Intervention de Clara de Bort

Délégation sénatoriale à la prospective — Réunion du 9 avril 2015 : 1ère réunion
Atelier de prospective : mieux prévenir et gérer les crises liées aux maladies infectieuses émergentes

Clara de Bort, cheffe du pôle de réserve sanitaire à l'Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (Eprus) :

L'Eprus est un établissement public, sous la tutelle du ministère de la santé et, pour certaines de nos activités, du ministère des affaires étrangères. Nous sommes intervenus en Guinée dès le mois d'avril 2014 auprès du gouvernement guinéen, puis à partir de septembre pour la mise en place du centre de soins Ebola de Macenta, confié à la Croix-Rouge française.

Nous avons dans la réserve sanitaire toute la palette des professionnels du secteur de la santé, des infirmiers aux sages-femmes, des psychologues aux épidémiologistes, directeurs d'hôpitaux, ingénieurs, logisticiens, en exercice ou retraités. Notre mission consiste à déplacer cette ressource humaine en urgence. En « temps de paix », nous la recrutons, l'animons et la formons, pour qu'elle soit opérationnelle très rapidement en « temps de guerre ».

L'Eprus est jeune - huit ans - et a grandi avec le numérique. Les dossiers des réservistes sont totalement dématérialisés. Les appels à mobilisation sont, eux aussi, « tout numérique ». Il s'agit en fait de sondages express par internet, que nous lançons sur les boîtes mail personnelles des réservistes lors d'une urgence pour savoir qui est disponible. Ils sont doublés d'alertes SMS. Les premières réponses des réservistes parviennent en moyenne douze secondes après l'alerte. Je souscris donc tout à fait à ce qui a été dit : oui, le numérique réduit l'espace et le temps, et, pour nous, c'est essentiel.

Nous avons des réservistes partout en France, y compris outre-mer, ainsi qu'une trentaine qui résident à l'étranger. Deux mille réservistes sont prêts à partir. Cinq mille candidats réservistes sont disposés à finaliser leur dossier en cas de besoin. Voilà une dizaine de jours, nous avons lancé une alerte ciblée pour renforcer le centre de traitement des soignants géré à Conakry par le Service de santé des armées. Soixante-douze heures plus tard, nous avions reçu un peu plus de deux cents réponses positives.

Le numérique nous est indispensable car nous sommes une structure très légère. Nos relations avec les réservistes étant virtuelles, nous apprécions de pouvoir les rencontrer « en chair et en os » lors des formations que nous organisons à leur intention, en particulier des exercices sur le terrain. Nous communiquons de façon très large sur les réseaux sociaux, sur Twitter, Youtube, Facebook. Nous avons ouvert avant-hier un compte sur Periscope et préparons un prochain compte Instagram. C'est important pour les réservistes de voir leurs collègues partir en mission, de comprendre ce qu'ils vont y faire, de se préparer à prendre leur relève. Nous misons énormément sur l'image et la vidéo pour améliorer la préparation des équipes.

Nous exerçons également une activité de curation, qui consiste à repérer des articles dont nous savons qu'ils sont fiables afin de les relayer auprès de nos lecteurs de façon continue. À nos yeux, la confiance se construit en « temps de paix », nous voulons devenir un vecteur d'information fiable pour mieux relayer les messages clés en période de crise. Il n'est plus possible d'envisager une vision top down en santé publique. Nous entendons jouer pleinement le jeu des réseaux sociaux, en connaître les codes et construire progressivement notre e-réputation.

Nous ne sommes ni des épidémiologistes ni des spécialistes en santé publique. Nous sommes des experts de la « mise en lien », des ingénieurs capables d'envoyer n'importe qui, n'importe où, de répondre très rapidement à un besoin de renfort, et ce dans des conditions juridiques, administratives et financières sécurisées. Nous entendons ainsi faire partie des relais de confiance pour la circulation de l'information dans le domaine de la santé et la mise en lien des parties prenantes, notamment des professionnels, dont nous savons à quel point ils jouent, au moment des crises, un rôle de leaders d'opinion et de proximité absolument essentiel.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion