives ont un écosystème fragile, qui dépend très largement du respect de la propriété intellectuelle et du droit d'auteur. Nous sommes donc très attentifs à la stratégie européenne en matière numérique dévoilée le 6 mai. Elle nous a déçus : la culture n'y est pas reconnue comme un enjeu majeur. Au lieu d'un grand agenda européen de la culture, l'on n'y trouve qu'un saupoudrage de mesures éparses.

S'agissant du droit d'auteur, nous sommes néanmoins assez satisfaits. Les propositions sont très ciblées, alors que le rapport de Mme Reda laissait craindre une remise à plat du système, que beaucoup semblent souhaiter à Bruxelles et qui aurait été tragique pour nos industries. Nous devons être vigilants, cela dit, car la Commission peut toujours avancer d'autres propositions.

Autre motif de satisfaction : la question des activités des intermédiaires dans les domaines protégés par les droits d'auteur fera l'objet d'une proposition législative à la fin de l'année. C'est exactement ce que le GESAC demandait, car ces opérateurs captent de plus en plus de valeur, effectuent des actes couverts par le droit d'auteur et ont connaissance des contenus qu'ils diffusent. Or ils s'abritent derrière une interprétation du régime d'exemption de responsabilité prévu par la directive de 2000 sur le commerce électronique pour estimer qu'ils ne sont pas responsables du contenu qu'ils véhiculent et s'extraire de toute obligation de rémunération des ayants droit. Nous devons donc modifier la loi, en nous concentrant sur la modification du droit d'auteur. Ces opérateurs assèchent la rémunération des auteurs, font concurrence aux plateformes qui respectent le droit d'auteur et réduisent la diversité culturelle. De plus, ils empêchent les artistes de disposer de la diffusion de leurs oeuvres, puisque ceux-ci ne peuvent plus en interdire l'accès.

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