Intervention de Roland Courteau

Réunion du 24 octobre 2006 à 16h00
Secteur de l'énergie — Article 10

Photo de Roland CourteauRoland Courteau :

Mais dès lors que vous serez d'accord avec nous sur le fait que l'on ne transige pas avec la parole donnée, surtout lorsqu'elle engage un ministre et un gouvernement, nous ne doutons pas que vous agirez en conséquence pour que cette parole ne soit pas reniée et que les engagements de M. Sarkozy ne connaissent pas le brillant destin d'une feuille morte.

D'autant que, outre cette dimension morale du problème, la privatisation de GDF, comme l'a laissé entendre M. Sarkozy, serait contraire aux intérêts vitaux de la France.

Nous ne voulons donc pas croire que vous serez insensibles et à la morale et aux intérêts vitaux de la France.

Comment pourrions-nous en effet assurer la sécurité énergétique de la France en commençant par abandonner à un groupe privé les infrastructures lourdes qui en sont les outils, alors que, partout dans le monde, on assiste à une reprise en main du marché par les gouvernements et les États face à l'évolution préoccupante de ce secteur ?

Et aucune privatisation ne s'est jamais réalisée sans compression d'effectifs, première variable d'ajustement des coûts vers le bas, et ce pour la plus grande satisfaction des actionnaires. Nul doute que cette considération ne laissera personne ici indifférent, du moins pas un de ceux qui auraient des préoccupations par rapport à l'emploi...

Sauf grossière erreur de ma part, il ne m'est donc pas possible d'imaginer qu'une telle situation ait pu échapper à la majorité sénatoriale.

De même, nous voulons croire que les membres de cette majorité auront parfaitement compris que voter l'article 10, qui enclenche la privatisation, aboutirait à remettre en cause les fondements d'un service public qui a largement démontré son efficacité depuis soixante ans et que le monde entier nous envie.

Il faudrait que nous, membres de l'opposition, nous ayons vraiment mauvais esprit pour penser, ne serait-ce qu'un seul instant, que la majorité de droite serait prête à balayer, sans trop y réfléchir, soixante ans d'un service public de qualité et à laisser un groupe privé accaparer, dans l'indifférence, un bien public national...

Qui en effet oserait imaginer une telle irresponsabilité ?

Il serait tout aussi déraisonnable de notre part de penser que cette même majorité sénatoriale ne serait pas consciente du danger que représente la construction d'un groupe privé, concurrent frontal d'EDF, avec, de surcroît, les conséquences néfastes que l'on devine pour le service commun EDF-GDF et ses 58 000 agents.

Qui en effet oserait imaginer pareille inconscience ?

Enfin, même si nous déplorons que, tout au long de ces deux semaines de débat, la majorité sénatoriale soit restée totalement inerte, transformée en simple machine à voter, nous voulons croire qu'elle se fera un devoir de réagir, et avec une extrême vigueur, contre cette façon d'imposer au Parlement qu'il signe un chèque en blanc aux différents opérateurs, alors que nul ne sait la tournure que prendront les événements après la privatisation de GDF.

Une chose est certaine, et une seule : on nous demande de privatiser GDF. Pour le reste, on verra après !

Quelle sera exactement l'ampleur des cessions qu'exigera la Commission sur le projet de fusion ? On verra après, ... après le vote !

Quel sera le coût réel des échanges d'actions ? Cinq milliards d'euros ? Plus ? On verra après, ... après le vote !

Quel sera le coût, pour GDF, de la prise en charge de l'endettement de Suez ? On verra après, ... après le vote !

Et quelle est la réalité de cette optimisation fiscale qui permettrait, dit-on, à Suez d'économiser jusqu'à 3 milliards d'euros d'impôts ?

Bref, tout le monde l'aura compris, dans cette histoire, il y aura des gagnants et des perdants.

Comme l'a dit l'un de vos amis, à l'Assemblée nationale, « il y a Suez qui se fait absorber, mais qui devient le numéro un de celui qui l'absorbe ». Il fallait quand même le faire !

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