Intervention de Marc Guillaume

Commission d'enquête Autorités administratives indépendantes — Réunion du 4 juin 2015 à 9h00
Audition de M. Marc Guillaume secrétaire général du gouvernement

Marc Guillaume, secrétaire général du Gouvernement :

Le ministre Richard a répondu à la question sur les nominations. La variété des profils est à examiner autorité par autorité. Ainsi, l'Autorité de la concurrence comprend désormais des représentants d'associations de consommateurs. Loin de ne provenir que d'une seule source, les membres des AAI ont des profils extrêmement variés. Il y a des parlementaires - et l'on demande parfois : « est-ce possible que des parlementaires qui ont voté la loi... ? ». Il y a des membres de corps de contrôle - « est-ce possible, alors que ces corps ont à connaître de telles affaires ? », demandent certains. Il y a des acteurs du secteur, pour lesquels on pose une question similaire... En vérité, les profils se sont diversifiés.

Sur la distinction entre les agences, les opérateurs et les AAI, l'État a fait le choix pour maîtriser les dépenses de santé d'instituer les ARS ; la récente charte de la déconcentration donne au préfet un avis sur la nomination du président de l'ARS. Si les agences ont une compétence nationale, il faut pour les agences veiller à la coordination de l'action de l'État au niveau local.

L'articulation avec le niveau européen est double, par rapport au juge et à la Commission, comme dans le cas de l'Autorité de la concurrence : c'est affaire de seuil, monsieur Portelli.

Le Conseil constitutionnel a cherché à faire en sorte que les statuts des AAI s'inscrivent dans les deux modèles de la séparation organique ou de la séparation fonctionnelle, avec, dans les deux cas, des garanties d'impartialité et d'indépendance. À la suite de ses décisions, il a ainsi fallu modifier les pouvoirs de sanction de l'Arcep pour les rendre conformes. De même, le gouvernement est dans un exercice de modification des pouvoirs de sanction de l'AMF. Chacune des AAI a vu son statut repeigné.

Une AAI doit-elle maîtriser ses recettes, c'est-à-dire prélever l'impôt ? Une situation aussi particulière dans le fonctionnement historique de notre démocratie mérite un examen au cas par cas. L'indépendance n'est pas qu'une question de maîtrise des recettes : la Cnil ne maîtrise pas les siennes ; pour autant, le gouvernement a-t-il porté atteinte à son indépendance en acceptant que ces effectifs augmentent de 44% en cinq ans ?

N'ayant pas vocation à donner ici la position du Conseil constitutionnel, je serai prudent, monsieur le Questeur. Le Conseil constitutionnel n'a pas de ressenti particulier sur une modification de la Constitution. L'indépendance et le pouvoir de sanction des AAI sont importants à ses yeux et il a fait évoluer sa jurisprudence afin de préciser les règles. Le Conseil constitutionnel était il y a dix ans juge en premier et en dernier ressort des comptes de campagne, travail pour lequel il faudrait l'armer différemment maintenant puisqu'il n'a ni commissaires aux comptes ni fiscalistes. Le nouveau système, dans lequel il intervient après la Commission nationale des comptes de campagne, apparaît équilibré dans les moyens respectifs de ces deux institutions.

La variété des parcours est la réponse à la monogéographie, la monoculture et la monopromotion. Vous venez d'imposer le principe de la parité entre les hommes et les femmes, et souhaitez la présence de parlementaires et de personnes apportant des garanties d'indépendance dans les AAI. Il n'est pas facile de trouver à chaque fois ces profils diversifiés ! Oui, la variété doit être recherchée, mais elle renvoie à la légitimité de la nomination, de l'exercice des fonctions et de la carrière future. Combien de temps après leur mandat les membres du CSA peuvent-ils travailler de nouveau dans l'audiovisuel ? À quel âge ? Ne faut-il prendre que des personnes en fin de carrière ?

Je ne connais pas le pourcentage d'AAI dans l'Union européenne. Parfois les obligations européennes proviennent d'idées françaises : la France, qui a créé la Cnil, a exporté ce modèle en Europe ; nous avons été à l'initiative d'une directive qui a ensuite conduit à modifier notre législation. Le mouvement a été inverse dans le cas de l'Autorité de la concurrence : les autorités de régulation sont plutôt venues dans l'autre sens.

Toutes vos questions véhiculent un message dont je rendrai compte au Gouvernement. Je retiens que vous êtes profondément attachés à la manière dont l'État exerce au mieux ses missions au service de l'intérêt général, que vous appelez à l'indépendance des membres des AAI et que vous souhaitez que les autorités de nomination veillent encore davantage à la variété de leurs profils. Enfin, en cette période de préparation de construction du budget 2016, je porterai votre message sur l'association des AAI à l'effort budgétaire.

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