Intervention de Nicole Guedj

Réunion du 3 mai 2005 à 10h00
Questions orales — Réforme des tutelles : financement et calendrier

Nicole Guedj, secrétaire d'Etat aux droits des victimes :

Monsieur le sénateur, la réforme de la protection des majeurs vulnérables sera de très grande ampleur, à la mesure des enjeux démographiques et sociaux que soulève cette question.

Comme vous l'avez rappelé, plus de 600 000 personnes sont aujourd'hui placées sous tutelle ou sous curatelle et l'évolution de la démographie nous permet de prévoir une aggravation de cette situation. Nous avons tous conscience que cela n'est pas acceptable. Tout d'abord, les règles juridiques actuelles ne sont pas adaptées à la protection des personnes elles-mêmes ; ensuite, l'exécution des mesures est insuffisamment contrôlée ; enfin, les mesures de protection sont inadaptées aux personnes qui ne parviennent pas à gérer leurs ressources, non pas en raison de l'altération de leurs facultés mentales, mais à cause des difficultés sociales qu'elles rencontrent.

Face à cet enjeu, la réforme comportera trois volets.

Le premier volet sera juridique : le titre XI du code civil sera profondément remanié. Les principes de nécessité et de subsidiarité des mesures de protection juridique seront renforcés. Le texte traitera aussi de la protection de la personne et non plus seulement de celle de son patrimoine. Le contrôle et la révision régulière des mesures seront améliorés. Enfin, toute personne pourra, par un mandat de protection future, choisir la personne chargée de l'assister ou de la représenter le jour où elle ne sera plus en état d'agir seule.

Le deuxième volet sera social : une mesure d'aide budgétaire et d'accompagnement social sera créée pour aider les personnes qui mettent leur situation personnelle ou familiale en danger du fait des difficultés qu'elles rencontrent pour gérer leurs ressources. Cette mesure sera prise avec l'accord de l'intéressé, mais, en cas d'échec ou de refus, elle pourra être ordonnée par le juge. Elle remplacera ainsi la tutelle aux prestations sociales, qui a montré ses limites.

En outre, la réforme organisera la profession de « mandataire judiciaire de protection des personnes », qui regroupera toutes les personnes extérieures à la famille, lesquelles exercent aujourd'hui les mesures de protection selon des statuts juridiques différents. La réforme précisera les conditions d'accès, d'exercice et d'évaluation.

Enfin, le troisième volet sera financier : le mode de financement des mesures exercées par les professionnels extérieurs à la famille sera harmonisé. En ce domaine aussi, il existe des différences incompréhensibles et, il faut l'avouer, parfois injustes. Ainsi, la rémunération des mandataires de protection sera effectuée par un prélèvement progressif et plafonné sur les ressources de la personne vulnérable. En cas d'insuffisance de celles-ci, ce prélèvement sera, selon le cas, remplacé ou complété par un financement public.

Comme vous le voyez, monsieur le sénateur, il s'agit non pas « seulement » d'un projet de loi, mais d'une réforme globale de l'action en faveur des personnes vulnérables, qui doivent être protégées.

Je vous informe que le projet de loi, rédigé conjointement par les services de la Chancellerie et ceux du ministère des solidarités, de la santé et de la famille, a été soumis à la consultation des autres ministères et que les premiers arbitrages interministériels ont été rendus. Cet avant-projet de loi vient d'être transmis à l'Association des départements de France, pour consultation.

Cette réforme engage non seulement l'Etat, mais aussi les organismes de sécurité sociale, qui sont concernés par la réforme de la tutelle aux prestations sociales, ainsi que les départements, qui auront un rôle essentiel dans la mise en oeuvre des mesures d'accompagnement budgétaire et social. Le Gouvernement entend présenter un projet qui recueille l'assentiment de toutes les parties prenantes à cette réforme. Il est déterminé à y parvenir dans les meilleurs délais, pour saisir la représentation nationale de ce projet de loi avant l'été.

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