Intervention de Daniel Goulet

Réunion du 3 mai 2005 à 21h45
Énergie — Article 10 ter

Photo de Daniel GouletDaniel Goulet :

C'est pourquoi je trouve quelque peu déconcertant que, par le biais d'une démarche aussi curieuse que soudaine, tant sur le fond que dans la forme, un amendement, auquel personne ne s'attendait, remette tout à coup en cause, en seconde lecture, un principe bien établi, risquant, par voie de conséquence, de stopper les projets engagés par les collectivités locales.

A-t-on d'ailleurs tenu compte des investissements coûteux qui ont été mis en place pour les études, les recherches et l'élaboration des dossiers faisant appel à des budgets importants et spécifiques ? Faudra-t-il passer par profits et pertes les engagements financiers consentis par les collectivités locales ?

Il est difficilement compréhensible que les nouvelles mesures imaginées par nos collègues députés soient de nature à modifier substantiellement la réglementation existante et bafouent ainsi un certain nombre de considérations fondamentales.

Premièrement, en restreignant les possibilités de développement des parcs éoliens par l'établissement d'un seuil minimal de 20 mégawatts pour le rachat de l'électricité produite à prix garanti, on va, me semble-t-il, à l'encontre de l'une des sources d'énergie en fixant de nouvelles procédures et en ignorant du même coup les principes de la décentralisation, puisque la loi du 3 janvier 2003, modifiée par la loi du 2 juillet 2003, donnait compétence aux régions pour mettre en place un schéma régional éolien, outil important de cohérence et de répartition équilibrée de développement.

Deuxièmement, cette cohérence, qui n'a aucun caractère prescriptif, relève en réalité, en premier lieu, des collectivités locales, notamment de la compétence des élus communaux et intercommunaux directement concernés et responsables, qui connaissent le sujet mieux que quiconque, après l'avoir confié à des spécialistes. Or ce n'est certainement pas sur ces élus locaux qu'il nous faut faire peser la suspicion ou l'incompétence en matière d'aménagement du territoire et, surtout, de préservation de l'environnement, comme le laisse penser sur ce point l'exposé des motifs qui justifierait l'amendement créant l'« article 10 ter nouveau ». Interrogeons les populations et nous verrons qu'elles ne se montrent pas défavorables aux implications éoliennes, bien au contraire.

Les tenants du temple de l'environnement - c'est ma troisième observation -, comme s'ils en étaient les seuls gardiens, ne connaissent plus la mesure de leurs exigences. Certains vont jusqu'à évoquer la formule selon laquelle la France, première destination touristique en Europe, verrait son image ternie et ses multiples paysages détruits. Et pour forcer encore le trait, certains autres encore évoquent un désastre programmé sur le prix de l'immobilier, en particulier des propriétés situées à proximité d'une éolienne.

Même s'il n'est pas dans l'esprit des initiateurs de l'amendement de vouloir mettre un terme à l'éolien en France, les effets de leur démarche n'en restent pas moins négatifs et psychologiquement désastreux sur l'avenir même de la filière. Nous connaissons déjà les débats en matière d'habitat dit dispersé, communément appelé « mitage », dont les conséquences fâcheuses vont à l'encontre des efforts consentis par les élus locaux, qui doivent résister à la désertification des territoires ruraux, déjà frappés par la disparition de leurs services publics.

Alors, je vous en prie, ne chargeons pas trop la barque des restrictions parallèles ou superposées qui continuent de frapper des territoires, et sur lesquels, par ailleurs, on imagine des mesures en tous genres pour les revitaliser, ce qui n'est pas le moindre des paradoxes, vous en conviendrez.

Je m'opposerai donc, vous l'aurez compris, à cet article 10 ter nouveau, parce qu'il n'est pas fondé et parce que, dans la forme, il nous est soumis en catimini, sans que leurs auteurs aient jugé utile d'en rechercher la justification auprès des intéressés, notamment auprès des élus et des responsables du secteur économique.

En revanche, je soutiendrai la démarche de notre rapporteur, en le remerciant et en le félicitant de la présentation très pertinente de l'amendement qu'il nous propose, qui allie à la fois le bon sens et la logique, que nous retrouvons chez nos élus locaux, ainsi que le respect de l'environnement, tel que nous le concevons, au même titre d'ailleurs que ceux qui, en la circonstance, ne devraient pas nous donner de leçons.

En adoptant cet amendement de notre collègue Henri Revol, nous manifesterons aussi notre souci de rechercher et de soutenir toutes les orientations possibles sur les énergies renouvelables, qui répondent aux nécessités d'un aménagement cohérent et équilibré du territoire, assurant du même coup les besoins en énergies qui, demain, seront encore considérables.

Enfin - et j'en aurai terminé, madame la présidente -, au moment où, hantées par les craintes d'un déclin, certaines de nos régions rurales ressentent malgré tout un certain frémissement d'intérêt pour leur avenir - je l'ai constaté tout récemment, lors de la dernière assemblée générale des maires de mon département -, nous devons envoyer des signes de réconfort et d'encouragement, plutôt que l'inverse.

Nous comptons sur notre Haute Assemblée pour nous démarquer de cet article 10 ter nouveau inacceptable et pour adopter, avec la sagesse qui la caractérise, l'amendement très pertinent que nous propose M. le rapporteur.

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