Les délégués de parents sont présents au conseil d'établissement ou au conseil de classe. Ils ne nous disent pas grand-chose lorsqu'on demande des remontées. Si nous voyons certains parents lors de réunions, d'autres ne viennent jamais : ils ont du mal avec l'école, ils projettent leurs mauvais souvenirs, alors qu'elle n'est pas malveillante. Nous ne refusons jamais de discuter avec les parents, bien qu'il puisse être difficile de les contacter, en cas d'absentéisme par exemple. Il faut les associer, mais la rencontre doit être mutuelle, dans un rapport de confiance, afin d'éviter trop d'intrusion dans le contenu des cours.
Au lycée, nous n'avons pas associé les parents aux actions de janvier, mais des élèves ont effectué des démarches spontanées, pour coller des affichettes par exemple. Je leur ai laissé un espace d'expression. Certains ont esquissé des caricatures. Regardez ce poing levé dessiné par une élève de terminale sur un poème :
« Tu exploites le royaume de nos peurs
« Pour en devenir le dictateur,
« N'oublie pas, l'espoir émerge du noir
« Et la douleur n'est pas une victoire...
Voilà une réflexion ! Certains élèves musulmans ont été très choqués, la limite entre islam et islamisme étant évidente pour eux. Nous avons aussi des élèves ouvertement salafistes.
S'agissant des projets de programme, ils seront soumis à consultation auprès des enseignants. Chacun doit répondre individuellement, une synthèse ne relayant pas les ressentis personnels. Il nous faut des programmes réalistes, non des carcans, qui évitent les prescriptions pédagogiques normatives. Les attitudes infantilisantes à notre égard doivent cesser. Toute classe est particulière et nous devons disposer de liberté pour être inventifs. Un sujet laborieux en classe peut être traité en sortie scolaire.
Une expression telle qu'« au choix de l'enseignant » n'est pas claire. Il est important de pouvoir parler de tout. L'islam a toujours été enseigné en cinquième. L'année d'avant, on enseigne la naissance du christianisme. Il est aussi important de travailler sur les sociétés contemporaines médiévales. Aujourd'hui, on est étouffé par l'histoire contemporaine. On oublie trop à quel point l'histoire ancienne et l'histoire médiévale sont intellectuellement formatrices. C'est là que se mettent en place tous les soubassements.
Travailler sur l'histoire, c'est travailler sur les héritages, à la fois dans le temps court, le temps moyen et le temps long. Pour cela, il faut justement du temps, ménagé par une certaine souplesse dans l'application du programme. On ne peut pas demander aux enseignants de faire preuve d'exigence et mettre en avant la trop grande complexité d'un sujet.
Un exemple : il est impossible de donner un cours sur le Proche-Orient, région compliquée s'il en est, sous la forme du Reader's Digest. Il faut s'appuyer sur des cartes, distinguer les peuples, les religions, les langues, ce millefeuille qui constitue le Proche-Orient. Ensuite, on peut aborder les conflits, dont la région est riche. Il est nécessaire de réfléchir aux programmes de manière plus fine.