Je suis spécialiste des transports, des systèmes et des énergies embarquées. Je regrette que la France ne soit pas suffisamment présente dans ce secteur, et en particulier dans la filière hydrogène - même si Altran commence à développer des systèmes d'énergie au sol dans les soutes. Des progrès ont été faits dans les batteries d'avions : alors qu'il fallait, pour obtenir l'équivalent d'un litre de kérosène, transporter 55 kilogrammes de batterie, ce poids a été ramené, pour les batteries lithium-ion, lithium-polymère ou lithium-fer, à 30 kilos. Mais leur conditionnement pose problème car elles prennent feu spontanément. C'est d'ailleurs une des hypothèses pouvant expliquer la disparition du vol de la Malaysia Airlines. Leur chimie est assez fine, leur démantèlement et leur recyclage complexes. Le directeur des véhicules électriques chez Renault m'expliquait ainsi qu'après cinq ans, lorsque les batteries ont perdu 20 % de leur capacité, elles sont remplacées... mais pas recyclées pour un autre usage. J'en ai donc équipé des véhicules utilitaires, et il faudrait leur trouver un troisième usage, notamment pour stocker de l'énergie, par exemple dans des pays africains. Dans des containers de récupération, on peut ainsi installer une station de télécommunications, un frigidaire, une machine à coudre... Ils deviendraient le centre du village !
Chaque roulage d'un avion, avant le décollage ou après l'atterrissage, consomme entre 200 et 1000 litres de carburant. Lorsque j'étais commandant de bord, je réclamais à Jean-Paul Béchat, qui dirigeait Safran, des moteurs électriques pour mes roues, alimentés par batterie ou par le groupe auxiliaire de puissance (APU). Le roulage des avions à Roissy dégage 300 000 tonnes de CO2, soit l'équivalent de la circulation sur le périphérique ! Malheureusement, ma solution ne s'applique qu'aux vols moyen-courriers : en dix heures de vol, les 200 kilos supplémentaires coûtent 100 litres de carburant. Il faut donc imaginer des tracteurs. Ce serait un immense progrès pour la pollution et pour le bruit. Mais cela requerrait une taxation fondée non sur la masse mais sur un critère de pollution. Ce type de véhicules, ou « green taxis », sort du champ de compétences de nos avionneurs. Lorsque je réunis des directeurs de recherches d'entreprises de transport comme Airbus, Valeo ou Michelin, pour imaginer l'avenir de l'aviation, nous y réfléchissons. Les savoir-faire peuvent se croiser et les frontières entre industriels se briser. Nous devons créer une filière énergie allant de la conception au démantèlement de telles batteries.