Intervention de Natacha Polony

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 28 mai 2015 à 9h00
Audition de Mme Natacha Polony journaliste auteure de école : le pire est de plus en plus sûr 2011

Natacha Polony :

Je remercie la commission d'enquête de m'avoir sollicitée car je considère que la transmission des valeurs républicaines par notre système éducatif représente un enjeu crucial.

Je suis journaliste spécialisée sur les questions de l'éducation et j'ai auparavant enseigné une année dans un établissement de l'éducation nationale puis neuf ans au sein du pôle universitaire Léonard de Vinci.

Une interrogation me taraude aujourd'hui : comment de jeunes gens ayant passé 12 ou 13 ans dans les établissements de l'éducation nationale ont-ils pu devenir des tueurs fanatisés tels que les frères Kouachi, Amédy Coulibaly ou Mohamed Merah, sans que nous n'ayons rien vu venir ?

Paru au début des années 2000, l'ouvrage collectif intitulé Les territoires perdus de la République racontait tout à l'avance, mais on n'a pas voulu entendre la parole de ces enseignants et le livre a été mis à l'index.

Personnellement, j'ai pu observer la redoutable conjonction de deux phénomènes que sont la généralisation de l'ignorance et la généralisation du renoncement.

J'ai été confrontée à l'ignorance, parfois presque revendiquée, d'étudiants incapables d'avoir une réflexion élémentaire sur des faits historiques de premier ordre.

J'ai observé le renoncement d'enseignants, réagissant aux exigences de leurs élèves, en allant demander conseil à un rabbin ou à un imam.

La charte de la laïcité ne résoudra rien, si l'école de la République ne parvient pas à nouveau à faire adhérer, non pas seulement les élèves d'ascendance étrangère, mais tous les élèves de France, futurs citoyens, à nos valeurs, à notre culture, à notre civilisation. Cela implique que nous retrouvions la mémoire de cette civilisation, qui tend à s'effacer, non pas tant pour ce qui a trait aux connaissances que pour ce qui concerne les pratiques et les usages.

Or, pour l'heure, les enseignants se refusent à faire cet effort, toute initiative allant dans ce sens étant envisagée sur le mode du soupçon.

L'éducation nationale n'est pourtant pas un service public, mais une institution dont les enseignants sont des fonctionnaires qui devraient s'investir d'une mission particulière de transmission des valeurs de la République. Pourtant la tentative d'introduire dans les concours de recrutement une épreuve intitulé « agir en fonctionnaire de la République » a suscité un tollé au nom de « l'indépendance des enseignants et de la liberté pédagogique ».

Nos enseignants, mal formés sur ces questions, se trouvent désemparés lorsque leurs élèves remettent en cause les valeurs de la République.

À l'origine véritable de l'école républicaine, Nicolas de Condorcet affirmait que la mission première de cette école était de transmettre le savoir universel qui libère, ce qui constitue l'inverse de l'endoctrinement.

2 commentaires :

Le 23/09/2023 à 14:28, aristide a dit :

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"Personnellement, j'ai pu observer la redoutable conjonction de deux phénomènes que sont la généralisation de l'ignorance et la généralisation du renoncement.

Vous parlez des contresens sur la laïcité ?

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

Le 23/09/2023 à 14:29, aristide a dit :

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"À l'origine véritable de l'école républicaine, Nicolas de Condorcet affirmait que la mission première de cette école était de transmettre le savoir universel qui libère, ce qui constitue l'inverse de l'endoctrinement. "

Il faut lutter contre tous ces tarés qui enseignent les contresens sur la laïcité.

Vous trouvez ce commentaire constructif : non neutre oui

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