Intervention de Daniel Steinmetz

Commission d'enquête Réalité du détournement du crédit d'impôt recherche — Réunion du 4 mai 2015 à 16h00
Table ronde de syndicats de chercheurs

Daniel Steinmetz, secrétaire général du Syndicat des travailleurs de la recherche scientifique (SNTRS - CGT) :

Nous avons posé, lors d'une rencontre très récente avec le Président du CNRS, une question précise : avez-vous été interviewé par la commission d'enquête du Sénat ? Il nous a expliqué avoir été destinataire de questions écrites, auxquelles il a répondu. Il n'a pas constaté de progression importante de son activité contractuelle liée au CIR. Pour avoir été au conseil d'administration pendant de nombreuses années jusqu'à l'an dernier, je n'ai pas vu de montée significative des contrats industriels proprement dits lors de la phase d'expansion du CIR. Je suis donc un peu étonné en lisant l'importance des déclarations de CIR liées à des opérations transférées dans des laboratoires du secteur public. Ce qui est nouveau, c'est que nous avons vu depuis l'apparition de l'ANR - et je ne suis pas spécialiste de la fiscalité des entreprises - une substitution aux relations directes que les entreprises pouvaient nouer avec les laboratoires de relations par le biais de l'ANR. Un certain nombre de projets partenariaux financés par l'ANR, entre le secteur public et des entreprises font peut-être l'objet d'une déduction fiscale pour les entreprises. Le budget du CNRS sur les dernières années montre une baisse significative des contrats industriels, de l'ordre de 50 à 60 millions d'euros, et une montée en force des subventions publiques de l'ANR, lesquelles englobent des projets partenariaux avec des laboratoires privés.

Pour les gens comme moi qui travaillent dans des domaines de l'énergétique et du génie des procédés, ce transfert du financement d'une collaboration directe à une médiation par le biais de l'ANR a distendu les liens que les laboratoires publics entretenaient avec les équipes de recherche dans l'industrie. À l'époque, des équipes de recherche industrielle étaient constituées, en capacité d'avoir une expertise forte et des relations étroites avec le secteur public. J'ai beaucoup travaillé avec le centre de recherche de Gaz de France, d'EDF... Petit à petit, ces gens-là ont été remplacés par des collègues plus jeunes, dont le discours est celui d'une utilisation des moyens publics pour financer des opérations de coopération. « Si l'on met un euro, nous voulons en récupérer trois ou quatre, à travers un projet ANR, éventuellement des aides de la région et de l'Europe ». Nous sommes dans une situation catastrophique, car quand l'ANR procède à l'évaluation des programmes, elle convoque les ingénieurs qui étaient en responsabilité du projet et très souvent l'ingénieur de l'industrie ne vient pas, pour la simple et bonne raison qu'il n'est plus responsable du projet. L'initiateur du projet n'est plus disponible et le jeune collègue remplaçant ne sait pas forcément qu'il pourrait venir.

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