Madame la Présidente, je vous remercie pour votre invitation.
Pour commencer, je vais vous présenter le Conseil supérieur de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (CSEP). Par décret du 30 avril 2013, le Premier ministre m'a nommée secrétaire générale et nous a confié trois missions : consultation sur tous les projets de lois ou de décrets en matière d'égalité professionnelle, évaluation des politiques publiques et proposition d'actions sur la base d'études et de recherches lancées à notre initiative.
Nous avons rédigé un rapport sur les accords « Égalité » sur lesquels nous avons fait un certain nombre de propositions, ainsi qu'un rapport sur le sexisme qui nous a conduits à formuler des propositions, dont deux ont été précédemment exposées à votre délégation.
C'est dans le cadre de notre première mission que nous avons été saisis, le 7 avril 2015, sur le projet de loi relatif au dialogue social et à l'emploi. Notre avis a été remis aux ministres le 13 avril et a été rendu public le 11 mai 2015.
C'est sur la suppression du rapport de situation comparée (RSC) que s'est focalisée l'attention de l'opinion publique. Les amendements portés par vos collègues de l'Assemblée nationale sont tout à fait remarquables et ont permis de clarifier les liens entre les quatre étapes de la négociation sur l'égalité professionnelle : la constitution d'une base de données unique (BDU), la consultation du comité d'entreprise, la négociation devant aboutir à un accord ou, à défaut, à un plan d'action unilatéral de l'employeur et, enfin, la sanction.
Il apparaît toutefois que certaines clarifications pourraient encore être apportées de façon que chacune des étapes contribue, sur les mêmes bases, à l'objectif final d'un accord.
Nous avons obtenu les derniers chiffres des accords « Égalité » de la direction générale du travail (DGT) : 1 662 mises en demeure et 56 pénalités (77 % des mises en demeure concernent une absence d'accord ou de plan d'action, 23 % sont liées à une non-conformité de l'accord aux textes) depuis le 1er avril 2013. Parmi les entreprises assujetties, c'est-à-dire celles disposant d'un délégué syndical, 36,6 % sont couvertes par un accord d'entreprise ou par un plan d'action, avec de très grandes différences puisque cela correspond à 78,7 % des entreprises de plus de mille salariés, 64 % des entreprises de 301 à mille salariés et 31,7 % des Petites et moyennes entreprises (PME) de 50 à 299 salariés. Les pénalités touchent avant tout les PME (plus de la moitié des pénalités) : ce sont évidemment les entreprises qui n'ont pas beaucoup de services pour les assister qui sont pénalisées.
On peut donc dire aujourd'hui que le système mis en place avec la sanction, et tout le système mis en place avec les lois de 1983 et de 2001, fonctionne.
Le rapport situation comparée (RSC) n'existe pas seulement dans le code du travail, mais également dans la fonction publique. Il est donc entré dans les moeurs.
Je souhaitais clarifier les choses en vous proposant plusieurs propositions de modification du texte qui vous a été transmis par l'Assemblée nationale.
L'Assemblée nationale, dans un souci de rendre visibles les données consacrées à l'égalité professionnelle, a inséré un 1°bis à l'article L. 2323-7-2 du code du travail (qui devient l'article L. 2323-8) relatif à la base de données unique (BDU) et qui permet de préciser les neuf domaines sur lesquels doivent porter les indicateurs du RSC en y ajoutant les nouveaux domaines instaurés par la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les hommes et les femmes, c'est-à-dire la sécurité et la santé au travail et les écarts de rémunération et de déroulement de carrière en fonction de la qualification, de l'âge et de l'ancienneté.
Cependant, nous estimons que des améliorations pourraient être apportées à la rédaction du 1°bis de l'article L. 2323-8, car rien n'est précisé sur la façon dont ces informations doivent être recueillies. Il importe donc d'enrichir le 1°bis de cet article en rajoutant la notion d'indicateurs chiffrés et en renvoyant à un décret pour préciser la liste des indicateurs chiffrés retenus, d'autant que ces indicateurs doivent varier selon la taille de l'entreprise.
Il faut faire la différence entre les entreprises de plus ou de moins de 300 salariés. Auparavant, nous avions l'article L. 2323-57 pour le RSC des entreprises de plus de 300 salariés et l'article L. 2323-47 pour les entreprises de moins de 300 salariés. Pour les entreprises de moins de 300 salariés, le rapport s'intitulait « Rapport sur la situation économique des entreprises » (RSE). Aucun indicateur ne figurait dans ce RSE : ce n'était pas obligatoire. Nous ne disposions que de quelques données sur le temps partiel, le salaire moyen, et des éléments ad libitum pour les négociateurs qui prenaient dans le RSE les éléments qu'ils souhaitaient.
Le décret parle de diagnostic, j'aurais pour ma part proposé « Analyse de la situation respective des femmes et des hommes pour chacune des catégories professionnelles dans les neuf domaines » : cette analyse repose sur des indicateurs chiffrés fournis par décret qui peuvent varier selon que l'entreprise comporte plus ou moins de 300 salariés.
Le CSEP a été missionné par la ministre en charge des droits des femmes pour construire des indicateurs chiffrés sur le domaine nouveau de la santé et de la sécurité au travail. L'avis que nous avons rendu construit des indicateurs sur la base du coefficient hiérarchique en fonction de l'âge, de l'ancienneté sur la notion de déroulement de carrière. Nous allons vous fournir les deux avis du CSEP donnant des éléments sur ce que pourraient être des indicateurs chiffrés pour les nouveaux domaines institués par la loi du 4 août 2014.
J'en viens maintenant à la procédure de consultation devant le comité d'entreprise (CE), l'article L. 2323-17 du code du travail. Il me semble qu'il faut y réintégrer la notion de RSC ; il s'agit d'une simple réintégration d'une appellation, sans aucune contrainte supplémentaire pour les entreprises.
Comme l'ancien RSC qui comportait deux parties bien distinctes, l'une relative au diagnostic chiffré et à son analyse, l'autre relative au plan d'action destiné à assurer l'égalité, il convient de rajouter cette idée de plan d'action qui précède la négociation, dans les mêmes termes que ceux de l'ancien RSC, au lieu de la formulation assez imprécise retenue dans l'actuel article L. 2323-17 du code du travail.
Nous proposons de reprendre les dispositions des articles L. 2323-47 et L. 2323-57 du code du travail : « Un rapport sur la situation comparée des femmes et des hommes en matière d'égalité professionnelle au sein de l'entreprise, comportant les informations et les indicateurs chiffrés mentionnés au 1°bis de l'article L. 2323-8, ainsi qu'un plan d'action qui évalue les objectifs fixés et les mesures prises au cours de l'année écoulée, détermine les objectifs de progression prévus pour l'année à venir, définit les actions qualitatives et quantitatives permettant de les atteindre et en évalue leur coût », c'est-à-dire le libellé exact du RSC.
Devant le CE, on consulte ainsi sur le RSC qui comprend deux parties : les indicateurs chiffrés de la BDU (article L. 2323-8) et un plan d'action qui fait le bilan des actions passées, la programmation des mesures à venir, les actions qualitatives et quantitatives.