Intervention de Roland Courteau

Réunion du 3 mai 2005 à 21h45
Énergie — Article 10 ter

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

L'article 10 ter tel qu'il a été adopté à l'Assemblée nationale prévoit que, dorénavant, seuls les parcs éoliens d'une puissance supérieure à 20 mégawatts et situés dans les zones de développement de l'éolien pourront bénéficier de l'obligation d'achat de l'électricité qu'ils produisent.

Autant dire d'emblée que, si elle était adoptée en l'état par le Sénat, cette disposition signerait l'arrêt de mort de l'énergie éolienne en France.

En fait, c'est un nouvel amendement « éolicide » qui nous vient de l'Assemblée nationale. C'est le deuxième en moins d'un an sur le même texte : convenons que cela fait tout de même beaucoup.

A ce stade, le doute n'est plus permis : c'est véritablement la mort de l'éolien que l'on veut.

Il n'est donc pas possible que le Sénat laisse les choses en l'état, au moment même où un sondage, réalisé en avril, montre que 91 % des Français sont favorables au développement de l'éolien.

Je rappelle que la France a pris l'engagement de porter à 21 % d'ici à 2010 la part de l'électricité produite à partir des énergies renouvelables.

Or, du fait de la hausse de la consommation d'électricité et en l'absence d'investissements supplémentaires, nous nous situons aujourd'hui, toutes sources d'énergies renouvelables rassemblées, autour de 13, 5 %. Bref, il nous semble régresser.

Comment atteindre l'objectif de 21 % si l'on porte ce coup fatal à l'énergie éolienne, la seule aujourd'hui à disposer d'une marge de progression ?

En vérité, persister dans cette voie, ce serait prendre délibérément le parti de refuser à la France toute possibilité de tenir ses engagements. Or qui peut ici affirmer ne pas être soucieux de la parole de la France ?

Suivre l'Assemblée nationale dans ses arcanes conduirait à adopter la position la plus négative de tous les pays européens, alors que, déjà, nous sommes distancés sur le plan des énergies renouvelables hors hydraulique : 405 mégawatts de puissance sont installés en France pour l'éolien, contre 16 600 en Allemagne et 8 200 en Espagne.

Je rappelle par ailleurs que cette filière a généré quelque 600 emplois en Languedoc-Roussillon - Septimanie - et 2 000 dans la France entière. Ces emplois sont particulièrement importants dans l'Aude, pays cathare. Si développement il y a, les prévisions à court terme portent sur quelque 20 000 emplois.

Certains reprochent à l'énergie éolienne son intermittence, qu'ils considèrent comme sa principale faiblesse.

Cela ne semble pas être la position de Réseau de transport d'électricité, RTE, qui indiquait que « si chaque parc éolien pris séparément offre une production intermittente, les régimes des vents étant décorrélés au niveau national et régional, il en résulte un foisonnement plutôt favorable au développement de l'éolien, pour peu qu'il soit réparti sur le territoire le plus vaste possible ».

RTE estime qu'un parc éolien de 10 000 mégawatts - on peut rêver ! - est susceptible de contribuer à la sécurité de l'équilibre entre l'offre et la demande à hauteur de 2 866 mégawatts, et qu'il remplace un parc conventionnel de puissance équivalente pour un même qualité de fourniture.

Récemment, un responsable RTE indiquait que, le 28 février dernier, journée record de consommation en France, notre pays a importé d'Espagne plus de 500 mégawatts. Ainsi, précisait-il, « l'importante production éolienne espagnole a permis d'économiser du charbon et du fioul en France ». J'ajouterai, à titre personnel, que cela a aussi permis d'éviter quelques quantités d'émissions de gaz à effet de serre.

J'en viens, pour conclure, aux arguments des contempteurs de l'éolien, qui invoquent le développement anarchique des projets.

Selon une enquête réalisée en juillet 2004, 175 permis ont été délivrés, dont 25 % sont en cours de contestation devant les tribunaux administratifs, tandis que 95 projets ont été refusés... au motif d'une atteinte paysagère ! Alors, qui parlait de spectre de déferlement éolien ? Qui parle d'anarchie ?

On nous dit que la protection des paysages serait compromise faute de réglementation adaptée. Faut-il rappeler, mes chers collègues, que c'est bien le souci de protection des paysages qui nous a incités, ici même, à adopter la loi du 3 janvier 2003, modifiée par celle du 2 juillet 2003 ?

J'en rappelle brièvement les principales dispositions : confirmation de l'obligation de permis de construire pour les éoliennes de plus de 12 mètres, obligation d'étude d'impact et d'enquête publique, obligation de garanties financières en vue d'assurer le démantèlement des installations qui - faut-il le rappeler ? - sont réversibles et, enfin, possibilité de mise en place de schémas régionaux éoliens. Il est vrai que la proposition de loi de notre collègue M. Le Grand avait été à l'origine du vote de ces lois. Je lui rends donc hommage.

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