L'article 2 du projet de loi vise à réduire à néant le principe d'interdiction du travail les jours fériés pour les apprentis.
Par cet amendement, nous entendons au contraire réaffirmer ce principe. Les apprentis âgés de moins de dix-huit ans ne doivent en effet, en aucun cas, être tenus de travailler les jours de fête.
L'interdiction du travail des mineurs les jours fériés a été obtenue au prix de luttes sociales douloureuses et acharnées. En permettant l'apprentissage dès l'âge de quatorze ans, vous poursuivez la remise en cause de ces acquis sociaux et portez une atteinte inadmissible, selon nous, aux droits et à la protection des mineurs.
Compte tenu de l'article L. 222-4 du code du travail, tel qu'il est rédigé depuis la loi nº 2005-32 du 18 janvier 2005 de programmation pour la cohésion sociale, dès lors que vous autorisez l'apprentissage à quatorze ans, vous autorisez également des employeurs à utiliser des enfants à moindre coût les jours de fêtes, jours où l'activité est en principe intense, dans des secteurs où le travail est réputé pénible et qui, en tout état de cause, ne se signalent pas par la qualité des conditions de travail.
Qu'en sera-t-il de la santé et de la sécurité de ces adolescents en période de croissance ? Quelle régression sociale ! Non seulement on met les enfants au travail, mais ils travailleront même lorsque la plupart des adultes se reposent. Quelle porte grande ouverte aux abus ! Où sont les garde-fous ? Est-ce ainsi que des élèves que l'on retire très jeunes du collège deviendront des citoyens à part entière, des adultes aptes à prendre pleinement leur place dans la société ?
Croyez-vous, par ailleurs, que l'apprentissage sera ainsi valorisé ? Non ! Croyez-vous qu'un tel apprentissage donnera le goût du travail aux jeunes, s'ils sont confrontés d'emblée à ses aspects les plus rudes et les plus rebutants ?
Il s'agit non pas de pourvoir en main-d'oeuvre des secteurs délaissés, mais d'apprendre un métier, de manière progressive.
Il s'agit non pas d'exercer un emploi très vite parce qu'on ne trouve pas sa place dans le système scolaire tel qu'il est, mais de se former. Or on peut apprendre un métier les jours de semaine : les boulangeries, les cafés sont aussi ouverts en semaine.
Ces jeunes ne sont pas une variable d'ajustement. Les apprentis doivent être préservés. Ils ne doivent pas être surchargés de travail, tout en étant dépourvus de recours et d'appui.
Souhaitez-vous véritablement faire reposer le poids de la pénibilité de certains métiers sur les épaules des plus jeunes et des plus faibles, sous le fallacieux prétexte d'une mise en situation et d'une approche des réalités de l'entreprise ?
Vous dites vouloir permettre à certains collégiens qui ne trouvent pas leur place dans le système scolaire classique d'emprunter un parcours plus adapté à leurs attentes. Croyez-vous que ce projet de loi y réponde ?
Vous rendez un bien mauvais service à l'apprentissage, vous en véhiculez une image bien négative.
Un bouleversement sans précédent est en cours, qui va s'accélérer en France sur le plan social. Il s'agit, qu'on le veuille ou non, d'un véritable retour en arrière, d'un véritable recul de société qu'il faut stopper net.
Il faut permettre à ces enfants de se développer sereinement, en apprenant correctement, à un rythme qui leur convient, un métier qui leur permettra de s'insérer réellement et ne les brisera pas.
Les jours de fêtes sont un temps de repos et de partage, pour les mineurs aussi. Il ne faut pas aboutir à une légalisation du travail les jours fériés pour les apprentis de quinze ans. Il faut en revanche affirmer le principe de l'illégalité du travail les jours fériés pour tous les apprentis.