… que la Chine envisageait d’investir des sommes importantes dans ce plan européen.
Nous le savons, il ne sera pas simple d’évaluer l’efficacité du FEIS. Il y aura lieu d’identifier ses effets multiplicateurs réels. Je suis en tout cas de ceux qui souhaitent que cette première étape se poursuive au travers d’un projet d’investissement « 2.0 » – vous y avez fait référence, monsieur le secrétaire d’État –, avec la mise en place d’une capacité budgétaire propre à la zone euro.
La politique européenne doit par ailleurs être à même de répondre à un besoin de renouveau. Je pense en particulier au « triple A social ».
Faut-il le rappeler, 23, 5 millions d’Européens, dont 5 millions de jeunes âgés de moins de vingt-cinq ans, sont actuellement sans emploi ? De ce point de vue, le FEIS doit permettre à l’Union européenne d’atteindre l’objectif qu’elle s’est fixé en 2012 dans sa stratégie UE 2020, à savoir un taux d’emploi de 75 % au moins.
Il est regrettable que la mise en œuvre du « triple A social » se révèle si laborieuse. Quand on sait que le projet européen est en demande de renouveau, des avancées sociales concrètes seraient pourtant un outil puissant de cohésion sociale, porteur de sens pour les populations.
Nous devons avancer sur la base d’une approche intégrée s’agissant de l’Union économique et monétaire. Pour être forte, l’Europe doit être capable de pouvoir indiquer le cap. Il y a un réel besoin de stratégie européenne. Dans cette perspective, comment rendre optimale la gouvernance économique ?
La question est déterminante. La manière dont sera opéré ce renforcement de l’Union économique et monétaire sera révélatrice de la capacité des États membres à aller vers plus d’intégration en matière institutionnelle, sociale, budgétaire et financière.
Pour une relance de l’Europe, le système a besoin de solidarité. Je suis de ceux qui pensent qu’il existe une corrélation entre l’importance des inégalités et la faiblesse du taux de croissance. La solidarité sera un levier puissant de relance européenne. Pour cela, l’Europe doit désormais faire montre de confiance mutuelle.
Cela doit conduire à une authentique coordination des politiques économiques des États membres. On devrait pouvoir élaborer la politique budgétaire et économique de chaque pays à partir d’une analyse globale européenne, et non l’inverse. Une telle option a été mise en avant depuis l’automne 2014, notamment par la Commission européenne, dans le cadre d’un processus de semestre européen, partiellement rénové par la production d’indicateurs économiques et, surtout, sociaux. Que l’Europe passe d’une logique de bâton à une logique de dialogue peut à tous égards susciter un regain d’optimisme.
À mon sens, cette réorientation du modèle de développement européen doit d’abord se faire à traités constants. Vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, et nous vous soutenons sur ce point.
Les élans extrémistes sont tels que l’Europe prendrait un risque immense à vouloir remettre à plat son fonctionnement dans ce contexte troublé. Il nous semble que les traités existants renferment de nombreux leviers d’action encore inexploités, comme la possibilité des coopérations renforcées.
Face au risque d’implosion dû à ce que les économistes qualifient de « stagnation séculaire », l’Europe et la zone euro ne disposent que de peu de temps pour agir. Alors, comment améliorer la qualité de la décision économique coordonnée au plan européen ?
Premièrement, à mes yeux, un véritable budget de la zone euro s’impose. La question, aujourd’hui bien connue, des ressources propres devra être arbitrée. Il y va de la force de frappe contracyclique de l’Europe.
Deuxièmement, l’Union bancaire doit être parachevée. Il reste beaucoup à faire sur ce point.
Troisièmement, nos bases d’imposition des sociétés doivent être harmonisées. À cet égard, j’attends beaucoup de la rencontre qui se tient demain. Un signal fort doit être adressé sur l’assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés dans l’Union européenne, l’ACCIS. D’ailleurs, cet exemple démontre qu’il est tout à fait possible d’activer le pilier fiscal à traités constants. Dans le même esprit, je souhaite qu’une coopération renforcée opportune permette de faire avancer le dossier de la taxe sur les transactions financières.
Quatrièmement, il faut définir un socle social et une protection de base des travailleurs. Je viens d’évoquer le « triple A social ».
Cinquièmement, le contrôle démocratique de la gouvernance doit être renforcé, en particulier avec une meilleure place aux parlements nationaux.
Sixièmement, nous devons recréer de la simplicité et de la cohérence. Comment la décision économique peut-elle être porteuse de sens et mobilisatrice quand on sait que, parfois, seuls quelques experts maîtrisent l’intégralité des règles ?
Septièmement, il est nécessaire d’intégrer une part de souplesse pour prendre en ligne de compte les aléas du réel.
La zone euro a l’avantage d’être un espace économique relativement stable. Il est maintenant indispensable de doter l’Union économique et monétaire d’un pilier politique. Le temps des solutions bricolées à la dernière minute doit laisser la place à un projet ambitieux et courageux.
Les dossiers « chauds » du moment ne peuvent pas nous laisser indifférents. Sur fond d’un dialogue difficile avec le Royaume-Uni, les avis divergent quant à la capacité de l’Europe à s’engager aujourd’hui dans un renforcement de la zone euro. Les uns souhaitent geler tout projet d’intégration plus poussée de cette zone ; les autres soutiennent au contraire son intégration accrue, selon le principe de l’Europe différenciée.
Quoi qu’il en soit, il me paraît souhaitable d’en finir avec les « sommets de la dernière chance ». Pour cette raison, notre groupe réfute toute idée d’abandon politique. Nous soutenons le message d’un intérêt général européen supérieur qui serait envoyé aux marchés.
Dans le cadre des négociations actuelles, notre gouvernement, fidèle à ses positions, doit défendre la solidarité européenne et promouvoir pour la Grèce une option politique de sortie de crise qui soit à la fois équilibrée dans les exigences manifestées à l’égard du peuple grec et porteuse d’espoir pour le renouveau économique du pays. La Commission européenne estimait ce lundi qu’il y a « de la marge pour discuter d’un package juste et progressif ». C’est le souhait que nous pouvons ici formuler.
En tout état de cause, monsieur le secrétaire d’État, le groupe socialiste et républicain vous suivra dans l’ensemble des actions que vous souhaitez entreprendre et dans la détermination que vous avez manifestée en ce sens.