Intervention de Stanislas de Bentzmann

Commission des affaires économiques — Réunion du 27 mai 2015 à 10h10
Audition de M. Stanislas de Bentzmann président de croissance plus

Stanislas de Bentzmann, président de CroissancePlus :

Cela fait partie des mesures qui pourraient être rapidement prises et ne coûtent rien. Passer d'un délai légal de 60 à 30 jours changerait beaucoup de choses.

La numérisation de l'économie est un véritable enjeu. Le Gouvernement a beaucoup évolué en l'espace de quelques mois. Il existe une formidable dynamique sur le terrain, qu'il faut accompagner, tout en prenant garde que l'État ne s'y substitue pas au motif qu'il investirait mieux. Le plan Macron (les programmes de reconquête indistrielle) va dans le bon sens et prévoit des garde-fous pour éviter que l'on ne s'engage dans de grands plans publics à l'ancienne, qui ont certes donné quelques résultats mais se sont fait au détriment d'une politique en faveur des PME et ETI.

La numérisation de l'économie fait peur, mais c'est le seul moyen pour la France et pour l'Occident de renouer avec la compétitivité et de retrouver leur leadership. Il faut en passer par la destruction créatrice dont parle Schumpeter pour transformer les entreprises. C'est le meilleur moyen de gagner en productivité et cesser de perdre des parts de marché.

Les aides de l'État ? Nous n'en voulons pas ! Nous n'avons pas besoin qu'on nous donne la becquée. Ce que nous voulons, ce sont des délais de règlement plus courts, des charges sociales alignées sur celles de nos concurrents - dans mon entreprise, je paye 40 % de plus sur mes salaires localisés en France que sur ceux qui le sont en Allemagne. Des entreprises doivent mourir, d'autres se développer et ce serait bien mal allouer nos ressources que de dispenser des aides indifféremment, y compris aux canards boiteux au détriment de l'innovation. Aider nos entreprises à se développer c'est, au contraire, les aider à entrer en concurrence. La loi Macron fait un pas timide en ce sens. Il faut poursuivre, car les grands groupes se sont constitué des rentes qui empêchent les jeunes entreprises d'entrer sur le marché. Croire qu'en protégeant nos champions nationaux, on fait du bien à l'économie de notre pays, c'est raisonner à courte vue.

Il est vrai que le système d'investissement a, historiquement, favorisé l'immobilier. Voyez le patrimoine des élus, et surtout des ministres : à part un, aucun n'a investi en entreprise. Ils ne se distinguent pas, en cela, des Français dans leur ensemble, qui préfèrent toujours l'assurance-vie et l'immobilier. C'est sans doute culturel, mais on s'aperçoit aussi que, comme par hasard, la fiscalité est plus favorable à ce type d'épargne. Il faut à la fois favoriser l'investissement des entreprises et revoir la fiscalité de l'épargne, pour la drainer vers l'entreprise au lieu de l'entraîner vers l'investissement immobilier, qui fait monter les prix et nuit à la mobilité, y compris professionnelle.

Le débat qui consiste à opposer industrie et services est dépassé. Toute industrie est aujourd'hui servicielle. Il n'existe plus d'industrie sans services, et inversement. C'est cette industrie de demain, toute numérisée et robotisée qu'elle soit, qui amènera des emplois. Aucun produit ne se vend aujourd'hui qui ne soit accompagné de services. Quand on vend un Airbus, on vend certes un produit, mais qui est constitué de milliers d'heures de travail intellectuel et qui fait appel à des entreprises de services. Dire qu'il faut cibler l'accompagnement fiscal sur les entreprises qui sont en concurrence mondiale est absurde. Car tout le monde entre dans cette concurrence. Le balayeur d'une société de services qui assure l'entretien des hangars d'Airbus entre dans les coûts de l'entreprise.

Vous avez raison de dire que si toutes les entreprises ne sont pas à la pointe de l'innovation, elles doivent toutes faire évoluer leur modèle. En Allemagne ; toutes les entreprises cherchent à être compétitives. C'est cette agilité qui fait le plein emploi. L'économie bouge de plus en plus vite ; les entreprises qui ne sont pas agiles mourront, parce que leurs clients ne les attendent pas. Les entourer d'un carcan rigide sous prétexte de protection, c'est les tuer, au risque du chômage. Il faut trouver un juste milieu, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.

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