Intervention de Michel Houel

Réunion du 11 juin 2015 à 11h00
Débat sur le bilan annuel de l'application des lois

Photo de Michel HouelMichel Houel :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le président de la commission des affaires économiques, M. Jean Claude Lenoir, qui ne peut être présent ce matin au Sénat vous prie de l’excuser. Il m’a demandé de présenter le bilan d’application des lois relevant du champ de compétences de la commission des affaires économiques pour la session parlementaire 2013-2014.

Sur les 34 lois dont l’application est suivie cette année par la commission des affaires économiques, 14 sont totalement applicables. Comme l’année dernière, il est à noter qu’aucune loi figurant dans le bilan n’apparaît comme totalement inappliquée.

L’activité législative de la commission a été soutenue durant la session parlementaire 2013-2014, avec l’adoption de cinq projets de loi importants, tant par leur contenu que du fait de la longueur de certains d’entre eux, prévoyant un nombre impressionnant de mesures réglementaires d’application. Trois propositions de loi ont également été votées au cours de la période de référence : deux sont d’origine sénatoriale et directement applicables.

L’étude des vingt lois qui ne sont que partiellement applicables aboutit à un bilan plus contrasté.

L’exemple le plus emblématique en est la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite « loi ALUR », qui comporte 210 renvois vers des décrets ou arrêtés.

Je pense, à titre personnel, que cette loi doit être retravaillée et scindée en deux parties. Autant on peut considérer que la partie relative aux rapports entre locataires et propriétaires est relativement bien ajustée, autant on peut estimer que la mise en œuvre des dispositions relatives à l’urbanisme de la loi ALUR se révèle catastrophique dans de nombreuses communes, entraînant de la part des élus une véritable levée de boucliers. Élu d’un secteur sensible du nord de la Seine-et-Marne, je peux vous certifier que l’application de cette loi dans ma commune laisse à désirer : quand la commune dispose de 1 000 mètres carrés de terrain constructible et que 1 000 autres mètres carrés se libèrent à côté, on est obligé de faire trois lots et, du coup, les véhicules sont garés dans la rue ! Il faudrait vraiment revoir les choses.

À ce jour, la loi ALUR affiche un taux de parution des textes réglementaires très bas qui s’établit à 16 %, puisque 33 mesures seulement ont été prises jusqu’à présent.

Il est à noter que la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives et le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques en cours d’examen, modifient plusieurs dispositions de la loi ALUR. Les conséquences de ces modifications sur les mesures réglementaires à prendre sont, à ce stade, encore difficiles à évaluer, mais l’abandon de certains dispositifs est probable.

Deux autres lois votées durant l’année parlementaire 2013-2014 affichent un taux d’application peu satisfaisant, avec un peu plus d’un quart des mesures réglementaires attendues déjà publiées. Il s’agit, respectivement, de la loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire, avec 28 % des mesures prises, et de la loi du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, avec un taux d’application de 26 % seulement.

Lorsque l’on examine plus en arrière le stock des lois suivies par la commission, force est de constater que très peu de mesures réglementaires – moins d’une dizaine – ont été prises concernant les lois antérieures à 2013, à quelques rares exceptions.

Sur les 34 lois dont l’application est suivie cette année par la commission des affaires économiques, une seule a fait l’objet de la remise d’un rapport en vertu de l’article 67 de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit depuis le bilan établi en 2013. Le rapport relatif à la mise en application de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation a été remis au Parlement le 26 décembre 2014, soit plus de neuf mois après la promulgation du texte au lieu des six mois fixés par la loi de 2004.

Comme l’année dernière, il faut enfin déplorer la grave défaillance dont fait parfois preuve l’administration en ce qui concerne la remise des rapports au Parlement. Les chiffres sont éloquents : trois rapports seulement ont été rendus au cours de la période étudiée cette année sur les textes que nous avons suivis. Pour mémoire, les lois votées sur la période allant du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014 prévoyaient au total la remise de 27 rapports. La loi ALUR, à elle seule, devait faire l’objet de neuf rapports, dont aucun n’a pour l’instant vu le jour.

L’inefficacité de la mesure étant depuis longtemps démontrée, je crois, mes chers collègues, qu’il nous faut absolument combattre cette solution de facilité qui consiste à prévoir la remise d’un rapport sur un dispositif dont on ne peut obtenir l’adoption dans la loi, car ces rapports nous coûtent très cher.

Pour conclure, monsieur le secrétaire d’État, la commission des affaires économiques a dû traiter un volume législatif très important ces dernières années. Plusieurs centaines de textes d’application sont attendus et le rythme s’accélère. Dans ces conditions, il ne faut guère s’étonner que l’application des lois ne puisse être satisfaisante. La commission des affaires économiques a une solution à vous proposer : il suffirait de moins légiférer !

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