Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans le droit fil des excellents propos de M. Jean Bizet, je voudrais ajouter quelques commentaires.
Tout d’abord, je me félicite de l’initiative qu’il a prise de réunir dans un groupe de suivi des membres de la commission des affaires européennes, qu’il préside, et de la commission des affaires économiques, que je préside moi-même. Selon moi, nous avons mis en place un instrument efficace, souple et qui correspond bien à la nature des travaux que nous voulons mener.
Quelles observations pouvons-nous faire sur l’avancée des négociations du traité transatlantique ?
Tout d’abord, le rôle de ce groupe de suivi consiste à faire le partage entre ce qui relève du fantasme et de la rumeur et les préoccupations, tout à fait légitimes, d’un certain nombre de représentants de secteurs d’activité que nous entendons bien protéger et même promouvoir. Je pense notamment au secteur de l’élevage, qui est directement concerné et qui s’inquiète, bien entendu, des conséquences de la conclusion d’un tel accord, mais également à d’autres sujets évoqués par Jean Bizet, qu’il s’agisse des indications géographiques protégées, les IGP, ou de l’appellation d'origine protégée, l’AOP. Nous avons des positions très claires sur ces questions et nous entendons bien les conserver.
Ce groupe de suivi a aussi pour mission de démystifier le débat. De quoi s’agit-il ? Il s’agit de négociations bilatérales, alors que les négociations multilatérales existent depuis des dizaines d’années. Or nous savons bien que les règles inhérentes à l’Organisation mondiale du commerce, l’OMC, qui compte 161 membres, c’est-à-dire 161 États, sont telles que les blocages sont constants et récurrents. J’ai moi-même participé à plusieurs sommets de l’OMC, à Seattle en 1999 ou à Doha en 2001. On voit bien qu’il est extrêmement difficile d’aboutir rapidement à un accord.
D’où le choix de poursuivre les négociations bilatérales. Du reste, il faut rappeler que ce sont nos partenaires américains qui ont pris cette initiative à un moment précis, à savoir les années 2008-2010, c’est-à-dire au plus fort de la crise que nous subissions. Le choix a été fait, par souci d’efficacité et de pragmatisme, de conduire des discussions entre des pays qui se connaissent, qui sont des partenaires historiques et qui pouvaient partager un certain nombre de préoccupations.
J’ajoute un point qui me paraît important : nous avons tout intérêt à entendre les États-Unis, qui redoutent, bien entendu, les risques inhérents au déplacement vers l’Asie et le Pacifique du centre de gravité de l’économie mondiale.
Selon moi, la solution adaptée à nos besoins est celle qui privilégie comme centre de gravité l’Atlantique. Souvenons-nous en effet que l’objectif est de rendre nos économies plus dynamiques, d’augmenter la production de nos États et donc de réduire le chômage.
En outre, un certain nombre d’observations nous parviennent, des campagnes sont menées, nos boîtes électroniques regorgent de messages qui viennent du monde entier et qui nous alertent, souvent d'ailleurs dans des termes identiques, sur le risque que nous courons à poursuivre cette tâche. Gardons la tête froide et regardons les choses en face !
Je suis convaincu d’une chose. Les travaux que nous menons en lien étroit avec le ministère des affaires étrangères – il a été fait référence au comité mis en place par M. Matthias Fekl – confirment notre choix : ce choix consiste à se mettre sur le terrain de l’efficacité fonctionnelle et à considérer de façon pragmatique ce qu’il faut faire, afin notamment de diminuer les coûts suscités par les multiples contrôles, les procédures et les redondances administratives qui pénalisent fortement nos économies.
L’industrie du médicament est un secteur particulièrement intéressant de ce point de vue. Il s’agit évidemment non pas d’adopter les mêmes critères d’autorisation, mais d’alléger la procédure de contrôle dès lors qu’elle est répétée et d’observer de plus près ce qui se passe dans les pays qui fabriquent beaucoup de médicaments, tels que l’Inde et la Chine.
Du reste, il serait faux de penser que le commerce international est un jeu à somme nulle, c'est-à-dire de croire que l’un gagne aux dépens de l’autre partenaire. Les économistes se sont penchés sur cette question depuis très longtemps.
Voici plus de deux siècles, en Angleterre, David Ricardo écrivit un traité que l’expérience a confirmé et qui peut être aujourd’hui encore enseigné dans les écoles. Il a démontré en effet dans les Principes de l'économie politique et de l'impôt que, grâce à l’avantage comparatif, la production augmente dès lors que le commerce s’instaure entre deux pays. Il a également démontré que l’on pouvait être un député actif au Parlement britannique et un brillant économiste, comme d'ailleurs son quasi-contemporain Adam Smith, qui a également pris des positions politiques.
Aujourd'hui, nous sommes confrontés à la question suivante : ce traité, s’il est conclu, peut-il nous faire gagner les points de croissance qui nous manquent ? Bien entendu, il faudra le vérifier. Toutefois, une chose est certaine : l’objectif, peut-être moins ambitieux que celui qui est parfois affiché, est surtout de diminuer les coûts, de façon à ce que l’ensemble des consommateurs puisse bénéficier d’une augmentation de leur pouvoir d’achat à budget constant. Cette réduction des coûts sera certainement source de profit pour l’ensemble des consommateurs, mais également des salariés.
C’est la raison pour laquelle, madame la secrétaire d’État, nous nous engageons avec résolution dans la voie ouverte par les négociations menées en ce moment.