Intervention de Christine Guimonnet

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 28 mai 2015 à 9h00
Audition de Mme Christine Guimonnet professeur certifié hors-classe d'histoire-géographie secrétaire générale adjointe de l'association des professeurs d'histoire-géographie aphg

Christine Guimonnet, professeur certifié hors-classe d'histoire géographie, secrétaire générale adjointe de l'Association des professeurs d'histoire-géographie :

Les contestations de certains enseignements existent, en histoire-géographie, mais aussi en sciences de la vie et de la terre ou en français. Il ne faut ni les généraliser, ni les minimiser. L'enquête que l'APHG a menée après les événements de janvier a révélé quelques problèmes. Un collègue a rapporté que dans une classe, un élève affirmait que la liberté d'expression l'autorisait à dire que le génocide arménien n'avait pas existé, un autre qu'il était interdit d'insulter le Prophète, et tous deux que les membres de Charlie Hebdo l'avaient bien cherché. Dans une autre classe, des élèves ont réagi contre ce qu'ils estimaient être les deux poids, deux mesures, appliqués aux catholiques et juifs d'une part, et aux musulmans d'autre part.

Des contestations liées au fait religieux peuvent se manifester par le refus d'entrer dans un bâtiment religieux lors d'une sortie scolaire à but culturel, ou lors de l'étude d'auteurs critiquant les religions tels que Voltaire, ou lors de cours sur la Shoah. Il faut faire comprendre aux élèves la différence entre les contenus médiatiques et la construction des programmes. La Shoah, étudiée pendant deux ou trois heures en classe de troisième, est très évoquée dans les médias, pour des raisons historiques et générationnelles. Il faut toujours répondre aux questions, même les plus dérangeantes, et rappeler la différence entre les savoirs scientifiques et les opinions.

Avant les attentats de janvier, nous avions mené, avec mes élèves, une longue étude sur l'antisémitisme, notamment par la caricature et les théories du complot, très répandues parmi les élèves. Ils ont pu comprendre que l'histoire est l'étude du temps long, et que l'antisémitisme, qui est aujourd'hui un délit, était une opinion il y a un siècle.

L'éducation civique est en général dispensée lorsqu'elle est confiée aux professeurs d'histoire-géographie mais il est possible qu'elle fasse l'objet d'un cours d'une heure en classe complète et que l'enseignant privilégie l'histoire-géographie pour les cours par demi-groupes, qui représentent deux heures. L'ECJS est devenue une variable d'ajustement pour combler les emplois du temps. Si elle est confiée à un professeur de mathématiques, il enseignera sa matière. Elle peut servir à courir après le programme, mais pas du tout systématiquement.

Les valeurs de la République ne sont pas naturelles pour tous les élèves. Je crois beaucoup à la valeur de l'exemplarité. Le téléscopage de l'enseignement avec les affaires Cahuzac ou Thévenoud a un effet dérangeant, parce que l'élève s'interroge sur ce « faites ce que je dis, pas ce que je fais ». La transmission des valeurs républicaines n'est possible que si l'exemplarité vient du sommet de l'État. On ne peut pas dispenser un catéchisme républicain, le chemin doit être parcouru des deux côtés. La République est indivisible, laïque, démocratique et sociale. Ce dernier mot, comme le préambule de la Constitution de 1946, est très oublié. Comment se reconnaître dans la République et dans la France quand on est renvoyé à des origines étrangères ? Arrêtons de parler de troisième génération d'immigrés : quand on est né en France, on est Français, un point c'est tout ! Comment faire France quand une partie des élites dénigre en permanence notre pays ? La France est pleine de potentialités. Nous devons prendre à bras le corps toutes les forces vives et donner à nos élèves espoir en l'avenir. La République est vivante !

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