Intervention de Dominique Watrin

Réunion du 25 juin 2015 à 14h00
Dialogue social et emploi — Article 23 quater

Photo de Dominique WatrinDominique Watrin :

Cet article, dont le Gouvernement nous fait une présentation sans étude d’impact ni élément autre que l’affirmation plus ou moins manifeste d’un souhait exprimé par les partenaires sociaux, nous pose problème.

Mes chers collègues, il semble utile de rappeler que les organismes collecteurs de la participation des entreprises à l’effort de construction, le mal nommé « 1 % logement » – il a été réduit dans le passé à mesure de l’accroissement du financement des aides à la personne –, disposent chaque année de rien de moins que 4 milliards d’euros de ressources nouvelles, constituées par la collecte, le remboursement des prêts antérieurement accordés et le produit d’emprunts réalisés auprès de la Caisse des dépôts et consignations.

Bien entendu, ces 4 milliards d’euros ont souvent suscité la convoitise d’un État chaque année plus chiche en matière de dépenses budgétaires destinées au logement, l’année 2015 confinant en la matière en une forme de record, avec juste un peu plus de 200 millions d’euros de dépenses directes pour la construction et la réhabilitation de logements sociaux !

Au demeurant, l’examen du projet de loi Macron, texte qui revient sur nombre des avancées de la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, a clairement marqué une forme de priorité dans la réalisation de logements intermédiaires, afin d’assurer quelques « opérations tiroir » dans le patrimoine social, faute de pouvoir développer l’offre de nouveaux logements.

D’ailleurs, la Société nationale immobilière, bras armé de la Caisse des dépôts et consignations, elle-même bras armé de l’État, se retrouve désormais clairement positionnée pour « accompagner » cette politique.

La Participation des employeurs à l’effort de construction, contribution utile instaurée dans les années cinquante pour faire face à la pénurie de logements, connaît des évolutions sensibles. Le présent article réduit le nombre des collecteurs à seize entités appelées à se retrouver autour d’une structure tripolaire.

À la vérité, au-delà d’un louable souci de réduction des frais de structure des organismes collecteurs, la question du contrôle de leur activité et de la maîtrise de l’allocation de leurs ressources se pose clairement.

C’est sans doute la crainte d’une forme d’étatisation de la collecte qui a poussé le MEDEF, principal acteur de la gestion des organismes collecteurs, à émettre une opinion favorable sur la procédure suivie dans le cadre de cet article.

En effet, 4 milliards d’euros à contrôler, ce n’est pas rien ! Cela permet parfois d’arrondir quelques angles en matière de politique sociale dans l’entreprise !

Une telle situation doit clairement interpeller les salariés et les citoyens.

Nous ne voulons pas que les ressources de la collecte réalisée auprès des entreprises soient dilapidées dans des frais de gestion plus ou moins somptuaires ou des investissements immobiliers hasardeux ni qu’elles soient englouties dans le trou noir de la régulation budgétaire.

La collecte annuelle et les retours de collecte de la participation des entreprises, c’est d’abord l’argent des salariés. Il serait plus que temps que ces sommes leur reviennent, et notamment en gestion.

C’est particulièrement vrai compte tenu de la situation actuelle du logement social, marquée par les insuffisances de la construction neuve et par le développement pour le moins erratique d’un parc locatif pourtant largement adapté à la demande !

La rénovation urbaine est sans doute un projet ambitieux. Néanmoins, accompagnée d’une contraction de l’offre de logements locatifs à loyers abordables, elle devient un obstacle à la résolution de la crise du logement que nous connaissons, sous des formes diverses, depuis la loi du 29 décembre 1976 de finances pour 1977 et, surtout, depuis la loi Méhaignerie de 1986.

Rendre aux salariés le contrôle de l’utilisation de la participation des entreprises à l’effort de construction, en améliorant l’économie de ce dispositif, est donc une nécessité fondamentale.

De ce point de vue, l’article 23 quater ne constitue pas la meilleure solution au problème. Nous ne le voterons donc pas, au-delà même de notre hostilité de principe à toute mesure d’habilitation à légiférer par ordonnance.

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