Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 25 juin 2015 à 14h00
Dialogue social et emploi — Article 20

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Nous abordons, avec cet article 20, un sujet très important. L’insertion de cet article dans le projet de loi fait d’ailleurs suite au conflit né de la renégociation des règles de la nouvelle convention sur l’assurance chômage, en mars 2014, plus particulièrement des annexes VIII et X relatives au régime des intermittents du spectacle.

Alors que ce régime n’est, rappelons-le, que la juste contrepartie d’une activité professionnelle caractérisée par une précarité liée au caractère par définition temporaire des événements culturels et qu’il permet de maintenir la vitalité culturelle en France, le MEDEF est allé jusqu’à prôner sa disparition.

Les dispositions prévues n’ont heureusement pas été jusque-là, mais elles ne se sont pas révélées satisfaisantes pour autant.

Non seulement cet accord a été conclu entre des syndicats faiblement représentatifs du secteur culturel et de manière assez antidémocratique, mais il entérinait et aggravait aussi les accords de 2003, auxquels toute la gauche s’était alors opposée à raison, puisqu’ils conduisaient à précariser davantage les intermittents du spectacle.

Il a donc été fortement contesté par les organisations professionnelles représentatives du monde du spectacle, et les grèves et manifestations de juin 2014 ont finalement débouché sur la création d’une mission d’expertise menée par le député Jean-Patrick Gille.

Reprenant une partie des conclusions de la mission, le Premier ministre a annoncé le 11 janvier 2015 l’inscription dans la loi de l’existence de règles spécifiques d’indemnisation chômage des intermittents du spectacle, qui ne relèvent aujourd’hui que d’un accord interprofessionnel. L’article 20 est la concrétisation de cette annonce.

La version adoptée par l’Assemblée nationale prévoit des règles spécifiques qui seront négociées entre les partenaires sociaux représentatifs de l’ensemble des professions du spectacle, jusqu’alors exclues des négociations.

Ces règles devront néanmoins respecter le document de cadrage adressé par les partenaires sociaux au niveau interprofessionnel, précisant les objectifs de la négociation en termes de trajectoire financière et de respect des principes applicables à l’ensemble des bénéficiaires du régime d’assurance chômage.

Si l’inscription dans la loi de la participation des organisations professionnelles représentatives du monde du spectacle aux négociations et la pérennisation du principe d’un régime d’assurance chômage tenant compte des spécificités de l’activité des intermittents du spectacle constituent une avancée, que nous réclamions depuis 2003 – nous avions d’ailleurs déposé une proposition de loi en ce sens –, la portée de cet article reste trop limitée, puisqu’elle demeure subordonnée à la fixation d’un cadre de négociation, notamment financier, par les organisations interprofessionnelles au niveau national.

Certes, l’article 20 sécurise ce régime en empêchant sa disparition pure et simple à chaque renégociation de la convention UNEDIC. Cependant, nous regrettons que les représentants du secteur du spectacle vivant ne soient associés qu’une fois le cadre des négociations déterminé par les représentants des partenaires sociaux interprofessionnels, concernant notamment la trajectoire financière, ce qui réduit d’autant leur pouvoir de négociation.

Ces conditions de négociation permettront-elles enfin l’émergence des propositions de réformes alternatives formulées depuis plusieurs années, que nous réclamons également au travers de notre proposition de loi ? Permettront-elles d’envisager un retour sur la réforme de 2003, qui a aggravé la précarité des intermittents sans déboucher pour autant sur des économies ? Permettront-elles le retour au calcul des 507 heures à date anniversaire et sur douze mois, comme cela est préconisé dans le rapport rendu par la mission, ou encore la suppression de l’augmentation du différé d’indemnisation ?

À ces questions, les amendements de Mme la rapporteur adoptés en commission ont au moins le mérite de répondre clairement en vidant l’article 20 de sa substance. Ils privent tout simplement les organisations professionnelles représentatives du spectacle vivant et de l’audiovisuel du petit pouvoir de négociation qui leur était accordé, et prévoient simplement que leurs propositions seront recueillies et transmises aux organisations représentatives au niveau national, qui sont, elles, chargées d’adopter les dispositions concernant les intermittents.

Nous avons donc déposé un certain nombre d’amendements visant à renforcer les droits des intermittents, tout en rapprochant le texte de la version de l’Assemblée nationale, qui, malgré ses défauts, reste plus protectrice que les propositions de la droite.

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