Intervention de Marc Dandelot

Commission d'enquête Autorités administratives indépendantes — Réunion du 24 juin 2015 à 13h35
Audition de M. Marc daNdelot président de la commission d'accès aux documents administratifs cada

Marc Dandelot, président de la Cada :

J'exerce mes fonctions de président depuis le 18 décembre 2014, et Christelle Guichard qui m'accompagne exerce celles de secrétaire générale depuis le 13 mars 2015. La concomitance de nos prises de fonction est purement fortuite.

La Cada est une institution connue. Elle a pour mission, depuis 1978, de veiller à la liberté d'accès aux documents administratifs, notion vaste et composite qui recouvre les documents produits ou détenus par les services publics, auxquels s'ajoutent désormais les fichiers électroniques qui deviennent des documents dès lors qu'on en extrait les données par un procédé simple. Elle a acquis le statut d'autorité indépendante en 2005, avec l'attribution d'un pouvoir de sanction. Nous étions alors la quinzième AAI : l'eau a coulé sous les ponts.

De ses origines de commission administrative, la Cada a gardé son profil administratif et financier, caractérisé par un train de vie modeste, avec 88 000 euros de budget pour le titre 3 en 2015, et une absence de personnel contractuel. La Cada délivre des avis aux personnes privées et des conseils aux personnes publiques qui la sollicitent, et cela toujours sur des questions de droit. La loi affirme un principe, la communication est la règle, mais elle doit s'appliquer en tenant compte d'une diversité d'intérêts protégés, tels que le secret de la vie privé, par exemple. Quant à la réutilisation des informations publiques, elle soulève davantage d'enjeux économiques et patrimoniaux qui ont conduit à lui réserver un régime juridique plus restrictif.

Dans son office d'autorité administrative, la Cada suit une procédure similaire à une procédure juridictionnelle, le formalisme en moins. Ce n'est pas pour rien que j'ai recruté une ancienne greffière en chef du tribunal administratif de Caen comme secrétaire générale. La Cada est saisie de demandes dont il faut apprécier la recevabilité, avant de les soumettre à l'instruction du secrétariat général qui effectue un travail important de mise en état. Ce secrétariat dispose de treize ETP (équivalents temps plein). Le dossier est ensuite traité par l'un des dix rapporteurs, puis présenté par l'un des deux rapporteurs généraux à une réunion du collège qui siège une fois tous les quinze jours, dans une salle du Conseil d'État.

La loi prévoit que les avis seront rendus dans un délai d'un mois. La commission est saisie de 10 000 demandes par an, dont la moitié sont retenues pour faire l'objet d'une instruction. Elle rend tous les quinze jours plus de 250 avis et conseils, ce qui revient à plus de 5 000 par an. Ce rythme est très lourd compte tenu des délais courts qui nous sont imposés. La majorité de nos interventions est constituée par des avis. Les conseils sont particulièrement utiles aux collectivités territoriales ou aux petites structures comme les hôpitaux. Les missions de la Cada ont été étendues par des lois spéciales en matière d'archives ou d'environnement, et par l'ordonnance du 6 juin 2005 qui a instauré un nouveau régime de réutilisation des informations publiques. L'expérience montre que les lois spéciales posent des problèmes de champ d'application.

En quarante ans, l'objectif de prévention du contentieux qui avait inspiré la création de la Cada a été parfaitement atteint. Le volume du contentieux dont sont saisies les juridictions administratives en matière d'application de la loi de 1978 est remarquablement faible. Preuve en est que dans notre rapport pour 2014, nous n'avons recensé pour cette année que quatre arrêts du Conseil d'État sur la communication des documents administratifs. Les avis de la Cada sont spontanément suivis dans 80 % des cas, car ils sont la plupart du temps confirmés au contentieux.

Autre acquis de notre expérience, nous avons fait largement admettre par les acteurs publics concernés les principes régissant les données publiques, et cela grâce au travail considérable de nos 1 600 personnes responsables de l'accès au sein des administrations (Prada). Des foyers de résistance persistent, par ignorance ou par mauvaise volonté. Ils donnent lieu à des refus injustifiés que nous tentons de limiter, en faisant mieux connaître notre doctrine, qui doit servir de jurisprudence. Pour cela, nous avons rendu nos avis publics - ce que les textes ne prévoyaient pas - en pratiquant l'anonymisation nécessaire, bref, nous avons été pionniers de l'open data sur la communication des documents administratifs.

Enfin, nous avons fait du droit de la communication des documents administratifs le ressort d'autres évolutions sociétales, comme les novations récentes en matière de transparence de la vie publique, et, surtout, l'open data qui représente un enjeu économique important dans la nouvelle société numérique.

En 2015, deux échéances législatives importantes se profilent. La transposition de la directive sur la réutilisation des informations du secteur public (ISP) du 26 juin 2013 devrait redéfinir le régime de réutilisation des informations publiques. Nous nous y sommes beaucoup préparés. Un projet de loi devrait être présenté en juillet. L'open data a déjà inspiré plusieurs réformes législatives dans des domaines particuliers : publicité des données de santé, dispositions du projet de loi relatif à la nouvelle organisation territoriale de la république (NOTRe) pour les collectivités territoriales, celles sur les transports dans le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques. Le projet de loi Numérique devrait élargir le champ de la diffusion publique en y incluant les fameuses données d'intérêt général. Ces évolutions législatives constitueront certainement pour la Cada la réforme la plus importante depuis 2005. C'est une perspective stimulante. Nous devons réfléchir aux moyens d'y faire face.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion