S'agissant des acteurs de la défense, sept grands contractants réalisent 22 % des dépenses de recherche et développement. Ces dépenses ne sont pas seulement financées par les formules gouvernementales, mais également par l'autofinancement des entreprises. Proportionnellement, la part de celui-ci, dans les grands groupes concernés, est toutefois plutôt inférieure à la moyenne. C'est ce qui explique la position importante de ces sept acteurs dans le dispositif de la recherche et développement en France.
En second lieu, la Commission européenne, dans les années 1990, afin d'aborder les questions de défense par le biais des technologies duales, avait commandité un certain nombre d'études à des universitaires dont je faisais partie. Une des composants de la discussion portait sur la nature de la recherche et développement militaire. On constatait à l'époque que les frontières de la recherche et développement, qui font d'ailleurs l'objet d'une section spéciale dans le manuel de Frascati réactualisé, étaient extrêmement difficiles à définir. C'est principalement au niveau de la phase aval du développement expérimental que la confusion avec les centres d'essais eux-mêmes était possible.
De manière générale, la définition de la recherche et développement est difficile. Il faut donc bien y réfléchir. De ce point de vue, l'Annexe n° 17 du rapport de la Cour des comptes de 2013 sur les conditions dans lesquelles les entreprises sont autorisées à déduire la recherche et développement sous conditions défie l'entendement !
Quel est l'impact de la recherche et développement de défense sur le système d'innovation national et sur la compétitivité ? Je ne m'aventurerai pas sur ce sujet, même si j'ai écrit abondamment à ce propos, car c'est un débat en lui-même. Les industries de défense sont des industries systémiques et très fortement intégrées. Il existe ainsi des écosystèmes dont chacun se félicite à Toulouse, en Bretagne ou en PACA. La solidarité des fournisseurs de rang un et même parfois de rang deux y est très importante. Il ne fait donc aucun doute que la recherche et développement de défense structure des écosystèmes dans les régions et dans les industries issues directement du milieu de la défense, ou qui en sont proches, comme l'aéronautique civile.
Autre thème que je n'aborde pas, mais que je veux mentionner, celui de l'impact dans la diffusion intersectorielle - hors aéronautique, espace ou construction navale - de la recherche et développement militaire. Malgré quarante ans de débats, la question de l'organisation des écosystèmes de défense n'est toujours pas tranchée. Toutefois ces programmes ont des effets de diffusion intersectorielle et au niveau de l'économie nationale moindres que ceux produits par les financements de R§D civiles.