Intervention de Évelyne Didier

Réunion du 9 juin 2015 à 14h30
Débat sur le thème : « l'avenir des trains intercités »

Photo de Évelyne DidierÉvelyne Didier :

Tout cela conduit aujourd’hui à abandonner une partie du réseau, dont la rénovation nécessiterait des efforts trop importants.

Certes, le rapport préconise des efforts en matière de renouvellement du matériel. Nous l’approuvons sur ce point, mais il ne répond pas à cette question plus globale : quelles ressources sont nécessaires pour garantir la continuité et la qualité du système ferroviaire, et qui doit payer ?

Il faut ici rappeler que l’État français se situe loin derrière ses partenaires européens en matière d’investissement public dans le ferroviaire. Il ne participe en effet qu’à hauteur de 32 %, contre 50 % en Allemagne, pays que l’on prend toujours en exemple, et bien plus encore dans d’autres pays, la part de l’investissement public pouvant atteindre 90 %.

Nous sommes extrêmement inquiets de constater que le rapport préconise, comme avenir inéluctable pour les TET, l’ouverture à la concurrence, alors même que le quatrième « paquet ferroviaire » n’est toujours pas adopté. Cette préconisation est en cohérence avec l’adoption ici même, à l’occasion de l’examen du projet de loi Macron, de l’ouverture à la concurrence des TER. Là encore, il s’agit bien d’une logique globale.

D’ailleurs, les entreprises ne s’y trompent pas, qui ont d’ores et déjà adressé aux parlementaires des argumentaires louant l’ouverture à la concurrence comme une réponse à l’abandon des lignes non rentables, tout en invoquant l’importance du service public. On marche sur la tête !

L’exemple du fret est parlant. L’ouverture entière à la concurrence, en 2006, de ce secteur d’intérêt général a justifié le désengagement de l’État et de la SNCF des infrastructures, des matériels et de l’activité d’opérateur. Ce secteur est aujourd’hui moribond. Est-ce cela que nous voulons pour les TET ?

Ce qui est visé, derrière tout cela, c’est le statut des cheminots. Nous vivons une époque de grande précarisation du salariat, marquée par la volonté de supprimer toutes les protections sociales, qui sont perçues comme des entraves au libre jeu du marché.

Nous considérons, pour notre part, que les TET, les TER et les TGV constituent des offres de mobilité distinctes et complémentaires. Les TET desservent mieux les territoires et sont moins chers que les TGV. Ils parcourent des trajets plus longs que les TER. Il n’est donc pas vrai que l’existence d’une offre permet d’en supprimer une autre. Cette fragmentation et cette limitation de l’offre risquent de créer des ruptures de lignes, et ainsi de mettre à mal la continuité du réseau ferroviaire.

Pour conclure sur le rapport Duron, il faut dire que son auteur est parti de la feuille de route qui lui a été donnée : limiter les dépenses. Il ne peut donc pas aboutir à une autre conclusion.

Ce rapport a le mérite de faire un diagnostic complet et partagé, et de préconiser des mesures bien plus équilibrées que celles que la SNCF voulait imposer. Mais ces propositions traduisent un manque d’ambition pour le ferroviaire.

Nous sommes au contraire convaincus qu’il importe non seulement de conserver l’ensemble des lignes TET, en améliorant le service rendu aux usagers, mais également de développer l’offre. Nous invitons donc le Gouvernement à financer le développement du ferroviaire en faisant reprendre tout ou partie de la dette par une structure de défaisance, ce qui permettrait de dégager plus de 1 milliard d’euros chaque année pour le chemin de fer.

Tel est l’enjeu de demain pour le rail : trouver de nouveaux financements pour développer l’offre afin de répondre efficacement aux enjeux de mobilité, aux enjeux environnementaux et aux enjeux d’aménagement du territoire.

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